Attention écrin. Le festival Re.Génération nous invitait hier soir à déambuler dans la très chic Fondation Giacometti pour recevoir un spectacle comme un cadeau. Femme qui marche est un dialogue entre Nô et danse libre absolument délicieux.
Il faut déjà s’arrêter avant de commencer à marcher, surpris.e.s par la beauté de la façade qui s’avance au 5, rue Victor Schœlcher. Et puis entrer dans la Fondation Giacometti, à l’espace intime. On y trouve en ce moment un dialogue comme une mise en abyme entre de longues sculptures fines et leurs représentations, par le biais des photographies volontairement floues d’Hiroshi Sugimoto. Le photographe avait immortalisé les chefs-d’œuvre du Jardin de sculptures du MoMA. On y voit l’iconique Grande femme à différents moments de la journée.
Voici pour le cadre. Et c’est dans cet espace que surgit, tel un animal, l’agile Kaori Ito au son rapide du shamisen d’Hideaki Tsuji. Elle danse profonde et vaste, avec une dextérité intense. Elle joue espiègle à faire support de tous et toutes. Une épaule devient une barre pour pouvoir lever une jambe plus haut. Une paire de lunettes posée sur les cheveux d’une spectatrice se retrouve sur les yeux de la danseuse, une écharpe passe du cou d’un spectateur au sien… L’acte est aussi léger que l’allure de ces silhouettes, si fines qu’elles frôlent la disparition.
Et c’est justement sur ce point-là que Kaori Ito insiste, sur les couches qui nous constituent, qu’elle symbolise par les kimonos de soie pensés par Aurore Thibout. Et elle avance, Kaori, le regard franc, décidée, les pieds sur-ancré au sol. Elle est devenue, sans que nous l’ayons senti venir, une autre Grande femme qui dialogue désormais sur la scène avec tout un peuple composé de Homme qui marche, Homme à mi-corps, Buste d’homme assis, Femme assise et Grande femme.
De façon générale, danse et musée font toujours bon ménage, et les institutions ne s’y trompe pas. Une fois de plus, la recette fonctionne et ici particulièrement bien. La proposition écrite spécifiquement pour le lieu s’y niche à merveille.
Visuel : ©ABN