«On tricote, on se balade et on voyage!», s’exclame le professeur. Non, nous ne sommes pas aux ateliers de loisirs créatifs. Nous assistons aux démonstrations annuelles de l’École de danse de l’Opera de Paris. Ici, on tricote des entrechats six avec les pieds et on voyage sur scène en grands jetés.
Traditionnellement présentées sur deux week-ends de décembre au Palais Garnier, ces démonstrations sont très attendues, tant par les élèves que par le public. Elles montrent toute la palette des danses – classiques, baroques, bretonnes, irlandaises, contemporaines, en duo, sur les pas de Martha Graham ou encore de Serge Lifar. Il y a des chants et des rires. Et surtout, on assiste à un miracle scénique : la transformation, sous nos yeux, d’enfants en artistes, de la sixième à la première division, cette démonstration est le fruit de leurs efforts quotidiens, qui doivent rester bien cachés derrière le sourire.
« Ils ont un rêve – devenir danseurs à l’Opéra », a déclaré la directrice de l’École de danse Élisabeth Platel, en ouvrant la dernière journée des démonstrations, la matinée « Rêves d’enfants ». Cette initiative philanthropique existe depuis quarante ans : les mécènes achètent des centaines de places de ballet pour Noël afin que les enfants des centres sociaux et des maisons d’accueil d’Île-de-France puissent venir à l’Opéra.
Si, dans le ballet de l’Opéra de Paris, les artistes remettent parfois en question les traditions établies, celles de l’École paraissent immuables. «On travaille avec les jambes et on danse avec le haut du corps », résume l’essentiel de l’école française Nolwenn Daniel, professeure de la troisième division. Les combinaisons d’Alexandre Kalioujny et de Gilbert Mayer, ainsi que les petites batteries de Claude Bessy, inspirées de la Suite en blanc, témoignent que la transmission se fait bien de mains à jambes, par ceux qui ont eux-mêmes suivi ce chemin.
Cette année, Élisabeth Platel a rendu hommage à Fabienne Cerutti, ces dernières démonstrations, marquant la fin de sa carrière. Entrée à l’École de danse en 1971, engagée dans le corps de ballet en 1977, promue « sujet» en 1982, ayant dansé auprès des plus grands, elle était professeure depuis 1998. Au total : un demi-siècle à l’Opéra.
Les étoiles d’hier, que l’on voyait encore récemment sur scène, sont aujourd’hui de jeunes pédagogues. Le caractère calme de Stéphane Bullion semble adapté au travailler avec les tout jeunes garçons, Karl Paquette, quant à lui gère les plus âgés. Wilfried Romoli – la plus brève des étoiles de l’Opéra et figure de longue date du corps enseignant de l’École – encadre la première division de garçons.
On commence déjà à retenir quelques prénoms : Riccardo, Marc, Safiya… À suivre au spectacle annuel de l’École de danse en avril et, qui sait, peut-être dans un proche avenir dans la compagnie de l’Opéra.
Visuel : Photo par Francette Levieux / OnP