Le festival Faits d’hiver se poursuit avec Grand Jeté de Silvia Gribaudi au Théâtre de la Ville – Abbesses. Ce spectacle drôle qui parodie allègrement les codes de la danse classique (et du spectacle de manière générale) est à voir !
La chorégraphe italienne Silvia Gribaudi déstructure les conventions classiques de la danse avec Grand Jeté. L’humour qui prévaut dès les premières minutes du spectacle annonce la couleur d’une création qui ne se contentera pas de nous émerveiller dans la belle interprétation d’une histoire émouvante.
D’histoire, il n’y en a pas. Elle-même érigée en maître de ballet ratée, Silvia Gribaudi semble peiner à retenir la fougue des 10 danseurs qui forment la MM Contemporary Dance Compagny. Elle fait le lien avec le public, dont elle réclame les applaudissement dès leur entrée en scène alors que les spectateurs ne savent pas vraiment ce qu’il va se passer, et les invite à compter « 5, 6, 7 et 8 », en référence aux huit positions de la danse classique.
Tout le spectacle est un jeu d’interrogations et de réponses entre les spectateurs, Silvia Gribaudi et le reste des danseurs. Elle-même se joint à eux mais comme par complaisance, pour essayer de récupérer le mouvement vers ce qu’elle souhaite leur faire faire. Elle est vite dépassée.
Le public est sollicité pour applaudir, se lever, même danser, entraîné par les danseurs et les lumières qui se rallument au gré des demandes. Il y a le mantra « fashion », « passion », « perfection », le décompte des positions, ou encore le fredonnement de mélodies célèbres comme l’ouverture du Lac des Cygnes et la Valse des Fleurs.
Difficile dans les premiers instants de savoir où cela va nous mener, mais c’est bien d’une parodie qu’il s’agit. Le spectacle de danse traditionnel où l’on est confortablement assis est bien loin. Il n’y a pas de linéarité, mais partout des réminiscences du ballet.
Par exemple, le grand jeté trouve une réinterprétation totalement loufoque lorsque Silvia Gribaudi invite les danseurs à l’effectuer et que ceux-ci se contentent de sauter par-dessus elle sans grâce particulière, les uns après les autres, dans une course effrénée qu’elle ne parvient plus à arrêter.
La techno a une place importante dans ce spectacle, car elle vient dès le début donner le rythme du spectacle, et reprend le dessus dès lors qu’une mélodie célèbre se fait entendre. Un mouvement interne irrépressible a toujours raison de l’organisation gracile qui se met parfois en place. La musique est détournée, les corps se libèrent. Un très beau jeu de lumières accompagne ces différents états.
La danse classique apparaît en creux comme une discipline qui bride les corps et les mouvements. Dans Grand Jeté, les danseurs s’en défont presque malgré eux, dans un plaisir et une énergie impossibles à canaliser. Entraîner le public est plus laborieux, mais l’expérience est belle.
Théâtre de la Ville – Abbesses
À voir du 23/01 eu 28/01 à 20h – Vendredi 14h30 et Dimanche 15h
Durée : 1h
© Andrea Macchia