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Clémentine Margaine : « Carmen m’a ouvert les portes des grands théâtres ! »

par Marta Huertas de Gebelin
05.04.2024

Considérée comme l’une des principales chanteuses de sa génération, la mezzo narbonnaise Clémentine Margaine est une invitée incontournable des plus prestigieuses scènes lyriques internationales. Son rôle fétiche est celui de la bohémienne Carmen, mais d’autres lui tiennent à cœur. D’une nature franche et enjouée, elle nous en a parlé, ce jeudi 7 mars, depuis son domicile à Paris où elle profite d’une courte halte avant de reprendre ses activités à New York et en Italie, en passant par la Bulgarie et par l’Espagne.

Bonjour Mme Margaine. Je suis ravie de m’entretenir, en ligne, avec vous à propos de votre belle carrière. Commençons tout simplement par le commencement. Parlons de vos études de chant lyrique. Avez-vous entrepris ces études au Conservatoire de Montpellier ou à celui de Perpignan ?

Ni dans l’un ni dans l’autre ! (rires). Je me suis initiée à la musique par le piano que j’ai étudié à Perpignan et ensuite à Montpellier. Le chant lyrique, je l’ai abordé à Paris avec Anne-Marie Blanzat. Il est essentiel de débuter dans l’apprentissage de la technique vocale avec un professeur de qualité. Je savais que Mme Blanzat était une femme très sensée et qu’elle était pleine d’enthousiasme. Cette femme a été très importante pour moi.

Mais à l’époque vous étudiiez aussi le droit. Qu’est-ce qui vous a poussé à quitter la Fac et à vous réorienter vers le chant lyrique ?

Je faisais des études de droit, à Montpellier. En parallèle, toutes les semaines, j’allais à Paris pour mon cours de chant avec Mme Blanzat. Au bout d’un an, j’ai voulu approfondir le travail avec elle et, comme le voyage hebdomadaire était trop fatigant, j’ai déménagé à Paris où j’ai continué à étudier le droit.

En même temps, Anne-Marie voulait me préparer pour que j’entre au Conservatoire de Paris. Au début, je n’y croyais pas du tout, mais je lui ai fait confiance. Mais quand j’y suis entrée, les agendas de la Fac de Droit et du Conservatoire n’étaient pas compatibles ! J’ai donc fait mon choix. Être au Conservatoire de Paris me permettait d’espérer que je pourrais faire du chant, mon métier. Et j’ai quitté la Fac.

Vous avez failli rater votre entrée au Conservatoire de Paris parce que vous étiez malade. Pouvez-vous nous raconter comment cela s’est passé ?

Oh oui ! J’avais une pharyngite foudroyante ! Une catastrophe ! Comme je ne voulais plus être juge ni avocate et que je souhaitais me consacrer au chant lyrique, je sentais que je jouais ma vie sur ce concours. La veille, à l’Hôpital américain, l’ORL m’avait assuré qu’il me serait impossible de chanter à l’examen d’admission. C’était la fin du monde pour moi ! En pleurs, j’ai pris le bus pour aller chez Anne-Marie et, en route, j’ai été témoin du braquage d’une bijouterie par des gens en cagoule avec des bâtons. Cet évènement m’a permis de relativiser mon problème.

 

Arrivée chez mon professeur, elle m’a convaincue de me présenter quand même à l’examen. Là aussi, elle m’a beaucoup aidée ! Car le concours du Conservatoire de Paris, on ne peut le passer qu’un nombre limité de fois (ndlr : trois fois). Mais si on peut justifier que l’on est malade, cela ne compte pas comme un échec. Donc, j’y suis allée. J’ai présenté mon programme au jury, mais je n’avais plus du tout de voix parlée ! Comme, visiblement, je ne pouvais pas chanter, ils m’ont dispensé du premier tour (le concours se faisait en deux temps). Le deuxième tour ayant lieu dix ou quinze jours plus tard, j’ai pu récupérer et j’ai réussi. Cette histoire m’a fait comprendre à quel point chanter était devenu important dans ma vie, et que j’étais prête à surmonter toutes les difficultés pour y arriver.

