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Julien Boclé : « On peut écrire en dansant, on peut écrire la danse, comme on peut danser avec les mots quand on écrit. Parfois danser, c’est aussi remplacer les mots. »

par Alan B.
31.07.2024

Originaire de Lorient, Julien Boclé se dit être un « jeune enfant de la mer ». Danseur, chorégraphe, auteur et acteur, ses créations donnent à voir des sensations, un corps – le sien -, la mer, le vent. Autant d’éléments qui le mèneront le 11 août à participer à la cérémonie de clôture des Jeux olympiques, au Stade de France, au sein d’une chorégraphie dirigée par Thomas Jolly. Gageons que cette cérémonie saura, plus que jamais, ne pas subsumer les vies qui font le faste de nos images.

Sur vos réseaux, votre projet Inner Dialogue, né en 2020 lors de la crise du Covid-19, semble être le premier à avoir vu le jour. Pouvez-vous nous dire ce dont il s’agit dans cette création ? Quel rapport entretenez-vous, encore aujourd’hui, à ce projet créatif ?

 

Inner Dialogue, c’est une série de courts-métrages, que j’ai écrite, réalisée et chorégraphiée en 2020, en collaboration avec la photographe Valentine Magendie. C’est mon premier projet artistique. C’était un voyage intérieur, alimenté par une réflexion poétique, philosophique, traitant de l’espace, de l’amour, de nos contradictions et combats intérieurs. J’ai écrit les trois textes, dans un moment de vie spécial pour moi, une période difficile où je n’allais pas très bien. Tout ça au même moment que la période de confinement avec la pandémie.

 

C’est aussi une période où je lisais beaucoup, je me suis notamment plongé dans les écrits du penseur et sociologue Edgar Morin, dont les travaux m’ont profondément inspiré. J’ai écrit et je dis cette phrase dans le premier épisode : « Plus je m’enferme dans des livres, plus je me sens ouvert au monde. »

 

Ce projet m’a poussé à réfléchir davantage aux enjeux de notre société, à notre rapport à la terre, à l’environnement, et à notre manière de vivre ensemble. Inner Dialogue a été le parfait berceau créatif de mes pensées et émotions. Aujourd’hui, en repensant à ce projet et en le revoyant, de nombreuses émotions me traversent, c’est assez émouvant. J’en suis fier.

 

En tant que danseur, vous avez réalisé des partenariats avec, notamment, le Palais Galliera ou la Maison Montignac. Dans quelle mesure ces performances ont-elles nourri votre pratique artistique ?

 

J’adore travailler dans différents milieux et contextes. Cela me permet d’adapter constamment ma pratique. J’ai eu la chance de me produire pour Mont-Blanc lors de la Fashion Week de Paris au Palais Galliera, comme dans des théâtres partout en France, sur scène avec des compagnies, ou encore dans mes propres spectacles, et aussi de participer à des tournages pour des publicités, comme pour Maison Montignac. Ce sont des expériences et des méthodes de travail différentes mais toutes sont passionnantes.

 

Pensez-vous que votre travail peut se manifester au sein d’institutions ou d’entreprises sans perdre une part de ce qu’il était à l’origine, c’est-à-dire privé, intime à l’instar d’Inner Dialogue ?

 

Oui, je pense que c’est possible. Chaque expérience, qu’elle soit institutionnelle ou commerciale, apporte une dimension différente à mon travail. Cependant je reste toujours très attentif et sélectif dans le choix des projets auxquels je participe. Mon objectif est de m’assurer que chaque projet reste fidèle à mon essence artistique et respecte l’intégrité de mon œuvre. Mais, en effet, mes propres projets artistiques restent le meilleur terrain pour moi pour m’exprimer pleinement, cultiver l’essence de mon art et ainsi partager ma vision artistique.

 

Le 1er juin, vous dansiez au Théâtre de la Ville dans une pièce intitulée I CAN’(t) BREATHE, inspirée de la pensée décoloniale de Frantz Fanon. Le philosophe écrivait : « La première chose que l’indigène apprend, c’est à rester à sa place, à ne pas dépasser les limites ; c’est pourquoi les rêves de l’indigène sont des rêves musculaires, des rêves d’action, des rêves agressifs. Je rêve que je saute, que je nage, que je cours, que je grimpe. Je rêve que j’éclate de rire, que je franchis le fleuve d’une enjambée, que je suis poursuivi par une meute de voitures qui ne me rattrape jamais ». N’y a-t-il pas une forme de rêve matériel, d’incarnation propre à l’écriture que vous vous attachez à dévoiler ?

