Au Cabaret de Poussière, éclats de colères et de beautés

Un cabaret cultissime

Depuis 2018, le Cabaret de Poussière s’est installé au Zèbre de Belleville et propose chaque mois un spectacle inédit, où blagues décadentes, remarques insolentes et moments poétiques se côtoient. Au cœur du plus petit Cabaret d’Europe, l’ambiance est intimiste, colorée et politique. Un dress code ? Oui, fabuleuse. Langue volubile, poings levés et regard malicieux, le maître de cérémonie Martin Dust nous emmène dans un tourbillon d’émotions, accompagné d’un orchestre live qui offre du coffre et de la résonance aux discours et performances qui enflamment le lieu.

Un peu de paillettes, beaucoup de colère

Dans une mise en scène inspirée du cabaret parisien traditionnel, Martin Dust et ses mots nous plongent dans une soirée où tout devient à la fois subversif, puissant et fragile. On y voit de tout, les numéros de clown d’Angèle Micaux, les chansons à voix complètement transperçantes de Frieda ou encore l’humour de Maud Amour. 

Mais derrière la beauté de la fête, de la joie et du rassemblement, derrière les sublimes costumes de Maud Amour et Frieda, ou encore ceux de Martin Dust, habillé par Jean Oltra, il y a aussi  et surtout « beaucoup de colère », de douleurs et de peurs. 

Au travers de deux blagues adressées à un public « de plus en plus mainstream », le maître de cérémonie nous rappelle la présence oppressante et inquiétante de Trump et ses rafles de migrant.e.s mais aussi la douleur et la difficulté d’être gay, trans ou queer. 

Poids des silences, force des voix

Si au Cabaret de Poussière « on fait ce qu’on peut avec ce qu’on a » les performances ne manquent pas de nous donner frissons et larmes à foison. Dans une interprétation sublime et d’une puissance à couper le souffle, Martin Dust et ses invitées donnent voix au texte « Deuil ». 

Porté depuis le 28 mars 2025 par Bilal Hassani, ce texte, inclut dans l’album L’Affreuse, a été écrit par Martin Dust il y a plusieurs années et bouleverse par son authenticité, sa justesse et sa nécessité. 

Avec une anaphore martelante « on a porté », le texte peint tristement toutes ces morts, tous les silences, toutes les douleurs de la communauté trans, de la communauté queer, meurtrie et abimée par un monde et une société complices. Face au public, les artistes incarnent de leurs voix, leurs corps et leurs cœurs ce texte, face à un public transpercé par l’émotion. La nécessité de ce texte pour dénoncer, sensibiliser et faire guérir résonne encore lourdement en nous à la sortie de la salle. 

Véritable espace de contre-culture et de respiration, le Cabaret de Poussière fait éclater les barrières entre beauté, douleur et subversion. Dans ce lieu unique, chaque éclat – qu’il soit brillant, douloureux ou pailleté – résonne comme un acte de résistance et une invitation à se rassembler, à faire front.