Les montures performatives de Marie-Caroline Hominal aux Inaccoutumés
par Amélie Blaustein-Niddam21.03.2025
À l’occasion du festival des Inaccoutumés, qui bat actuellement son plein, nous avons découvert une création de 2021 de la chorégraphe, danseuse et performeuse Marie-Caroline Hominal. Eurêka, c’est presque le titre, est une pièce ludique, très dansée, performative et esthétique, qui puise dans des références contemporaines claires.
« Quand on a une paralysie faciale, on perd l’équilibre »
Il faut savoir commencer un spectacle de façon à ne pas se faire vite oublier. À ce jeu-là, Marie-Caroline Hominal est excessivement douée. Elle entre sur scène accompagnée d’un bruit, un cliquetis distinct. On la voit ensuite à cheval… enfin, à cheval de bois, une monture faite de tréteaux et de tissus. Aux pieds, elle porte des chaussons de danse, des pointes, qui lui servent à scander le sol.
L’image est plutôt réjouissante. Elle entraîne spectateurs et spectatrices dans un jeu classique de la performance, qui vise à déplacer le public au gré des envies de l’artiste. Lorsqu’elle se déplace, c’est pour rejoindre son espace scénique supérieur, constitué d’éléments géométriques aux allures très pop.
Nous sommes plongés dans une esthétique excessivement inspirée des années 60. Au sol, un immense cercle argenté. À droite, un cercle doré dressé. Au fond, un amas pailleté. Au centre de cet espace, elle quitte ses pointes et se met à danser, entamant une parodie accélérée de toutes les danses de Cunningham : jambes et bras en seconde, lignes perpendiculaires des coudes. Puis, elle accélère, libère les lignes et les arrondis. Elle prouve ainsi qu’elle est une excellente interprète, ce que l’on savait déjà pour l’avoir vue danser aux côtés de François Chaignaud dans Duchesse, notamment à la Ménagerie de Verre.
« Est-ce que John Cage serait mon père ? »
Tout le spectacle vise à répondre à une question : comment sauter l’obstacle ? Et pour l’artiste, l’obstacle est d’être chorégraphe et danseuse à la fois. Pour y répondre, elle convoque un rêve et la figure tutélaire de John Cage, qui, au passage, était le compagnon de Merce Cunningham. La boucle est bouclée, et la référence est claire.
Au final, on la suit dans ses divagations chorégraphiques et performatives. Cette pièce très courte, d’une trentaine de minutes, amuse beaucoup. Peu à peu, elle se révèle de plus en plus touchante et sensible. Mais là où la pièce nous saisit vraiment, c’est quand la beauté surgit dans une séquence pailletée, tout en élégance, qui tranche avec le reste et nous éblouit au premier sens du terme. Une performance percutante, pleinement intégrée à l’esprit des Inaccoutumés, qui ouvre parfaitement une soirée de festival.
Commande du Museum Tinguely de Bâle en 2021, le spectacle, produit par MadMoiselle MCH / Marie-Caroline Hominal, a été créé le 17 juillet 2021 au Centre Pompidou, Paris.
À voir à la Ménagerie de Verre le 21 mars à 19h. Le festival Les Inaccoutumés se poursuit jusqu’au 5 avril
Visuel : ©Ted Anatassian