Comment cela s’est-il passé au Conservatoire ?

À l’époque, je n’étais pas encore tombée amoureuse de l’opéra. Mon livre de chevet c’était les quatre volumes des lieder de Brahms que je portais toujours dans mon sac. J’adorais le répertoire de récital : le lied, la mélodie. Avec mon professeur, Gerda Hartman, je travaillais ce répertoire et Mozart. On me faisait chanter Cherubino (des Nozze di Figaro) alors que je n’avais pas les caractéristiques vocales pour le faire. Je me sentais comme un éléphant dans un magasin de porcelaine ! (rire)

Je sentais qu’il me fallait trouver mon ambitus, ma vraie voix, le soutien nécessaire pour nourrir cette voix qui était celle d’une mezzo normale. J’avais presque développé un complexe par rapport à ma voix que l’on disait trop grande !

Pourtant vous y avez obtenu votre Diplôme avec « mention Très Bien ». Qu’avez-vous fait après ?

J’ai commencé à travailler en France. Des petits rôles dans des Opéras de province. En fait, j’avais déjà intégré différentes productions quand j’étais encore au Conservatoire de Paris. Cela m’a permis d’entrer en contact avec le milieu, de connaître des collègues chanteurs qui m’ont un peu guidée dans le choix d’un répertoire plus adapté à ma voix, et de comprendre qu’il me fallait relativiser ce qui m’avait été enseigné au Conservatoire. Je me suis aussi présentée au Concours Reine Élisabeth où j’ai gagné un prix.

 

J’ai même eu mon premier agent ! Un jour, il m’a proposé d’auditionner à Strasbourg pour le rôle de Mercédès dans Carmen. Mais moi, je voulais chanter le rôle-titre que j’avais déjà interprété dans des versions raccourcies ou des productions pour étudiants. Je sentais que je pouvais le faire ! Il a insisté disant qu’il fallait que je fasse d’abord mes preuves. J’étais très déçue ! Et je ne suis pas allée à l’audition. Je trouvais qu’un agent devait avoir confiance en son artiste et avoir de l’ambition pour elle ! J’ai surtout compris que, pour moi, en France, cela allait prendre du temps…

 

Peu après, j’ai été engagée à Magdebourg (Allemagne), dans un opéra de Telemann (ndlr : Orpheus). Nous étions au milieu de l’hiver, il faisait très froid et la ville n’est pas belle du tout. J’avais quelques jours de libre et tout ce que je voulais c’était un prétexte pour m’en aller quelques jours. J’ai donc demandé à mon agent de me trouver une audition. C’est ainsi que j’ai auditionné au Deutsche Oper de Berlin. Sur-le-champ, le Directeur m’a proposé d’intégrer la troupe du théâtre. Je n’avais pas du tout envisagé cette possibilité ! J’ai accepté de signer un contrat pour deux ans parce qu’il m’a offert des petits rôles mais aussi Maddalena de Rigoletto, une version scénique du Requiem de Verdi et, surtout, le rôle-titre de Carmen… alors qu’à l’époque c’était Elina Garanca qui chantait ce rôle au Deutsche Oper.

Quelques mois plus tard, je suis allée m’installer à Berlin. Juste avant de partir, j’avais été élue « Révélation lyrique » aux Victoires de la Musique classique. Et du coup, j’ai eu d’autres propositions que j’ai dû décliner, car j’avais déjà signé avec Berlin.

L’expérience berlinoise a-t-elle été importante pour vous ?

J’y ai passé deux ans magiques. C’est là que je suis rentrée dans le monde de l’opéra. J’allais écouter toutes les répétitions (comme c’est un théâtre de répertoire tous les soirs il y avait un spectacle diffèrent). J’ai eu aussi l’occasion de chanter à côté de chanteurs qui sont des géants wagnériens. J’allais au Staatsoper (qui à l’époque était juste en face du Deutsche Oper) et, parfois, j’écoutais un acte d’un opéra dans un théâtre puis je traversais pour aller écouter un autre opéra en face (rires).

