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Francfort : quand Barrie Kosky réenchante « Hercules » de Haendel, illustration de la folie à l’opéra

par Helene Adam
22.09.2024

Standing ovation amplement méritée pour la représentation époustouflante de l’oratorio de Haendel, dans une version théâtrale extrême, servie par les artistes de l’Opéra de Francfort, orchestre, chœurs et solistes en forme olympique.

Un échec pour Haendel

Pourtant Hercules, oratorio ou drame musical, composé en juillet 1744 sur un livret en anglais du révérend Thomas Broughton, connut un four retentissant dès sa première représentation en 1745. Il n’y eut d’ailleurs qu’une seule autre séance avant que l’oratorio ne soit retiré de l’affiche (et que le remboursement des billets ne soit proposé aux souscripteurs). Semele connut  le même sort en 1743.

Ces œuvres ont en commun de n’être ni vraiment des oratorios puisqu’elles ne traitent pas de sujets religieux, ni vraiment des drama per musica, opéras « italiens », les chœurs y jouant un rôle beaucoup plus central que dans les opéras italiens de l’époque. Le sujet, tiré de la mythologie grecque et traitant de la folie, se prête pourtant bien davantage à la mise en scène qu’à la version statique dite « de concert » qui était le propre des oratorios.

Ce n’est qu’en 1925 qu’Hercules est, en quelque sorte, réhabilité, et surtout présenté pour la première fois en version scénique, à Münster en Westphalie. Par la suite diverses reprises ont terminé de convaincre du caractère opératique de ce drame qui aurait pu s’appeler Déjanira tant il est évident que la femme d’Hercules qui précipitera sa chute, en est l’héroïne principale.

On soulignera d’ailleurs de ce point de vue ce qui apparait aujourd’hui comme une véritable modernité, voire une rareté, le choix de la langue anglaise qui sonne si bien dans la composition musicale de Haendel.

Avec Semele, autre tragédie grecque de Haendel, Hercules sera peu à peu considéré comme un véritable chef-d’œuvre.

Hercules, le récit d’un drame

Mais la valorisation du ressort dramatique exige une mise en scène théâtrale, ce que Barrie Kosky (qui met en scène également Les brigands d’Offenbach actuellement à l’Opéra de Paris) a parfaitement compris et magnifiquement illustré lors de la création de cette nouvelle production en janvier 2023 à l’Opéra de Francfort, reprise au Komische Oper de Berlin en mars 2024 et à présent, à nouveau, à Francfort en septembre pour la nouvelle saison.

Car il ne s’agit pas là des exploits d’Hercules, mais de sa fin tragique, conséquence de la jalousie qui rend folle sa femme Dejanira victime de la fausse prophétie du centaure Nessus. Pour s’assurer la fidélité de son héros de mari, Dejanira qui doute de lui quand il ramène la belle captive la princesse Iole, lui offre la fameuse tunique empoisonnée censée lui faire oublier toute autre femme. Hercules meurt dans d’atroces souffrances tandis que la folie saisit définitivement Dejanire. Barrie Kosky suit fidèlement cette description fascinante d’un processus autodestructeur en créant une véritable atmosphère sur scène.

 

On débute dans une ambiance apparemment banale et calme autour d’un sofa rose avec des personnages bien comme il faut où l’on devise autour de la disparition d’Hercules qui n’est pas encore revenu de la guerre. Et pourtant sa statue pensive et sombre est déjà présente dans toute cette première partie, comme l’annonce du drame qui se noue peu à peu. Les échanges sont déjà vifs et souvent ponctués par des rires, des exclamations, des frappes plus ou moins appuyées sur les murs de chaque côté de la scène qui donnent un rythme au-delà du travail du continuo dans la fosse. Après le retour d’Hercules et lors de la deuxième partie, la scène s’assombrit souvent, la pente du plateau apparait plus vertigineuse, la statue d’Hercules se dresse à présent sur fond de ciel tourmenté, tandis que le fossé à l’arrière abrite parfois le chœur dans d’impressionnants mouvements de foule qui ponctuent leurs interventions vocales, ou la fuite de divers personnages, pour finir par accueillir la chute d’Hercules.

Barrie Kosky ou le théâtre à l’opéra

Les personnages du drame ne restent jamais immobiles, mais interagissent en permanence les uns avec les autres avec force de geste ou de postures. Et l’on reste pantois devant la théâtralité atroce de la mort en direct d’Hercules se tordant de douleur au sol tout en chantant, comme de celle de Dejanira, poursuivie par les remords et les regrets. Kosky s’appuie également sur le rôle des chœurs, véritable personnage qui commente chaque scène, intervenant dans le cours de l’histoire, à la manière des tragédies grecques, auquel il donne un rôle s’apparentant quasiment au ballet sur scène. Ils et elles chantent et passent d’un bout à l’autre de la scène dans un mouvement élégant où ils, elles semblent littéralement glisser, se rassemblant, se séparant, entourant les protagonistes de gestes protecteurs ou menaçant selon les situations.

Cet incessant mouvement créée une dynamique qui valorise et donne du sens aux brillants arias, précédés de récitatifs, dont sont dotés les solistes comme le chœur et illustre en continu les parties orchestrales sans qu’à aucun moment l’ennui devant les longues reprises (da capo) chères à Haendel, ne s’installe, bien au contraire. Chacun a alors à cœur de ne jamais donner le même sens à chacune de ces répétitions rendant vivant le style musical étourdissant de l’époque.

