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Alexandre Duhamel & Friends à la Sainte-Chapelle : « Ecco il leone ! »

par Philippe Manoli
10.04.2024

Pour la seconde année, Fabienne Conrad et Euromusic productions permettent au joyau gothique de l’Ile de la Cité de résonner au son de musiques tant religieuses que profanes au cours du Sainte Chapelle Opera Festival. Le programme de cette année est particulièrement attrayant, avec rien moins que la présence d’Hervé Niquet, Jeanine de Bique, Marina Viotti, Michael Spyres, Julie Fuchs et  Alexandre Duhamel, pour treize concerts en cinq week-ends. Nous avons assisté le 6 avril au récital « Alexandre Duhamel & Friends » qui réunissait, autour du baryton français, la soprano Fabienne Conrad et le ténor Valentin Thill, accompagnés au piano par Dorothée Bocquet, dans un programme très français et cohérent où Puccini venait apporter une touche exotique et religieuse (avec le « Te Deum » de Tosca) au milieu d’airs, de duos et trios de Bizet, Massenet et Gounod.

Peut-on y voir un présage ? À deux jours de distance, un vieux lion à la crinière blanche faisait peut-être sa dernière apparition parisienne, dans un opéra en version de version de concert à l’ambiance crépusculaire (Domingo salle Gaveau), et à quelques centaines de mètres de là, un jeune lion faisait étalage d’une précoce maturité impressionnante. À quarante ans, Alexandre Duhamel semble être au sommet de ses moyens et, après avoir privilégié les répertoires français et italien, commence à se tourner vers le répertoire wagnérien, d’Alberich à Kurwenal et bientôt au Hollandais volant, bénéficiant au passage d’un accroissement de la richesse de son registre grave. Nous ne pouvons nous empêcher de faire le lien avec Titta Ruffo, qu’on surnommait en Italie, au siècle dernier, « la voce del leone ».  C’est ce qui a peut-être mis la puce à l’oreille de Fabienne Conrad, directrice artistique du Sainte Chapelle Opera Festival, qui l’a convié à se produire cette année au milieu des sublimes vitraux d’un lieu unique au monde. Si celui-ci n’est pas sans contraintes (fouille drastique des spectateurs à l’entrée, à cause de sa situation dans le Palais de Justice de Paris, et horaires contraints, qui nécessitent l’élimination du dernier des bis prévus), il bénéficie, outre sa majesté intrinsèque, d’une très bonne acoustique sans réverbération, ce qui est rarissime dans un lieu de culte.

 

Pour étoffer le programme, la soprano a invité le ténor Valentin Thill et se produit elle-même pour former avec le baryton et le ténor des duos et trios, accompagnés au piano par Dorothée Bocquet. Vêtue d’une robe de soirée en soie écrue plissée, elle fait aussi office de maîtresse de cérémonie, présentant avec pertinence les extraits d’œuvres, non sans humour (la scène de Saint-Sulpice de Manon est qualifiée de « la plus belle scène de « récupération » après rupture »), et maniant parfaitement l’anglais en clin d’œil à Shakespeare pour introduire le duo de Roméo et Juliette de Gounod.

 

Priez pour nous, pauvres Pêcheurs

 

La première partie du récital, très cohérente, est centrée sur Les Pêcheurs de perles de Bizet, ouvrage qui semble aujourd’hui retrouver la faveur des programmateurs.

C’est Valentin Thill qui ouvre le récital, non sans un certain trac apparent. La romance de Nadir lui permet de faire étalage d’un instrument très timbré dans le grave dès le récitatif (« fol espoir »), la « fièvre » du chasseur de fauves semblant habiter l’interprète. L’usage de la voix mixte appuyée dès les premiers mots de l’air (« Je crois entendre encore ») n’évite pas la présence d’un certain vibrato (« Divin ravissement »), sur lequel le ténor pose un diminuendo pertinent (« folle ivresse »). Mais le péché mignon de l’artiste semble être une certaine volonté de démonstration, qui se traduit par un usage excessif des dynamiques hautes, bien inutiles dans « Aux clartés des étoiles », le grave du « vent tiède du soir » se voyant lui aussi trop appuyé, jusqu’à un « charmant souvenir » où le falsetto ne permet pas réellement d’accéder à l’apesanteur que l’aria réclamait.

 

Suit le duo Nadir/Zurga, « Au fond du temple saint », où le ténor arbore encore un instrument large au métal apparent (« de fleurs et d’or », « une femme apparaît »), tandis que le baryton nimbe son timbre d’une douce lumière (« nous cache son visage ») et entoure le ténor d’un halo protecteur (« C’est elle, c’est la déesse ») qui finit par presque étouffer son faux frère pêcheur (« jusqu’à la mort »).