À la Philharmonie de Berlin, j’ai vu les derniers concerts dirigés par Abbado. Une immersion totale dans la musique !

En plus, le Deutsche Oper m’a donné l’opportunité de chanter mes premiers grands rôles : Dalila, Marguerite de La damnation de Faust et plusieurs fois Carmen. Il m’a fait connaître au point que je n’ai plus jamais eu besoin de passer d’auditions.

Je me souviens qu’un soir, pour une représentation lambda de Carmen, étaient présents en salle les Directeurs du MET et des Opéras de Washington et de Dallas qui étaient venus voir une première au Staatsoper. Par la suite, j’ai eu quatre contrats pour les États-Unis.

Bien évidemment, je suis revenue plusieurs fois au Deutsche Oper comme invitée. Il n’y a pas longtemps, j’y ai fait Hérodiade en version de concert (ndlr : en juin 2023).

Vous avez cité en passant le concours Reine Elizabeth. Trouvez-vous que les concours de chant soient utiles et nécessaires pour les jeunes chanteurs ?

Il y a beaucoup de jeunes chanteurs qui me posent cette question. Je pense que c’est utile, mais pas indispensable. Il y a d’autres moyens d’y arriver. C’est vrai que, notamment pour les sopranos où il y a une grande concurrence, gagner un concours  accélère les choses. Des concours comme Operalia, Les Voix Nouvelles, le Viñas, Cardiff valent vraiment la peine. Moi, j’en ai fait un, le Concours Reine Elizabeth qui, au contraire d’Operalia, dure un mois parce que c’est un concours d’opéra, lied et oratorio. On a eu quatre tours. C’était trop long !

Revenons au présent, ou plutôt au futur proche. Bientôt vous retournerez au MET pour y incarner encore une fois Carmen. Qui est-elle pour vous ?

C’est un personnage très complexe, sulfureux, très libre. Ma Carmen actuelle n’a rien à voir avec celle que j’ai chantée pour la première fois au Deutsche Oper, ni même avec celle du MET avec Roberto (Alagna). C’est un rôle qui a évolué avec moi. Maintenant, je suis une femme, je suis maman. Il y a beaucoup de choses qui ont changé dans ma vie et dans mon approche au corps, à la sensualité.

Carmen est un personnage indomptable et passionnant à jouer, parce qu’elle est plurielle, elle prend toujours le contre-pied, c’est quelqu’un qui a aussi de l’humour, qui vit pleinement sa vie, son corps. C’est une épicurienne, qui se donne tout entière, mais qui ne cèdera jamais sur sa liberté. Pour moi, l’aspect le plus important dans Carmen c’est son amour pour la liberté, ce qui, d’ailleurs, va la mener vers la mort.

Savez-vous combien de productions de Carmen vous avez chantées ?

Non ! Je ne les ai pas comptées. Mais beaucoup ! C’est le rôle qui m’a ouvert les portes des grands théâtres en Europe et aux États-Unis.

En ce moment, Carmen est encore présente dans mon agenda – quoiqu’un peu moins – mais, surtout, elle cohabite avec Eboli, Azucena, Amneris et d’autres personnages qui sont très dissemblables, d’une vocalité très différente. Je pense que les prochaines seront mes dernières productions de Carmen avant de la quitter ou de la retrouver de façon plus sporadique.

Parmi les grands rôles de mezzo que vous avez abordés ces dernières années il y a la Princesse de Bouillon dans Adriana Lecouvreur que vous venez de camper à l’Opéra Bastille et que vous allez retrouver au Liceu de Barcelone.

Oui, je vais chanter le rôle au mois de juin avec Roberto (Alagna). Il s’agit de la même production de David McVicar qu’à Paris. C‘est un rôle absolument magnifique !

Outre ce beau rôle, ces dernières années j’ai abordé tout un nouveau répertoire. J’ai débuté Eboli, Amneris et Azucena quasiment la même année. Ce fut vraiment comme un début de carrière parce que, en changeant de répertoire, il faut que notre corps s’y habitue. Sauf que, quand on est connus, on n’a pas le bénéfice de l’anonymat et on ne peut plus se dire que, si on se trompe, cela n’aura pas de conséquences !