Francfort, une belle maison et des chœurs d’excellence

La distribution sert l’œuvre et le parti pris du metteur en scène. Y compris le chœur de l’Opéra de Francfort qui est parmi les meilleurs entendu dans ce répertoire. Loin de se contenter d’être la chorale statique attendue dans un oratorio, ils jouent littéralement leur personnage à part entière, ne restant jamais immobiles et adoptant des postures en lien direct avec ce qu’ils chantent. Et l’on ne sait que souligner d’abord dans leur extraordinaire performance de la soirée : leurs commentaires ou recommandations de l’acte 1 tels que « O  filial piety, O gen’rous love! » ou « Let none despair », leurs saluts emphatiques « Crown with festal pomp the day », leur exaltation des beaux sentiments « Wanton god of am’rous fires » ou « Love and Hymen, hand in hand » et leurs menaces impressionnantes qui font frissonner toute la salle  « Jealousy! Infernal pest ».

Au chœur revient aussi le dernier chant, véritable hymne à la liberté (« To him your grateful notes ») qui est chanté depuis la salle de part et d’autre des premiers rangs des spectateurs, le chef d’orchestre se tournant alors vers eux (et vers nous) dans une grande communion finale sur ces mots d’espoir « the theme of liberty’s immortal song ».

 

Les solistes, appartenant pour la plupart à l’ensemble (la troupe) de l’Opéra de Francfort ont tous une solide formation au bel canto et au répertoire baroque, prosodiant admirablement l’anglais de l’époque, et respectant rythme et variation des airs virtuoses qui leur sont réservés avec l’ensemble des reprises (da capo) qui créent ce genre si particulier de l’opéra de l’époque de Haendel. Pas un trille, pas une vocalise, pas une ornementation ne manque à leur chant et malgré la difficulté technique évidente, ils parviennent tous à incarner physiquement leurs personnages dans l’ensemble des postures exigeantes proposées par Barrie Kosky.

Une distribution idéale

Saluons d’abord la reine Dejanira que chante la soprano Paula Murrihy lors d’une époustouflante prestation ovationnée, qui livre une scène de la folie d’anthologie avec son extraordinaire « Where shall I fly? Where hide this guilty head? O fatal error of misguided love » lors du dernier acte, sommet de la tension dramatique créée par le texte comme par la musique où se succèdent des changements de tempo et de style reflétant la panique du personnage. Mais tout au long du drame, elle incarne une Dejanira, tout à la fois passionnée et terrorisée par l’idée de perdre son amour, obsédée par la trahison, qui finit d’ailleurs par douter de tout le monde, son fils, sa confidente, la princesse, alors qu’aucun ne lui veut le moindre mal.

 

Le grand Hercules de la basse autrichienne Anthony Robin Schneider, est également particulièrement bien choisi : il a la stature immense et imposante du rôle, une voix aux graves impressionnants qui sait ornementer son chant, une présence scénique envahissante qui correspond au personnage, à sa puissance, à ses colères, à ses passions. Et il réussit l’exploit impressionnant de nous livrer une agonie terriblement réaliste sans perdre une seule seconde la beauté de ses moyens vocaux alors qu’il se tord de douleur au sol, le corps brûlé par le poison dont est imbibée la tunique de Nessus.

 

Les jeunes gens, les seuls véritablement amoureux l’un de l’autre, ont la fraîcheur et la beauté de l’innocence, incarnés par la délicieuse soprano Giulia Semenzato (Iole) à la voix fruitée et délicate, mais qui sait se montrer fière et opiniâtre quand elle défend la mémoire de son père et Michael Porter (Hyllus), ténor à la voix forte et bien projetée qui chante le fils d’Hercules avec beaucoup de talent et de crédibilité.

La distribution est très bien complétée par la Lichas de la mezzo-soprano Kelsey Lauritano et par le Prêtre de Jupiter du baryton Sakhiwe Mkosana, nouveau venu à l’Opern Studio de Francfort, tous deux dotés de très beaux timbres lumineux, clairs et puissants, et d’une remarquable présence scénique.

L’orchestre de l’opéra de Francfort en formation baroque est dirigé par le chef d’orchestre britannique Laurence Cummings, claveciniste et spécialiste du répertoire baroque et de la musique de Haendel, une véritable référence de qualité pour une telle soirée. L’œuvre comprend quatre morceaux purement orchestraux en plus de l’accompagnement des récitatifs (continuo) et des arias (orchestre au grand complet). Il s’agit d’abord d’une « ouverture à la française », forme musicale établie par Lully comme introduction aux œuvres lyriques tragiques et que Haendel utilise systématiquement, suivie immédiatement d’un menuet assez joyeux en contraste. Une marche de caractère martial, au milieu du premier acte, annonce l’arrivée du héros et son retour victorieux de la guerre et enfin, une très belle sinfonia (ou ouverture instrumentale d’opéra), au cours du dernier acte, précède la mort du héros. Cummings et la formation de Francfort interprètent magistralement le caractère tragique et tourmenté de cette dernière, nous conduisant sur les sommets du drame en enchainant les mesures largo et furioso qui soulignent l’abattement du héros succédant à sa fureur. Cette faculté de créer l’ambiance musicale avant l’aria est particulièrement bien rendue par l’art du maestro.

Et l’on ne peut que se réjouir de cette très belle reprise qui met l’art de Haendel à la portée de tous !

Opéra de Francfort, Hercules (Haendel) du 8 septembre au 10 octobre 2024, reprise de la production de Barrie Kosky (2023).

Réservations

 

Visuels : crédit © Barbara Aumüller