Présenté en sélection Un Certain Regard à Cannes, Terrestrial Verses (« Les versets terrestres ») fonctionne comme un poème de Rûmî. Le travail de mise en scène d’Alireza Khatami et Ali Asgari est magistral et méritait d’être en compétition officielle.
Terrestrial Verses nous plonge en apnée dans neuf situations de la vie quotidienne d’Iraniens d’aujourd’hui. Un homme veut son permis de conduire, une femme se présente à un entretien d’embauche, une maman achète les vêtements idoines pour sa fille qui célèbre sa majorité religieuse ou une conductrice de taxi est accusée d’avoir conduit sans tchador…
Réalisé à deux par Alireza Khatami et Ali ASgari alors que le tournage du film du premier avait été annulé par les autorités iraniennes, Terrestrial Verses fonctionne comme un banquet de poésie en farsi. Le résultat est un cadavre exquis contemporain, qui est aussi hyperréaliste et très engagé. L’introduction nous plonge dans Téhéran comme dans un fond d’écran.
Du pouvoir et de la bureaucratie, on n’entend que la voix, dans des plans parfaitement fixes qui semblent piéger les personnages dans une photo surexposée. Le pouvoir abuse, pas seulement au nom de la religion. Ses émissaires peuvent profiter de la situation pour assouvir – au nom de la morale d’État – leurs pulsions. On renoue avec le surréalisme dans une dernière scène absolument extraordinaire, qui explique le titre du film, qui retourne celui du célèbre livre de Salman Rushdie. C’est magistral, et cela mérite absolument un prix.
Terrestrial Verses, de Alireza Khatami et Ali ASgari, Iran, 2023, 77 minutes. En sélection dans la section « Un Certain Regard » au 76e Festival de Cannes.
Visuels © Cynefilms
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