 

En plus, pour Don Carlo – que j’ai chanté en français et en italien -, j’ai fait mes débuts dans une production de répertoire (ndlr : au Bayerische Staatsoper), ce qui veut dire que nous n’avons eu qu’une répétition avec orchestre et pas de répétition sur scène. Pour un rôle comme Eboli, si difficile, si technique ! À Munich, j’étais donc très stressée. Juste après, je l’ai rechanté à Chicago, dans une nouvelle production. Nous avons eu là six semaines de répétitions. Je sais que mon Eboli à Munich s’est bien passée, mais j’ai senti une vraie progression à Chicago !

Vous avez cité plusieurs fois Roberto Alagna.  Est-il plus facile de travailler avec des artistes avec lesquels vous avez déjà chanté ?

(elle réfléchit). Je ne sais pas… Peut-être dans la confiance qu’on se porte sur scène… Mais c’est dans ma nature de faire confiance à mes collègues, que je les connaisse d’avance ou pas. Ce qui est sympathique avec des amis, c’est le côté convivial, comme par exemple, aller manger ensemble après le spectacle.

Il est vrai qu’aujourd’hui il est assez rare pour moi d’aller dans une production où je ne connais pas les chanteurs. Dans le répertoire que je chante à présent, nous ne sommes pas très, très nombreux. Certains de ces collègues sont des amis. C’est, par exemple, le cas d’Anna Pirozzi, une soprano italienne que j’ai connue dans Adriana Lecouvreur, après l’avoir chanté avec Anna Netrebko. Pirozzi connaît mon fils et nous sommes devenues très amies. J’aime bien travailler avec elle. Mais je pense que cela ne change pas grand-chose sur la performance. Par ailleurs, quand je chante avec des amis, j’ai souvent peur pour eux et cela peut me stresser tant je suis attentive à ce qu’ils font!

Vous êtes aussi prévue dans Giulietta des Contes d’Hoffmann au MET au mois de septembre. Ce sera pour vous une prise de rôle. Comment vous préparez-vous pour un nouveau rôle ?     

Comme je suis pianiste, j’ai toujours travaillé mes rôles toute seule. Je ne sais pas vraiment si c’est une chance ou pas… Des fois, j’ai fait appel à des coaches et j’ai apprécié. Mais, pour moi, la première approche d’un rôle est un moment très intime et je préfère être seule au piano. Avec un pianiste, c’est presque impudique pour moi. Je me dis que, si je vais travailler avec quelqu’un, il faut que je me prépare avant ! J’ai tout de même un prof de chant, mais je ne le vois que quand j’ai le temps, quand je suis à Paris.

Pour un nouveau rôle, je suis aussi très avide des enregistrements, des vidéos où on peut écouter comment les collègues du passé ont abordé les difficultés. En parallèle, je communique souvent avec d’autres chanteurs sur des questions techniques. On se coache l’un l’autre entre collègues et amis.

Vous avez un répertoire français très riche : Carmen, Charlotte dans Werther, Fidès dans Le prophète de Meyerbeer, Dulcinée de Don Quichotte de Massenet, Marguerite dans La damnation de Faust, Gertrude dans Hamlet et j’en passe. Est-ce un choix personnel ou des propositions que vous font les théâtres parce que vous êtes française ?

Je pense qu’il y a un peu des deux. J’ai la chance que mon type de voix et ma sensibilité me rapprochent de ce répertoire. Même quand je n’avais pas encore la technique pour les chanter, la vocalité de ces rôles correspondait tout à fait à ma voix. Une écriture qui privilégie autant l’aigu que les graves, cela a toujours matché avec moi. J’ai aussi chanté Samson et Dalila et Hérodiade de Massenet.

