« Hurlula », le faible cri de Flora Détraz au Festival d’automne

par Amélie Blaustein-Niddam
12.10.2023

Après Tutuguri la saison dernière, Flora Détraz continue d’explorer la voix comme motif chorégraphique avec Hurlula, une pièce qui la dépasse, dans le fond et la forme.

Début avec un concert metal et performatif

Tout avait si bien commencé. Les dix premières minutes de ce spectacle tiennent du chef-d’œuvre. L’image est trouble, on voit apparaître un être étrange qui diffuse de la lumière dans ses yeux et sa bouche. Le cri vient, un hurlement de sidération qui colle à l’air du temps politique et écologique. C’est un concert métal et performatif, on adore. C’est radical à crever, on se dit qu’on va être subjugué.

Mais non. Flora Détraz, les cheveux comme électrocutés, tenus en pointe au-dessus de sa tête, va devenir un oiseau. Au sens ultra-littéral. Place à la chouette, au pic-vert… Sans bouger son corps ou presque, un croisement de bras, une jambe qui se braque, elle vocalise.

Démarche ancestrale

Pour rappel, tout le travail de cette performeuse, qui a notamment dansé pour Marlene Monteiro Freitas, est de faire de la voix une partie du corps. Sa démarche est ancestrale, nous sommes sur des cris aux accents primaires. Mais dans sa forme, dans l’attitude de Flora, qui assume un côté clown, cela devrait être contemporain.

Pourtant, les images restent datées dans une esthétique des années 1920 sans que l’on parvienne à savoir si c’est volontaire ou non. Elle convoque Antonin Artaud, le mime Marceau, Valeska Gert et dans le choix de la couleur bleue et de ses mimiques, beaucoup de l’esthétique de Marlene Monteiro Freitas. La scénographie pose également problème. Elle est faite d’un volcan en éruption, au début elle fonctionne très bien puis, au fil de jeu elle se révèle impuissante.

Musique puissante

La seule vraie force du spectacle est dans sa musique live. La manière qu’a Lê Quan Ninh de manier ses percussions est digne du meilleur concert de l’Ircam. C’est expérimental à souhait et fascinant à regarder. Il fait, avec un look et une attitude aussi absurde que dans un spectacle de Philippe Quesne, perruque raide noire et lunette de soleil, sortir des sons très étranges de ses instruments. Il pose des tiges en métal sur la peau de son tambour et cela vibre organiquement. La musique, puissante, dit bien plus que la danse, la nature qui appelle à l’aide.

Le spectacle s’accompagne d’un film qui se place dans la forêt. On y retrouve ce que nous avons adoré au début de la performance, ces lumières inouïes qui sortent du visage. Gardons cette image, et oublions le reste.

Au Centre Pompidou jusqu’au 13 octobre.

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