Marie Goudot et Sophia Dinkel interrogent l’absence par la danse et les sons dans leur première co-création Partager le vide. Le travail artistique et réflexif est remarquable mais l’accomplissement sensible du concept nous laisse cependant sur notre faim.
Sophia Dinkel et Marie Goudot se rencontrent en tant qu’interprètes avant de collaborer artistiquement pour leur première co-création : Partager le vide. Toutes deux ont un vécu et un parcours très différent, pourtant elles se retrouvent dans leurs réflexions communes liées à l’espace, aux corps féminins, à la mémoire et à la danse.
Partager le vide suppose de l’avoir habité et de le laisser résonner, d’observer les traces de son passage, de celui des autres, scruter sa mémoire. C’est par leurs corps et leurs sons que Sophia Dinkel et Marie Goudot vivent et se partagent le vide.
Partager le vide est un peu le reflet de la rencontre entre les deux danseuses. Elles se découvrent, se devinent, se rejoignent puis entrent en harmonie. La communion semble être un fil directeur dans leur création. Ensemble, elles dansent et s’expriment en amitié, leurs énergies se percutent et s’assemblent.
Les guitares électriques comblent l’espace, font résonner leurs fréquences dans une dissonance qui atteint parfois l’euphonie. Le sonore s’accorde au visuel, aux gestes répondent les voix.
Sophia Dinkel et Marie Goudot se partagent l’espace, l’empiètent ou le libèrent par le son ou par le corps. Le vide et l’absence de vide communiquent.
Sur le plateau blanc, elles ne sont plus vraiment danseuses, mais habitantes de l’espace. Elles le font vivre en duo. Toutes deux expriment une résistance et une émancipation par le biais de vibrations, de mouvements cycliques et de gestes circulaires et horizontaux.
Les réverbérations font vivre l’espace. Après le chaos, le paysage s’apaise, mais reste empreint des sons qui l’ont traversé. Le vide témoigne d’une mémoire que l’on partage.
Sophia Dinkel et Marie Goudot sont de fabuleuses danseuses. Avec Partager le vide, elles tentent de se libérer et de révéler leurs expressions propres. Le travail créatif est remarquable et l’on reconnait l’immense travail de l’équipe artistique, mais le caractère réglé et millimétré laisse malheureusement en suspens l’émotion. Ainsi, on reste sur notre faim. On admire la conception, la réflexion, l’exécution, mais on peine à laisser l’émotion s’épanouir dans cet espace de liberté qui apparait paradoxalement si rigide.
Partager le vide reste cependant une très belle création qui révèle intelligemment la mémoire contenue dans l’absence en entrelaçant les corps et les sons.
Interprètes chorégraphes : Marie Goudot, Sophia Dinkel
Conseillers artistiques : Michael Pomero, Julien Monty
Dramaturgie musicale : Tom Pauwels (Ictus)
Création sonore et live : Fred Jarabo
Lumières : Quentin Maes
Visuels : ©Cndc-Angers