Il me semble que vous n’avez pas beaucoup chanté Dalila…

Je l’ai fait à Berlin et je devais le chanter au MET, mais il y a eu le Covid et la production a été annulée. C’est un rôle que j’aimerais chanter davantage. Je trouve qu’il est absolument magnifique. Évidemment, Samson et Dalila est un opéra difficile à mettre en scène et il n’est pas évident de trouver un Samson. Il n’est donc pas très souvent joué.

Quel rôle préférez-vous à ce moment de votre carrière ?

Mmmm… C’est difficile… Des rôles que j’ai chantés récemment, j’ai bien aimé la Princesse de Bouillon, même si c’est moins « challenge » et assez court. Je vais l’interpréter à nouveau plusieurs fois dans les prochaines années.

Dans Verdi, Azucena est un rôle que j’ai adoré. Par rapport à Amneris, je trouve qu’Azucena est beaucoup plus complexe, ambigüe, et il y a la berceuse, à la fin, qui est absolument magique. J’ai chanté récemment le rôle au Festival Verdi à Parme et je vais le reprendre l’année prochaine à Vienne et à Londres. Je vais aussi faire mes débuts à Covent Garden dans Il Trovatore. J’ai l’impression qu’Azucena est un rôle qui va me suivre longtemps.

Gardez-vous dans votre mémoire une performance qui vous soit spécialement chère ou qui ait fait la différence dans votre carrière ? 

(elle réfléchit) Peut-être une représentation de l’opéra Le prophète de Meyerbeer à Berlin où je chantais le rôle de Fidès. J’étais tombée malade et, avant la première représentation, je pensais que je n’allais jamais y arriver parce que c’est un rôle qui a toute sorte de difficultés : c’est long, c’est aigu, c’est grave, il y a des coloratures. J’avais très peur. Gregory Kunde était mon fils le prophète (ndlr : nous sourions toutes les deux car le célèbre ténor américain est de trente ans son aîné) et j’ai beaucoup appris de lui en voyant comment il gérait la longueur et la complexité de son rôle. Et puis, surtout, il m’a expliqué que, vu les difficultés du mien, à un moment donné je serais forcément fatiguée, mais que ce n’était pas grave, qu’il ne fallait pas paniquer, juste laisser venir, comme font les chanteurs wagnériens. Il m’a appris qu’il faut faire confiance à son corps car, même en chantant, on peut récupérer. Et c’est ce qui s’est passé pour moi avec Fidès. Je me souviens de la dernière représentation de la série. J’ai chanté à pleine voix, avec une facilité inhabituelle. Ce fut un moment de grâce où je n’ai pas eu un seul instant de fatigue de toute la soirée.

C’est arrivé tout juste avant mes débuts dans Eboli et les autres rôles dont je vous ai parlé et cela m’a ouvert une nouvelle perspective et une nouvelle confiance en moi. Je me suis sentie prête pour aborder ce nouveau répertoire. Fidès (qui appartient tout de même au bel canto mais avec des aspects véristes) et tout particulièrement cette représentation-là, ont été des pivots dans ma carrière.

Dans votre métier, qu’est-ce que vous aimez et qu’est-ce que vous aimez moins ? 

(elle réfléchit) Qu’est-ce que j’aime ? J’aime chanter !! (petit rire) Surtout avec un orchestre. J’aime être sur scène, chanter avec des collègues, communiquer avec un chef. J’aime le processus de créer de la musique ensemble. J’aime découvrir des compositeurs, leurs univers.

J’aime aussi la mise en danger, le courage que cela demande à certains moments. J’aime me dépasser. En plus, au théâtre, on apprend sur soi, on apprend sur les autres.

Et j’aime énormément voyager.

Tiens ! Ce n’est pas courant d’entendre cela de la part des chanteurs.

Il est vrai que, pour moi, les voyages, ce n’est plus comme autrefois. Parce que, maintenant, je suis maman. J’ai un garçon de 4 ans et c’est toute une organisation parce qu’il voyage avec moi. Quand il ira à l’école et qu’il devra rester à Paris, ce sera encore plus compliqué. J’ai déjà dû le laisser une fois, quand j’ai remplacé une collègue dans une production où j’ai été appelée au dernier moment.