 

Totalement, oui. J’ai ce besoin d’un travail de recherche, et qui n’a d’ailleurs pas forcément de résultantes explicites ou visuelles dans la danse. La pratique de l’écriture est un terrain propice à des émergences dans ce travail et elle m’autorise à partager ma pensée plus explicitement ou de manière plus matérielle.

 

Les mots vous viennent-ils avant ou après les images ?

 

Généralement les mots me viennent avant les images, mais en fonction du processus créatif ou du type de projet, cela peut varier. Selon moi, il n’y a pas un art qui précède l’autre. Mon processus est souvent une interaction, ou une fusion entre la musique, les mots et le mouvement. On peut écrire en dansant, on peut écrire la danse, comme on peut danser avec les mots quand on écrit. Parfois danser, c’est aussi remplacer les mots. Je crois que cette « kaléidoscopie » me permet de faire des allers-retours entre un jeu avec la langue, et un jeu avec une écriture qui se passe de la langue.

 

Dans la pièce I CAN(‘t) BREATHE, pour laquelle j’ai travaillé en tant que chorégraphe, metteur en scène, interprète, danseur et comédien, je suis parti des mots de mon oncle Jean-François Boclé, auteur du projet et dramaturge, ainsi que bien évidemment de ceux de Frantz Fanon, pour concevoir la chorégraphie, pour les 6 danseurs et danseuses au plateau.

 

Le 19 juillet, le Syndicat des artistes interprètes a déposé un préavis de grève qui s’étend du 26 juillet au 28 août, dates des cérémonies d’ouverture des Jeux olympiques et paralympiques. Quelque 300 danseurs contestent les conditions de travail ainsi que les inégalités de traitement entre artistes. Vous qui participez à la cérémonie de clôture des JO, comment vous situez-vous, en tant que professionnel du monde de l’art, par rapport à cette question ?

 

Les questions de traitement inégalitaire et des conditions de travail des artistes-interprètes, en particulier des danseurs, sont absolument cruciales à mes yeux et méritent une attention sérieuse, et une revalorisation. Lorsqu’il s’agit d’un événement de l’ampleur des Jeux olympiques et paralympiques, ces problématiques deviennent d’autant plus visibles et importantes à aborder. Ces enjeux de justice et d’équité dans le milieu artistique sont souvent présents, même si, en dehors de tels événements, ils passent plus facilement inaperçus. La grève actuelle a donc le mérite de mettre en lumière des réalités souvent vécues dans l’ombre.

 

Je suis naturellement sensible à toutes les formes d’injustice. Je pense que les projets d’un artiste dépeignent, consciemment ou inconsciemment, d’une vision politique. Je crois justement en l’art comme puissant moyen de sensibilisation et de réflexion. C’est aussi ce qui me pousse à vouloir développer mon travail et son rayonnement.

 

J’ai travaillé cette année sur la question coloniale, les discriminations, plus largement les situations de dominations, pour la création I CAN(‘t) BREATHE. Dans L’Homme et la Mer, j’ai travaillé sur des enjeux environnementaux, par un processus de recherche et d’écriture chorégraphique en création en milieu naturel, ainsi qu’en collaborant avec le biologiste Pierre Mollo sur l’importance des phytoplanctons dans la production d’oxygène et leur impact environnemental. Des thématiques fortes, certes différentes mais qui me touchent autant.

 

Il semble que vous soyez en constant renouvellement vis-à-vis de ce qui vous anime. D’hier à aujourd’hui : la danse et l’écriture. Aujourd’hui : le cinéma. Pourquoi ?

 

Je ne sais pas réellement si on peut parler de renouvellement constant, mais je me sens effectivement polymorphe dans mon approche artistique. J’explore différentes facettes de moi-même, mais je crois que ma sensibilité, mon essence artistique, reste constante. Elle est le fil conducteur qui traverse toutes mes créations. Cependant, les moyens d’expression, les styles, et les formes que j’utilise peuvent varier considérablement d’une œuvre à l’autre.

 

Mais il est vrai que le cinéma pourrait être mon grand amour. J’ai une envie viscérale de jouer, ainsi que de réaliser. Dans le cinéma, il y a le travail du texte, de la musique, du mouvement, de la corporalité, ainsi que la constante recherche. Une curiosité insatiable me pousse à vouloir comprendre la vie des autres. J’aime observer leur quotidien, et plus largement, tenter de m’ouvrir au monde et d’en percevoir ses complexités.

Visuel : © Sophie Branchereau