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« Hamlet » à Turin : le retour du chef-d’œuvre d’Ambroise Thomas en version ténor, dans une production idéale

par Paul Fourier
30.05.2025

L’équipe de qualité superlative réunie pour cet opéra injustement négligé, impose cet Hamlet turinois comme une production de référence que l’on espère voir reprise dans les années prochaines.

Pourtant riche d’un parcours lyrique conséquent, Ambroise Thomas (1811-1896) n’a pas été favorisé par la postérité. De temps à autre réapparaissent Mignon (1866) et ce que d’aucuns considèrent comme son chef-d’œuvre : Hamlet.

Cet opéra, première collaboration du compositeur avec les librettistes Michel Carré et Jules Barbier, a été écrit en 1863, mais, de manière inexplicable, la première mouture d’Hamlet ne fut pas immédiatement créée. C’est, après le succès de Mignon, qu’une seconde version, revue et corrigée, vit le jour, le 9 mars 1868, sur les planches de la salle Le Peletier de l’Opéra de Paris.

Les derniers feux éclatants du « grand opéra » à la française

Même si on lui a parfois accolé les étiquettes d’opéra-lyrique, ou de drame lyrique, Hamlet respecte les codes en usage du « grand opéra », ce mouvement musical français qui dominait les scènes de l’Opéra parisien, mais approchait alors de son épilogue. Plutôt que les sujets historiques qui donnaient la matière des opéras de Meyerbeer et Halévy, les opéras des années 1850 et suivantes trouvent souvent leurs sources dans les œuvres de grands auteurs, tels que Shakespeare (Macbeth de Verdi, Roméo et Juliette de Gounod) et Goethe (Faust, Mignon).

 

Dans le cas d’Hamlet, les librettistes vont s’inspirer de l’adaptation qu’avaient réalisée, pour le théâtre, en 1848, Alexandre Dumas (père) et Paul Meurice.

Il s’avère cependant qu’Hamlet – avec son héros qui évolue sur la corde raide de la folie – était un matériau assez rétif à une traduction opératique. L’écriture singulière du monologue « Être, ou ne pas être » en est une forme de témoignage.

Cela n’aura nullement empêché l’œuvre, composite passionnant, d’être d’une incomparable richesse avec son ballet, ses scènes de fêtes pompeuses, le duo d’amour et les scènes d’affrontement entre Hamlet, sa mère et son beau-père, la « chanson bachique » (qui n’est pas sans rappeler le toast porté dans le Macbeth de Verdi), les scènes fantastiques avec l’apparition du spectre du défunt Roi.

La redondance de « Doute de la lumière, doute du soleil, mais ne doute jamais de mon amour », une phrase mélodique qui ne peut que se fixer dans la mémoire des spectateurs, montre que Thomas, Barbier et Carré ont également cherché à faire de la folie d’Hamlet, la cause de l’abandon de sa fiancée Ophélie, un ressort dramatique essentiel de l’histoire.

 

Enfin, Thomas n’a pas hésité à recourir à des allusions aux œuvres populaires de son époque. Le grand air d’Ophélie, par sa structure, n’est pas sans rappeler la « chanson du roi de Thulé » que chante Marguerite dans le Faust de Berlioz (1846) ou celui de Gounod (1859).

Et ce même air fait référence aux « Willis », ces jeunes filles qui, souffrant de la douleur d’avoir été trahies, se sont noyées, errant tels des esprits des eaux, et sont les protagonistes du ballet Giselle, l’un des spectacles les plus célèbres et les plus aimés de la scène parisienne d’alors.

De ténor à baryton, pour un retour au ténor

Hamlet est l’un de ces opéras qui portent l’empreinte des interprètes de la création. D’un côté, la voix de la soprano d’origine suédoise Christine Nilsson, considérée comme l’héritière de Jenny Lind, a mené le rôle d’Ophélie vers la virtuosité colorature.

De l’autre, l’absence, sur les scènes françaises, d’un ténor de qualité a fait glisser le rôle d’Hamlet vers le registre barytonal (admirablement servi alors, par le remarquable Jean-Baptiste Faure) rendant le jeune prince plus mature, plus viril.

L’œuvre est donc devenue l’un des beaux chevaux de bataille des plus grands barytons.

Dans la période récente, il est ainsi impossible d’oublier Thomas Hampson ou Simon Keenlyside – tous deux accompagnés de la fabuleuse Ophélie de Natalie Dessay -, auxquels ont succédé Stéphane Degout et, dernièrement, Ludovic Tézier sur la scène de l’Opéra Bastille.

