La géniale chorégraphe allemande n’avait jamais été montrée à Paris. Scandale ! Grâce à Frédérique Latu, directrice des iconiques Rencontres chorégraphiques internationales de Seine-Saint-Denis, cet affront est effacé. La puissance animale de Vis Motrix ne laisse personne indifférent.
Le travail de Rafaële Giovanola est très connu en Suisse et en Allemagne. Elle est la tête de la compagnie CocoonDance à Bonn, qui est également un lieu, un théâtre où elle enseigne. Aucune de ses pièces ne ressemble jamais à la précédente. En éternelle curieuse, elle regarde le mouvement partout où il se trouve. Elle a notamment pu entrer, en 2022, dans l’« Iconic Kiki House of Juicy Couture » de Genève pour un dialogue dansé entre sa compagnie et cette maison. On l’a vu s’intéresser aux danses folkloriques, à la boxe… bref, Rafaële Giovanola est infatigable. Vis Motrix est une pièce déjà ancienne. C’est lors d’une résidence de trois ans, de 2017 à 2020 au Théâtre du Crochetan à Monthey que l’idée de spectacle sur quatre appuis est né. Il est une réponse féminine à Momentum, créé en 2019 pour trois hommes sur les mouvements du parkour.
Vis Motrix est lié à une recherche sur le break et le krumping. La danse est saccadée comme si elle résultait d’un algorithme informatique. Elles sont quatre. Fa-Hsuan Chen, Martina De Dominicis, Tanja Marín Friðjónsdóttir, Susanne Schneider/Marie Viennot pour le moment ne font que respirer. Elles sont toutes les quatre allongées, habillées en noir, chignon classique sur la tête. L’étrange arrive. Visiblement, elles ne sont pas exactement humaines. La circulation du souffle dans leurs torses déforment leurs corps. La colonne se cambre jusqu’à soulever la nuque. Le mouvement peut entrer dans un déplacement.
Le geste de Vis Motrix est techniquement et visuellement à couper le souffle. Elles sont toujours à quatre pattes, et sur le dos. Le bassin se soulève et elles se mettent à avancer. Elles grouillent comme des araignées ou des fourmis, ou bien des robots très disciplinés. La lumière comme la musique sont métalliques. Elles font des boucles toutes les deux. Les appuis sont troublés. Elles doivent, pour suivre leurs lignes, croiser les mains derrière elles et les jambes aussi. Cela provoque des suspensions complètement neuves.
C’est beau à en crever. Rafaële Giovanola sait parfaitement écrire la danse et occuper l’espace.
Légende : ©Klaus Frohlich
Du 12/05/2023 au 13/05/2023. Salle Jean-Pierre Vernant du Nouveau Théâtre de Montreuil. Les Rencontres Chorégraphiques Internationales de Seine-Saint-Denis se poursuivent jusqu’au 17 juin. Tout le programme est ici.