Olivier Bruaux dans la grande salle du Nord-Ouest crée un Macbeth magistral et intense. Jerome Keen dans le rôle titre est inoubliable.
Macbeth ne cesse d’inspirer des générations de comédiens et de metteurs en scène. L’histoire maudite de la pièce écossaise est celle d’une prédestination. Trois sorcières prophétisent un destin glorieux à Macbeth. Celui-ci deviendra sous l’ardeur délétère de sa femme, Lady Macbeth, un régicide malheureux. La culpabilité et la paranoïa l’emporteront. À la façon du contemporain Game of Thrones, Shakespeare nous livre dans son Macbeth amour et guerre, sorcières et fantômes, intrigues et passions, meurtre et folie dans tous ses états.
Le Macbeth mis en scène Olivier Bruaux respecte un biais singulier. Il construit une sorte de boucle où l’on chemine vers le vacarme des épées, mais aussi au sein du vacarme intime de la psyché même de Macbeth. Ce vacarme-là gronde pour déborder. Autour de lui, le monde bascule de la magie au réalisme, de la sauvagerie à la loi. Le metteur en scène ne tient rien de moins qu’une leçon politique optimiste, où le tragique produit un collectif apaisé, avec comme résidu la folie de Macbeth. La pièce devient ainsi une leçon humaniste.
L’esthétique très réussie mêle la bande dessinée en noir et blanc, la cérémonie occulte et le roman de cap et d’épée. La troupe brille de conviction et d’excellence. Une troupe cohérente où les seconds rôles sont formidables.
La réussite (et notre immense plaisir !) réside avant tout dans la performance de Jérome Keen. Le comédien est prodigieux. Il fabrique un Macbeth édifiant. Il parvient en jouant de sa voix, en investissant tout son corps à déployer la psyché de Macbeth sans pas une fois s’égarer à psychologiser. Le spectateur voit tout, ressent tout. Keen est Macbeth ; il restitue la vantardise, la cruauté, la froideur et dans un même souffle, il émeut par le désespoir. Il restitue, mais il faudrait plutôt écrire qu’il incarne ; nous n’expérimentons pas l’après coup mécanique et attentatoire d’une restitution qui viendrait nous mettre à distance. Nous ne sommes pas dans la pliure des faux semblants de l’art dramatique, entre le comédien et son personnage. Nous sommes silencieux, médusés, là avec Macbeth et sa vertigineuse tragédie psychique.
Un Macbeth d’une intensité infinie à ne pas rater.
Macbeth
Auteur : William Shakespeare
Artistes : Yassine Amani, Jean-Louis Besnard, Olivier Bruaux, Vivi Brusset, Catherine Creux, Daniela d’Aria, Lou Dieterlen, Jean-Michel Flavigny, Joseph Gabison, Balthazar Grimaldi, Fanny Heurguier, Tancrede Hollington, Nicolas Jonquères, Jérôme Keen, Joana Kojundzic, Max Laure, Alfred Luciani, Béatrice Mandelbrot, Franck Nalis, Valentine Neuville, Abel Sormain, Dario Tarantelli, Vincent Van Damme
Metteur en scène : Olivier Bruaux
Crédit ©Victor Vinas