« Vie privée » : le grand film de Louis Malle & Brigitte Bardot à nouveau en salles

L’un des grands plaisirs de l’été est de se réfugier dans une salle obscure pour redécouvrir une pépite classique du 7e art. Premier sur la liste : Vie privée de Louis Malle avec Brigitte Bardot et Marcello Mastroianni qui vient de ressortir pour la première fois en 30 ans, en version restaurée.

B.B. au sommet de son mythe

Plus hypnotisante et sensuelle que jamais, Brigitte Bardot joue un rôle très proche du sien dans ce film qui suit une jeune danseuse bourgeoise devenue star du cinéma par hasard et après un chagrin d’amour. A Paris, comme à Genève, Jill (c’est le nom de la jeune femme) est incapable d’avoir un espace à elle. Elle réussit avec nonchalance puis elle multiplie les rôles, les conquêtes et les pages dans les tabloïds. La scène où on l’oblige à enfiler une petite robe argentée pour un tapis rouge et où la foule la presse au point de la faire s’évanouir est absolument effrayante. L’idole éblouit d’autant plus que son premier amour ressurgit : c’est Fabio, un véritable artiste italien qui sortait avec sa meilleure amie. Plus âgé, « sérieux » et protecteur, il tente de préserver la vie privée de Jill, au point d’en oublier son accent italien…

Une Nausée indémodable

Quel dommage que le film soit resté invisible pendant trente ans. Une année avant le mépris de Godard, Bardot lance la mode du bandeau de couleur dans ses cheveux d’ange diablement crêpés. Le second degré sur le statut d’idole n’a pas pris une ride. Mais, alors que la star redouble d’accents traînants, de moues enfantines, d’œil de braise, bref en un mot pour elle de « naturel », les dialogues, un Genève mélancolique par bateau et les cuts acérés des plans font de ce petit bijou un labyrinthe existentiel. Existentialiste, même, à tel point qu’on dirait que la Nausée de Jean-Paul Sartre y rencontre la Nouvelle Vague. On se laisse bercer par le devenir si mélancolique de Jill et cette vision terrible du succès destructeur n’a pas pris une ride.