Mais la version originale pour ténor existe même si elle est rarement donnée (ce fut le cas en 2022, au Festival de Montpellier, pour une soirée de concert, avec déjà John Osborn, et la regrettée Jodie Devos), et c’est cette version que l’Opéra de Turin a eu l’excellente idée de proposer à ses spectateurs.

Le talent de Jacopo Spirei pour traduire la folie d’Hamlet

On l’a dit, les ambiguïtés du héros n’ont pas été simples à traduire en langage opératique. Celui-ci oscille entre un délire feint, fort pratique pour avancer dans l’adversité, et une autre affection qui paraît bien réelle avec de véritables manifestations pathologiques, altérant son comportement et sa relation avec les autres, notamment avec Ophélie dont la seule parenté avec Polonius ne semble pas en mesure d’expliquer la disgrâce qu’elle rencontre.

Ces ambiguïtés ne sont guère plus simples à gérer pour le metteur en scène, qui doit savoir trouver le bon ton pour préserver la magie shakespearienne propre aux motivations d’Hamlet.

À cet égard, la production de Jacopo Spirei est, de loin, la plus forte, la plus convaincante, et la plus belle de toutes celles données ces dernières années. N’empruntant pas la voix de la sophistication, elle est linéaire, mais conserve cependant une part de mystère, figurée par la confrontation de deux mondes.

Deux lectures nous sont ainsi proposées, deux lectures qui font hésiter quant à la direction vers laquelle nous, spectateurs, nous sommes entraînés.

 

D’un côté, les personnages agissent selon la lecture de Shakespeare, revue par Dumas et Meurice. La cour de Claudius et Gertrude apparaît dans son humanité triviale.

Mais lorsque Hamlet ou Ophélie sont renvoyés vers les extrêmes où les mènent leurs discernements troublés, la mécanique se grippe, des figurants expriment des mouvements que l’on imagine traduire les soubresauts de l’esprit.

Le questionnement (« Être, ou ne pas être ») garde, dans son incarnation, une part de mystère, pas forcément directement interprétable, et c’est là la grande force de cette mise en scène.

Si l’on ajoute à cela une indéniable beauté, une esthétique des différentes scènes qui nous sont proposées (ces marionnettes géantes de la fin de l’acte II !), nous nous retrouvons, à tous moments, confrontés au choix cornélien des personnages (encore « Être, ou ne pas être ») : devons-nous regarder superficiellement une représentation, ou chercher à pénétrer dans l’esprit des protagonistes, et accepter,  dès lors, de nous abandonner à une errance pas nécessairement logique affectée par une distorsion du temps et de l’espace.

La force de l’orchestre et de la direction de Jérémie Rhorer

L’autre force a émané de l’Orchestre du Teatro Regio qui mené la représentation vers les sommets grâce à la direction raffinée de Jérémie Rhorer (et, reconnaissons-le, à l’acoustique de la salle qui semblait, ce soir, particulièrement adaptée à la musique et au style du compositeur). Le chef a su traduire les importants contrastes qui font cet opéra, distinguant le côté parfois tonitruant de la partition – comme au tout début avec des cuivres débridés -, et l’intervention des chœurs, avec l’intimisme des scènes à deux ou trois personnages, dans lesquelles les voix, totalement protégées, ont pu s’exprimer librement.

Rhorer a ainsi conçu un véritable travail d’orfèvre menant le spectateur, déjà accompagné par la mise en scène de Spirei, sur des chemins très excitants où, dans chaque partie, l’attention était renouvelée par une ambiance propre soutenue par beauté des instruments, singulièrement des cors, des clarinettes et des cordes.

Et quels interprètes !

La troisième force fut, bien évidemment, celle des interprètes, et notamment des trois principaux qui ont évolué sur des sommets qu’il n’est d’ordinaire, et particulièrement dans ce répertoire, pas forcément aisé d’atteindre.

 

À force de l’encenser dans tous les rôles qu’il aborde, on en vient légitimement à se poser la question de savoir si ce n’est pas John Osborn qui nous fait aimer les personnages qu’il interprète – en l’occurrence ici la rare version ténor d’Hamlet.

Le chanteur réussit d’abord le pari délicat de donner corps à Hamlet, de lui faire traverser sans encombre les différents aspects de sa personnalité (…et de sa folie), en colorant sa voix des contrastes nécessaires et d’une certaine rage quand il le faut.

