Le festival Furies s’est déployé dans les rues et les parcs de Châlons-en-Champagne du 3 au 8 juin. Programmation qualitative, dont fait partie le spectacle Øblik, première proposition portée par la circassienne Theresa Kuhn, spécialiste de fil souple, qu’elle circographie avec Maroussia Diaz Verbèke.
Theresa Kuhn est spécialiste de fil souple, mais elle a aussi une formation de clown. Aussi se lance-t-elle dans l’entreprise de déconstruire le premier à l’aide du second. Il est vrai que l’exercice de déconstruire son agrès semble constituer une étape nécessaire de nos jours dans le parcours de tout⸱e artiste de cirque contemporain qui se respecte. L’essentiel est de bien s’y prendre, et d’en tirer quelque chose d’intéressant.
Essai réussi dans le cas de Theresa Kuhn : en éclatant le portique sur lequel tient son fil, en le réduisant à une série de poutres reliées par un lien devenu extrêmement précaire, elle transforme son agrès en spectaculaire parcours de la combattante. La traversée de difficile devient une tâche qui semble impossible – mais elle s’avère ne pas être hors de portée de la talentueuse circassienne, qui a dû inventer des stratégies innovantes pour s’adapter aux difficultés qu’elle s’est créé. Tandis qu’elle réalise cet exploit, la tension / l’attention qui se lit sur tous les visages dans le public dit le point auquel son pari est réussi.
La circographie de Øblik est co-signée par Maroussia Diaz Verbèke (Compagnie Le Troisième Cirque), qui a embarqué Theresa comme interprète dans son spectacle Circus Remake. On reconnaît la patte de l’aînée : utilisation d’extraits d’archives sonores – notamment la voix de Claude Parent expliquant le rôle du déséquilibre dans son travail –, rôle éminent de la musique sur laquelle l’interprète a une action directe, couleurs vives à la limite du fluo… Mais cela n’efface pas l’empreinte de Theresa sur le spectacle, notamment à l’endroit du clown.
Le spectacle est tout jeune, et son prologue cherche encore son rythme. Mais la présence simple et souriante de la circassienne lui gagne néanmoins le public, et sa technicité au fil souple fait oublier tous les tracas techniques. Øblik surprend, et il est sûrement promis à un bel avenir.
Visuel © Philippe Cibille