Mais j’ai toujours aimé voyager, découvrir les villes où je vais chanter. Ce qui est possible  quand on y reste longtemps pour une production. On a le temps de vivre dans cette ville, de l’explorer en long et en large. Je vais bientôt rester quasiment deux mois à New York. Il est vrai que, le plus souvent, je retourne dans des villes où je me suis déjà produite et j’ai un autre plaisir, celui de retrouver des anciennes habitudes, comme une amie qu’on a quittée et qu’on retrouve.

D’autre part, il est fatigant de voyager souvent, de ne pas être dans son confort. Mais le Covid m’a appris que je ne peux pas rester à la maison tout le temps !

Et les inconvénients du métier ?

Ce que j’aime moins dans le métier (elle réfléchit) c’est que c’est, parfois, une industrie cruelle. Quand tout va bien, tout le monde vous entoure, mais autrement…

Pour nous, les chanteuses, il n’y a pas beaucoup de compréhension pour les soucis que nous pouvons avoir lorsque l’on tombe enceinte. On se demande si on va retrouver sa voix, comment on va rechanter. Il n’est pas simple de mener de front les engagements professionnels et une vie de famille ! C’est un métier où on est toujours très entourés, mais où on est aussi, paradoxalement, dans une certaine solitude.

D’autre part, il y a une précarité du métier. Tout peut s’arrêter à n’importe quel moment. En grande partie, c’est le Covid qui a implanté cette précarité. Je ne me plains pas, j’ai pu vivre confortablement pendant la pandémie. Pour moi, le travail s’est arrêté pendant un moment et puis cela a repris. Mais je connais des collègues très talentueux qui n’ont pas repris, ou très peu.

Qu’est-ce que vous faites quand vous n’êtes pas en train de répéter ni de chanter ? Vous vous occupez de votre enfant, bien entendu. Mais, à part ça, avez-vous des hobbys, d’autres intérêts ? 

Maintenant que je suis à Paris, j’ai repris mon activité sportive. Et puis, j’ai la chance de vivre dans une ville magnifique, absolument fantastique du point de vue culturel. Ces derniers temps, je suis allée voir de très belles expositions : Rothko à la Fondation Louis Vuitton, Van Gogh au Musée d’Orsay, Modigliani. Ce soir, je vais voir Beatrice di Tenda à l’Opéra Bastille.

Mais, je profite surtout de retrouver ma famille et mes amis, parce qu’après New York (ndlr : pour Carmen au MET), j’enchaîne un concert en Bulgarie, puis Adriana Lecouvreur à Barcelone, ensuite Vérone et enfin Les Contes d’Hoffmann à la fin de l’été au MET. Je ne reviendrai pas à Paris avant octobre-novembre.

Quand je suis à Paris, j’aspire à mener la vie d’une femme normale. J’adore faire le marché. En plus, il commence à faire beau, on sent déjà le printemps qui arrive, les terrasses de café qui commencent à se peupler. Parfois, je vis à Paris comme une touriste. Je prends le vélo et je m’en vais sur les bords de la Seine ou me balader dans la ville.

Sinon, je m’occupe de mon petit garçon, je cuisine…

Aimez-vous faire la cuisine ?

Oui, oui. Je ne suis pas un grand chef, mais je m’améliore ! (rire)

Quels sont vos bons petits plats ?

Ce n’est pas de la grande cuisine ! Je fais de bonnes tartes salées, aux poireaux, au butternut-feta-champignons. Mon risotto est aussi très bon.

Vous pourriez demander sa recette à Ambrogio Maestri. Il en a fait un en coulisses au MET !

Ah ! Ce n’est pas mal ! (rire) Je la lui demanderai quand je le retrouverai à Barcelone pour Adriana Lecouvreur (rire).

Merci de m’avoir accordé cette belle interview.

Merci beaucoup et bonne journée à vous.

 

 

Visuels : Portrait © Dario Acosta, Don-Carlos /Lyric Opera Chicago ©Todd Rosenberg, La Gioconda 2022 ©Philippe Gromelle, Le prophète / Deutsche Oper Berlin © Bettiana Ströß.