La soirée montreuilloise des Rencontres chorégraphiques de Seine-Saint-Denis invite au métissage avec deux spectacles qui se jouent des catégories.
Au menu de cette soirée, Lo Fanal, de Pol Jiménez et Hatched ensemble de l’artiste sud-africaine Mamela Nyamza. Des spectacles qui diffèrent par leur durée et leur forme : alors que le premier dure trente minutes et ne présente qu’une personne au plateau, le second fait tournoyer dix danseur.ses et en dure plus du double. En outre, Lo Fanal a été écrit pour l’espace public, Hatched ensemble pour la salle.
Pourtant, ce qui frappe quand on les voit à la suite c’est la similarité des réflexions esthétiques. Dans ces deux pièces, il s’agit de jouer avec des incontournables de la danse et de la musique : les danseur.ses de Mamela Nyamza se déplacent au son du Cygne de Camille Saint-Saëns quand Pol Jiménez joue avec L’Après-midi d’un faune de Debussy et Nijinski.
Ainsi, chacun.e fait métissage de diverses traditions chorégraphiques, avec de la musique classique qui se mêle à de la musique électronique et à des déhanchés très contemporains (Lo Fanal), ou à de la musique pop et à des musiques et pas issu.es de l’art sud-africain traditionnel (Hatched ensemble). À chaque fois, la danse classique apparaît sur la pointe des pieds, comme une surprise.
Le travail du son, où la musique à vue communique avec de la musique enregistrée, participe également de la rencontre des esthétiques. Le rapport au corps et à l’espace relie aussi ces deux pièces où les interprètes s’émancipent progressivement de la gravité : en quittant le sol où iels étaient assis.es ou bien en grandissant peu à peu les mouvements.
Bien entendu, ces points de rencontre ne sauraient rendre compte à eux seuls de la singularité de chacune des pièces. Le faune de Lo Fanal semble trouver en lui cet envol final suggéré comme horizon dès la première partie. Chez Mamela Nyamza, au contraire, le groupe est central dans sa déconstruction des stéréotypes et des rapports de domination. Alors que, dans son spectacle précédent, Hatched, elle était seule sur scène pour chorégraphier sa condition de femme lesbienne, dans Hatched ensemble, c’est bien du collectif que naît la révélation. La nudité des corps ne se limite plus alors à la fabrique d’une sensualité, mais permet de dire ce qui rassemble danseurs et danseuses, par-delà la singularité apparente de leur physique et de leur genre. Il en ressort un spectacle fort, où les tableaux sans cesse se renouvellent.
Hatched ensemble, de Mamela Nyamza et Lo Fanal, de Pol Jiménez. Ces spectacles sont programmés au Théâtre public de Montreuil dans le cadre des Rencontres chorégraphiques internationales de Seine-Saint-Denis. Prochaines dates : mercredi 15 mai à 20h15 (Lo Fanal) et 21h (Hatched ensemble).
Visuel : affiche du festival