 

Dorothée Bocquet introduit ensuite l’air du troisième acte de Zurga avec les graves de son Steinway qu’elle fait sonner parfaitement timbrés et larges, et Alexandre Duhamel débute l’air avec une délicatesse de Liedersänger (le triple piano diaphane de « L’orage s’est calmé » en mezza voce, est saisissant). Suit une leçon de diction expressive, avec un « déjà » légèrement palatalisé, le grave de « colères » se colorant d’une ambre profonde et chatoyante. La nostalgie affleure dans « Ô Nadir, tendre ami », elle se nimbe de colère dans « par quelle aveugle et folle rage », puis se fait languide dans « mon cœur s’était-il déchiré ». La puissance tellurique (« et le coupable ») alterne avec une retenue éperdue (« Ah, qu’ai-je fait ? »), dessinant un portrait complexe et dramatiquement très abouti (le baryton a chanté Zurga dans cinq productions déjà, dont la dernière, à Toulouse en octobre 2023, a montré de sa part un véritable accomplissement dans le rôle). Ainsi, il peut passer d’un « Ah » fulminant à « un cœur irrité » tout en délicatesse, dans un legato parfait, jusqu’à un dernier « Ah, pardonnez » éthéré, retardé plusieurs secondes, et dont la résonance semble portée encore dans les notes du piano après son extinction, rendant l’émotion quasiment palpable dans l’atmosphère.

 

Dans la continuité de l’œuvre de Bizet, arrive le dramatique duo entre Leïla et Zurga. Les artistes ont préparé leur mise en espace et le chant est précédé de placements et de regards qui forment un cadre dramatique pour le chant. Le baryton et la soprano se trouvent très accordés en termes de longueur de souffle dès les premières phrases (« De son âme cruelle que vais-je obtenir?/ Oui, c’est Dieu qui la conduit ici Pour me punir! »). Malgré un grave peu sonore et un bas médium qui peine à se projeter, limitant l’impact de la réponse de la prêtresse au chef des pêcheurs, Fabienne Conrad pare « Épargne un innocent » d’une lumière suppliante dans le timbre, comme dans « Par ma voix qui supplie », et après des « Approche » au grave lourd de menaces subtiles, Alexandre Duhamel sculpte un « Pour t’aider à mourir » extrêmement délicat, tout de rage étonnée et rentrée, absolument fascinant. La fureur des « Tu l’aimes » laisse éclater une colère noire, accentuée par les assises rythmiques fortement charpentées de Dorothée Bocquet, et après un « Ah » explosif, que suit un « Je t’aimais » furibond, plein de reproches et de dépit, à la projection sensationnelle, la scène se finit dans un climax étourdissant, où « Venge-toi donc » offre une réponse cinglante de Leïla, avant un aigu final conjoint du plus bel effet. La partie dédiée à Bizet se conclut ainsi par un réel sommet dramatique.

Parting is such sweet sorrow

 

Introduit par Dorothée Bocquet avec de délicates couleurs pianistiques, le duo de Roméo et Juliette de Gounod prend corps grâce aux jeux de regards travaillés des protagonistes sur une entrée lente très bien dosée qui les mène à s’enlacer. La largeur de timbre du ténor normand se pare d’une lumière bienvenue, le legato et l’émission ici contrôlée (« le ciel rayonne en moi »), accordé à la lumière du timbre de la soprano. « Toujours à toi » est même conclu par un vrai baiser de cinéma ! Si Fabienne Conrad reste délicate (« Il faut partir »), Valentin Thill ensuite montre à nouveau trop de muscles dans « cette ardente ivresse » à l’aigu tendu jusqu’au fortissimo échevelé de « toujours à toi ». Les jeux de regards bienvenus reprennent pour une fuite en deux temps, la soprano manquant un peu de legato pour les phrases finales (« adieu ma vie, Anges du ciel à vous je le confie ») tandis que le piano de Dorothée Bocquet contient toutes les couleurs d’un orchestre pour un decrescendo touchant.

Angel dust

 

Vient l’heure de la « minute mystique » intégrée à chaque concert. C’est l’air d’Athanaël, de la Thaïs de Massenet, qu’Alexandre Duhamel entame dans un savant dosage de force et de douceur (« Voilà donc la terrible cité »). Il réussit à intégrer à sa diction une lumière qui rend même palpable « l’air brillant », et pare son grave d’un drapé superbe pour exprimer « la luxure ». L’alternance de l’éclat tonnant (« aux yeux d’or ») et du diminuendo sur « ma partie », long et  savamment dosé, permet la construction d’un personnage ambivalent de grande envergure, la rage et le dépit se mêlant ensuite dans « De ton amour, j’ai détourné mon cœur », jusqu’à des « Je te hais » puissamment catapultés. La scansion implacable de « comme un temple hanté par les esprits impurs » laisse alors la place à des « Anges du ciel » au halo mystique. Les superbes couleurs des premiers « Venez » quasi suppliants mènent à une véritable caractérisation odorante de « Parfumez » dans le timbre même. La montée en puissance de « l’air corrompu qui va m’environner » emporte le public dans le « souffle de Dieu » vers un dernier « Venez !» emporté avec un désespoir inquiétant. Une telle palette d’émotions distillée ainsi dans un seul air laisse le public pantois. L’œuvre est rarement montée à cause de la difficulté de trouver deux protagonistes idoines : voilà devant nous un Athanaël digne des plus grands de l’Histoire, qui n’attend que la scène pour exprimer tout son potentiel.

