En direct du festival Le temps d’aimer la danse, à Biarritz, cette année encore, Rémi Rivière partage ses coups de cœur.
Entretien entre deux portes, à l’heure de Londres, avant de « rentrer en répète » : mots concentrés, formules tranchées, temps compté, Maud Le Pladec est à l’image de ses chorégraphies, à la fois denses, intenses et connectées au présent. La bientôt quinquagénaire est devenue un phénomène, depuis qu’elle a chorégraphié les parties de danse de la cérémonie d’ouverture des jeux olympiques, en juillet 2024 et qu’elle a pris les rênes du Ballet de Lorraine dans cette foulée, en janvier dernier. Pour la grand’messe sportive, elle réunissait les ballets de Bordeaux, de Lorraine et de Biarritz pour représenter devant des millions de téléspectateurs l’art chorégraphique français. Avec ces danseurs classiques, elle a puisé dans ses propres pièces et des mouvements scrollés pour mettre la tradition des ballets à l’heure d’Instagram. Aujourd’hui à la tête du Centre Chorégraphique National – Ballet de Lorraine, elle poursuit la réflexion : « quel est le ballet du XXIe siècle ? » interroge-t-elle. La réponse est entendue : « tradition et création doivent cohabiter ». Cet oxymore n’étant plus contesté dans la danse, et encore moins à Biarritz au sein d’un festival qui se repaît d’accommoder les styles, les genres et les traditions, Maud Le Pladec pousse tout de même le bouchon vers l’air du temps, cette esthétique pop que reçoivent cinq sur cinq les tiktokeurs de tout plumage et qui investit désormais les CCN. Depuis que Maud Le Pladec a été nommée à la tête du CCN d’Orléans, en 2017, ou que le collectif (La)Horde a pris celui de Marseille, en 2019, cette nouvelle vague s’affiche sans tabou au cœur de l’Institution. Avec ce nouveau CCN, c’est désormais un ballet qui se met au pas de Maud Le Pladec, non plus comme seule chorégraphe, mais « en explorant toutes les esthétiques possibles » et en sollicitant d’autres écritures, pourvues qu’elles aient leur charge explosive.
La venue du Ballet de Lorraine au festival Le Temps d’Aimer la danse, —aujourd’hui pour trois jours au théâtre Quintaou d’Anglet et dans une expansion inédite, au Zénith de Pau le 10 septembre—, est à cet égard explicite. Le programme est composé d’une pièce survoltée de Marco da Silva Ferreira, genre de transe électronique sur fond de bringue lusitanienne, justement nommé A Folia, comme cette danse portugaise de la renaissance, pleine d’allégresse et donc, de folie. La seconde pièce, Static Shot, a été créée par Maud Le Pladec il y a cinq ans pour ce même Ballet de Lorraine, comme une charge explosive célébrant la fin du confinement. Une pièce conçue comme un plan séquence, comme un « one shot » intense qui emprunte à l’image cinématographique. 22 danseurs sur un plateau, imbriqués, étriqués, clamant leur désir de liberté dans une transe débridée, enchainant les images et les poses dans un bain de lumière et une scénographie qui rappellent le filtre de l’écran. Un ballet scroll saisissant, qui questionne le rapport de la danse et de la musique dans une démarche plastique léchée. En cuisine, on connaît l’art délicat d’assembler des éléments riches en goûts. En danse, ce ballet à la Maud Le Pladec est une barre d’énergie.
Le festival Le temps d’aimer la danse se tient jusqu’au 15 septembre à Biarritz.
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Visuel :© Laurent Philippe