Le legato est parfait, soutenant cette invraisemblable prononciation française du ténor qui offre de l’amour à Ophélie avant de la mépriser, joue l’effroi face au « Spectre infernal », se permet de chanter monté comme un dément, sur une table lancée à vive allure à la fin de l’acte II, mène à bien le difficile monologue « Être, ou ne pas être » ou s’attaque physiquement à sa mère (« Qui de nous offensa mon père, Madame ? »).

Quant à l’acte V, c’est avec l’aboutissement tant d’un chant que d’un personnage arrivé au bout de son parcours, porté par l’écriture singulière de Thomas, que John Osborn termine sa prestation de façon magnifiquement crépusculaire.

On se rappelle que Thomas opta pour une version barytonale de son Hamlet, faute d’avoir un ténor idoine sous la main. Que n’eut-il pas la chance d’avoir alors John Osborn face à lui ?

 

On attendait l’Ophélie de Sara Blanch, dont on connait déjà l’adéquation idéale avec un type de répertoire belcantiste, bellinien (avec La Sonnambula) ou rossinien (avec la Comtesse Adèle du Comte Ory). Mais Ophélie est un personnage qu’il faut savoir porter (surtout avec des devancières comme Natalie Dessay, ou dernièrement Sabine Devielhe), et notamment, lorsque la langue française n’est pas votre langue naturelle.

 

S’imposant dès le départ (il faut le dire, encore aidée là, par le metteur en scène), avec une émotion à fleur de peau, afin d’incarner une héroïne dont on sent déjà les fragilités, elle interprète son Ophélie d’une manière phénoménale, pour un parcours qu’elle ponctue de sa sensibilité, rendant à tout moment juste la crédibilité de cette jeune fille qui souffre, ne comprend pas et se résout, jusque dans les moindres nuances vocales, à sa condition et à sa perte.

Déjà extraordinaire et aérienne dans la grande scène de l’acte II (« Sa main depuis hier n’a pas touché ma main (…) Les serments ont des ailes »), prodiguant d’une projection remarquable, d’une force émotionnelle et dramaturgique, elle semble tomber dans l’hallucination à l’acte III, pour atteindre ensuite le sublime dans sa scène finale de l’acte IV, parfaitement réglée dramaturgiquement, que l’on peut qualifier, sans hésiter, d’anthologique tant les aigus ne sont plus alors que vecteurs de folie.

 

Pour cet Hamlet, nous avions déjà Osborn et Blanch, deux interprètes d’exception formant un duo à même de faire entrer ces représentations dans l’Histoire de l’opéra.

 

Mais Thomas, Barbier et Carré n’ont pas délaissé une troisième protagoniste clé qui, par sa présence, incarne le pilier affectif auquel Hamlet doit s’attaquer. Bien que shakespearien d’essence, le personnage de Gertrude, complice de l’assassinat de son mari, n’en est pas pour autant une Lady Macbeth. La faiblesse de la reine, les regrets qui la consument un instant font la force du tête-à-tête violent entre le fils et la mère, d’une confrontation qui ne peut fonctionner qu’en présence d’interprètes de la dimension requise.

Face à John Osborn, nous avions la chance d’avoir une Clémentine Margaine avec sa voix d’airain et une once de vulgarité portée par son improbable perruque rousse pyramidale. Tranchante alors que l’assurance est encore de son côté, la chanteuse encaisse ensuite les à-coups d’un mur qu’Hamlet cherche à enfoncer, nous donnant là, l’une des plus puissantes scènes de la soirée.

Si l’on rajoute à cela Julien Henric, excellent Laërte à la très belle projection, dont la voix est d’un beau contratse avec son assurance, avec celle de John Osborn, Alexander Marev et Tomislav Lavoie en Marcellus et Horatio, tous deux également excellents, Riccardo Zanellato et l’inquiétant Alastair Miles en rois frères (dont un spectre) et un chœur qui atteint la perfection dans ses interventions, on peut dire que toutes les conditions étaient réunies pour donner à ces soirées au Royaume du Danemark un parfum d’exception.

Ce faisant, l’Opéra de Turin a, à bas bruit, disons-le, écrit une page d’histoire de l’opéra français qui confirme l’excellence de cette maison (dont la saison à venir promet encore de beaux moments).

Visuels : © Daniele Ratti et Mattia Gaido