Lille Piano(s) Festival propose du 13 au 15 juin 2025 une quarantaine de concerts. Pour le concert d’ouverture, l’Orchestre national de Lille interprète, sous la direction de Jean-Claude Casadesus, l’ouverture d’Obéron de Weber et le concerto pour piano n°1 de Tchaïkovski, avec Behzod Abduraimov au piano.
« Le Nouveau Siècle », l’auditorium où réside l’Orchestre national de Lille étant fermé pour travaux, le festival s’est déplacé au Casino Barrière. Nous sommes dans le quartier futuriste d’Euralille. En sortant du métro, de gigantesques fresques murales, représentant les capitales européennes, rappellent la vocation européenne de la métropole lilloise. Le casino-théâtre a été inauguré en 2010. C’est un élégant bâtiment de verre en forme de proue de navire. Pour le festival, le théâtre est transformé en salle de concert. Le public est là, nombreux, chaleureux pour accueillir Jean-Claude Casadesus. Il a fondé l’Orchestre national de Lille en 1976 et en a été le directeur musical jusqu’en 2019. À 89 ans, il apparaît très alerte en montant sur scène. Il va diriger l’orchestre avec énergie, dynamisme, vigueur. Avec majesté aussi.
Le concert débute par l’Ouverture d’Obéron, le dernier opéra de Carl Maria von Weber (1786-1826). L’ouverture a été écrite, juste avant la création de l’opéra à Londres en avril 1826. Un opéra qui nous emmène dans un cadre féerique avec une histoire de roi des elfes et de reine des fées. L’ouverture annonce cette atmosphère fantastique. Le solo initial du cor, rejoint par les cordes, distille une atmosphère mystérieuse. L’influence de Mozart est manifeste, mais elle est teintée de romantisme. La beauté de la mélodie, est émouvante en particulier quand elle est portée par le cor. Même si l’acoustique n’est pas optimale, l’auditeur appréciera la brillante orchestration , la fantaisie laissant aussi la place à de beaux élans romantiques.
Il n’était pas venu en France depuis deux ans. Grâce au festival nous profitons de la présence d’un pianiste d’exception. Behzod Abduraimov est un pianiste ouzbek, né à Tachkent le 11 O9 1990. Il remporte le premier prix du concours international de piano de Londres en 2009 et débute une carrière internationale. Ce soir il interprète le concerto n°1 pour piano de Tchaïkovski, une œuvre brillante, particulièrement virtuose. Il a été composé en 1874-75 lors d’une période exceptionnellement heureuse pour le compositeur. Malgré l’avis défavorable du premier dédicataire, le concerto connaîtra un succès rapide.
L’allegro non troppo débute de manière éclatante, les accords du piano sont saisissants alors que l’orchestre expose le thème. Les qualités du soliste apparaissent déjà, sa virtuosité, sa puissance. Il maintien un bon équilibre entre le piano et l’orchestre. Le souffle de cette musique évoque les grands espaces russes, il annonce l’œuvre de Rachmaninov. L’auditeur est emporté par l’ampleur de cette musique qui lui procure une sensation de plénitude. Elle est aussi romantique, lors des solos pianissimos ou des dialogues avec l’orchestre. La sensibilité du jeu de Behzod Abduraimov, son sens des contrastes, ses mille nuances font toute la richesse de son interprétation. L’andante débute par un très beau solo de la flûte qui se prolonge dans un dialogue avec le piano. C’est une mélodie lente et nostalgique interrompue par un bref presto inspiré par la chanson française « Il faut s’amuser, danser, rire ». L’allegro con fuoco s’inspire d’une danse cosaque, un peu sauvage. Le rythme de la danse s’emballe, devient frénétique. La fin du concerto est grandiose et la performance du soliste époustouflante… malgré la chaleur éprouvante.
Longuement applaudi, Behzod Abduraimov nous offre comme bis La Campanella, une étude de Franz Liszt d’après Paganini. Le son des clochettes se répand avec délice dans la campagne italienne. Le pianiste nous en offre une séduisante interprétation, par la vivacité, la légèreté, la sensibilité de son jeu. Pour clore en beauté le concert d’ouverture du festival.
Visuel(c) : Lille Pianos festival Jean -Claude Casadesus