Au festival Artdanthé, Paola Stella Minni et Konstantinos Rizos s’emparent des multifacettes du mythe de Tirésias.
Au début, il y a des mots en lettres blanches sur un mur beige. Le texte nous rappelle le mythe de Tirésias, devin de la tragédie grecque, condamné à devenir aveugle en raison de sa clairvoyance. Après avoir séparé deux serpents qui s’accouplaient, Tirésias a vécu dans les deux sexes et a affirmé que la jouissance des femmes était neuf fois supérieure à celle des hommes. Cette affirmation, avant qu’il ne croise la route d’Œdipe, lui avait attiré les colères d’Héra. Voilà pour le mythe. Dans sa traduction scénique, le duo de chorégraphes qui s’est formé à EXERCE s’empare de l’allégorie reptilienne. La danse est superbe. Elle se passe au sol dans une intrication des corps de Nefeli Asteriou et Olivier Muller. L’un.e prend appui sur l’autre pour se glisser au travers de l’espace.
La pièce avance par paliers de reconnaissance de soi. Elle compte sept divinations. Heureusement, ces tableaux ne sont pas corsetés, l’écriture de la danse, très précise, permet de faire le lien sans effet catalogue. La danse va trouver sa verticalité dans une crispation délicieuse de tous les membres. Il et elle tremblent et avancent vers la fluidité des genres. Les interprètes sauvent la pièce de ses lenteurs parfois un peu artificielles. Elle et lui sont parfait.e.s dans leur évolution qui va de serpents oscillant au sol à personnes fières maîtrisant à mort l’art du lip sync. Olivier Muller est particulièrement juste dans les subtilités de hanches qui changent son allure en une seconde.
Kill Tirésias s’inscrit dans l’époque sans perdre en exigence d’écriture. La pièce vaut aussi par la qualité de ses interprètes, très en phase, et par une danse délicieusement saccadée.
Visuel : ©Théâtre de la Vignette
Le festival Artdanthé se déroule jusqu’au 23 mars