Coincée dans un tube de plexiglas, le visage écrasé, la tête à l’envers, le corps suspendu à la force de ses muscles, pendant près d’une heure, Alice Rende fait fi des carcans physiques. Dans un seule-en-scène entre émancipation et enfermement, la circassienne module son corps aux formes d’une boîte rigide dont elle peine à s’extraire, questionnant le rapport à la liberté et aux normes imposées aux femmes.
La virtuosité de la performance est phénoménale : chaque partie du corps, chaque morceau de peau est mis à l’épreuve de l’enfermement. À l’image d’une patiente cloisonnée de force, la jeune femme se réapproprie la rigidité des normes physiques afin de trouver la révolte et la résistance dans le corps. Son visage lui-même est écrasé, tiré le long de la paroi de verre : en déformant elle-même son enveloppe physique, Alice Rende trouve l’interstice de liberté dans lequel se glisser, avec lequel jouer pour dépasser les normes physiques imposées. En effet, la contorsion de son corps lui permet de se le réapproprier et de le faire sien, même dans un environnement hostile où la rigidité est la norme.
Au sein de cette prison translucide aux parois immuables, l’artiste se bat pour exister.
Alors que l’on pensait que le combat serait fini une fois sortie, l’épuisement et le poids de l’épreuve la poursuivent. En équilibre au-dessus de son ancienne cage, elle semble ne faire qu’une avec cette prison dont son corps a du mal à se défaire. Une fois à l’air libre, son souffle est court, son regard perdu et son corps vacille. Cette nouvelle liberté est vertigineuse, voire douloureuse. Désormais hors des murs, son corps cherche ses repères, reproduit d’anciens mouvements comme un souvenir persistant de l’enfermement.
L’enfermement, s’il n’est plus physique, a été intériorisé de manière si forte que tout son être en est imprégné. Loin d’être une délivrance totale, cette sortie s’apparente à un combat permanent, où chaque pas est une lutte contre le conditionnement social, physique et genré.
Ainsi, si l’enfermement n’est plus physique, celui-ci a été intériorisé de manière si forte que tout son être en est imprégné. Loin d’être une délivrance totale, cette sortie s’apparente à un combat permanent, où chaque pas est une lutte contre le conditionnement social, physique et genré.
Fora est une ode à l’émancipation, comme chemin sinueux et douloureux, mais dont le souffle est salvateur. Jusqu’au 20 mars au Théâtre de la Cité Internationale, vous pouvez prendre des places ici, afin de profiter de cette performance et des réflexions qui en découlent !
Jusqu’au 20 mars au Théâtre de la Cité Internationale.
Visuel : © Francis Aviet