 

D’une église l’autre

 

Pour le duo de Saint-Sulpice de la Manon de Massenet, Fabienne Conrad arrive de la nef, récitant « Là-bas, on prie » avec un art consommé de comédienne. « Que viens-tu faire ici » est encore quasi parlando, avant que le chant reprenne ses droits. « Oui, je fus cruelle et coupable » est des plus emportés, jusqu’à l’excès sans doute, le souffle et le legato compensant ce que le timbre ne peut offrir d’étoffe. Valentin Thill fait fuser « Que le ciel n’avait fait durable » avec une rage plutôt digne de Don José (c’est un problème qui apparait dans le concert entier : la caractérisation stylistique et l’approche des personnages sont réduites chez ce jeune chanteur à quelques réflexes encore simples). La projection et l’articulation de la soprano et la lumière de son timbre lui permettent de composer une Manon crédible malgré un certain manque d’ampleur, et les vocalises autour de « Je t’aime » expriment bien la séduction de la tentatrice, face à un Des Grieux ici encore plus torero que les ordres où il est entré ne devraient le permettre (le démontre un « Je t’aime » plus que fougueux). Disons que cette fougue permet au moins au public de ressentir une succession de moments dramatiques forts au cours de ce récital.

Fauve iconoclaste

 

Le lieu était tout désigné pour que le « Te Deum » de la Tosca de Puccini, seule entorse au répertoire français, y soit de circonstance, même si bien sûr au manque d’un orchestre se conjugue ici l’absence des nécessaires chœurs. Ce sera pourtant le véritable sommet pour la soirée. Car Dorothée Bocquet plaque sur son piano des accords grandioses qui mettent littéralement en scène Scarpia et son sadisme violent, avant que le calme ne se fasse pour les premières paroles du chef de la police romaine, qu’Alexandre Duhamel caractérise avec une moue patibulaire. Sa diction traduit immédiatement la morgue du vil dépositaire de l’ordre public (« seguila dovunque vada! ») comme son sourire cynique et carnassier. « Nel tuo cuor s’annida Scarpia! » lance une première et puissante vague de fiel, tandis que les « Va » étonnamment soufflés avec délice montrent le fond de l’âme putride du jouisseur sadique, comme on ne les a encore jamais entendus. « Della tua gelosia » fait sentir la jouissance anticipée du viol espéré, l’arc tendu de « è la più preziosa… » rend palpable la vague de fond du désir qui revient et va emporter le policier dans une extase iconoclaste ;  « fra le mie braccia » est simplement monstrueux, contrastant avec un  « illanguidir » lascif et libidineux, et « l’altra fra le mie braccia… » ouvre la vannes dantesques de l’ivresse du baron. « Tosca, mi fai dimenticare Iddio! » est dévastateur, d’une puissance contrôlée absolument fascinante, « Te aeternum Patrem omnis terra veneratur! » fusant comme un crachat envoyé au ciel avec une désinvolture mêlée d’orgueil. Quel moment ! La complexité de cette incarnation d’un personnage plus sinueux qu’il n’y parait déclenche une ovation bien  méritée pour le baryton. Il faudra compter sur lui à l’avenir pour incarner le baron Scarpia sur les plus grandes scènes.

Le loup dans la bergerie

 

Après un tel sommet dramatique, le trio final de Faust passerait presque pour une récréation. Du moins le lieu de culte reste-t-il comme un fil rouge pour le récital. Si la soprano manque un peu de projection, dans le grave surtout, sa diction permet au sens d’émerger nettement (« Chasse-le du saint lieu! »). L’implacable rythmique du baryton lance les hostilités avec amusement (« Quittons ce lieu sombre ! Le jour est levé »), et le ténor se trouve ici bien en situation, une fière lumière émanant de « il en est temps encore ». Si la diction de Fabienne Conrad sculpte « À toi, je m’abandonne », le manque d’ampleur de l’aigu se fait sentir tandis que Valentin Thill est tout éclat.

 

Urbi et orbi

 

Un seul bis sera permis par les horaires contraints du lieu : le duo de Don Carlos  de Verdi, « Dieu, tu semas dans nos âmes », où Valentin Thill s’accorde bien à Alexandre Duhamel en termes d’émission et de puissance maîtrisée, «Nous mourrons en nous aimant ! » exaltant avec un ton très juste l’affection des jeunes aristocrates espagnols, jusqu’à une reprise piano conjointe de « Dieu, tu  semas dans nos âmes » très délicate,  tandis que la fin du duo mène encore à un véritable moment dramatique, « Soyons unis pour la vie et la mort ! Liberté » remettant le curseur vers le sommet de la tension, qu’on aura rarement quittée durant ce récital.

 

Les ovations du public seront donc limitées par le temps, légère frustration pour les quelque trois cents personnes qui ont goûté à un récital à tout le moins impressionnant, dont on retiendra surtout qu’a brillé l’étoile d’un baryton déjà au firmament.

 

Visuels  : © Antoine Monfajon