Le 29 octobre 2024, la salle Pleyel a vibré au rythme de Robert Plant et de son groupe Saving Grace. Concert phare de la rentrée, ce rendez-vous était très attendu des fans. À voir tous ces T-shirts à la gloire de Led Zeppelin , on devinait que les spectateurs étaient là
avant tout pour « le lion », l’une des plus grandes voix du rock, qui a contribué à faire entrer son groupe dans la légende avec plus de 300 millions d’albums vendus, presque deux fois plus que Taylor Swift, la référence contemporaine.
Véritable monument du rock, Robert Plant incarne une époque : celle des années 70, où le sexe, la drogue et le rock’n’roll rythmaient la vie d’une jeunesse en quête de liberté. Nombreux étaient ceux venus se replonger avec nostalgie dans cette période légendaire,
emplissant la salle pour cet événement. Les neuf albums du groupe ont marqué l’histoire du hard rock, laissant une empreinte indélébile qui résonne encore aujourd’hui. Des groupes aussi variés que Deep Purple ou White Stripes, Metallica ou AC/DC ont puisé dans ce répertoire culte, l’analysant et le réinventant à leur manière.
Après la séparation de Led Zeppelin à la suite du décès du batteur John Bonham, Plant s’est lancé dans une carrière solo alternant périodes de silence et d’activité créatrice. Du blues originel aux influences plus exotiques, il a su s’aventurer sur des territoires nouveaux. Parmi ses onze albums, on peut citer « Mighty Rearranger », réalisé en 2005 avec son groupe « Strange Sensation », qui allie avec brio world music, country et sonorités rock britanniques. Il a également collaboré à plusieurs reprises avec son ancien comparse Jimmy Page, notamment sur le magnifique « No Quarter » en 1994, où ils réinventent le tube « Kashmir » de
Led Zeppelin. Mais de toute évidence, une reformation de Led Zeppelin n’était jamais à l’ordre du jour.
Il ne faut pas oublier ses deux albums avec Alison Krauss , la reine du bluegrass, produits par T-Bone Burnett . « Raising Sand », en 2007, a raflé de nombreuses récompenses, dont un Grammy Award en 2009, consolidant un peu plus son statut de légende.
Mais revenons à ce concert, où Robert Plant a retrouvé la scène parisienne avec « Saving Grace » , son groupe depuis 2019. Pour notre plus grand bonheur, Pleyel offre désormais sa très belle acoustique à une programmation élargie. Petit bémol : l’éclairage, qui peine à soutenir la qualité sonore du lieu. « Saving Grace » est une formation essentiellement acoustique, ce qui promettait un concert
intimiste. Les musiciens – le batteur Oli Jefferson et les guitaristes Tony Kelsey et Matt Worley , tous les trois assis, étaient placés en arrière-plan, derrière une photo d’un bison. Les premières notes se sont fait entendre grâce à Kelsey, qui entame une intro à la guitare
acoustique, suivie par Worley au banjo et Jefferson à la batterie. Pendant ce temps, Plant et la chanteuse Suzi Dian, vêtus de noir, se sont avancés lentement vers le centre de la scène. L’ambiance sobre et dépouillée laissait clairement présager que la musique serait au cœur du spectacle.
Le concert a finalement un peu déçu. Avec la riche discographie de l’artiste, on espérait une démonstration de la diversité de son talent, avec un mélange de rock, blues, country, folk-rock anglais et, bien sûr, quelques incontournables de Led Zeppelin. Or le groupe s’est
concentré principalement sur des morceaux issus de ses derniers albums, « Carry Fire » et « Lullaby and… The Ceaseless Roar », leur imposant une touche folk britannique.. Le début fut pourtant prometteur, avec quelques morceaux accrocheurs comme « Little Maggie » , « Up on the Hollow Hill » ou encore « Carry Fire », magnifiquement interprétés. Mais au fur et à mesure, la magie s’est dissipée, et l’envie de bouger et de participer s’est éteinte un peu. Même la reprise en rappel de « Gallows Pole », un classique de Led Zeppelin, bien que saluée par la foule, n’a pas eu l’impact escompté. À 76 ans, la voix de Plant a perdu de sa superbe sur ces notes exigeantes, et la performance vocale en souffrait. Dans une interview, Plant confiait au Los Angeles Times qu’il savait ne plus pouvoir atteindre
les aigus légendaires de sa jeunesse. « Ce falsetto de 1968, je l’ai exécuté jusqu’à m’en lasser », disait-il. Aujourd’hui, sa voix est plus douce, plus chaude, mais loin des rugissements d’antan. Bien que ses capacités vocales aient évolué, il reste un artiste exceptionnel.
Il faut souligner que Saving Grace n’est pas responsable de cette légère déception. Chaque musicien a fait la preuve de son talent, et le guitariste Tony Kelsey, avec ses sonorités parfois proches de T-Bone Burnett, mérite une mention spéciale. Quant à Suzi Dian, sa voix
pure et délicate s’est parfaitement fondue avec celle de Plant, créant de beaux moments d’harmonie. Le choix de la setlist, lui, est peut-être ce qui a un peu terni la prestation.
Pas grave, Robert ! Avec tout ce que tu as offert à l’histoire du rock aux côtés de Jimmy
Page, on ne peut que te rendre hommage. Nul doute que ses fans l’accueilleront avec
enthousiasme lors de sa prochaine visite, espérant une programmation plus représentative
de son talent protéiforme.
Enfin, mention spéciale à la première partie : Robert Vincent, un autre talent de Liverpool à découvrir absolument.
https://www.sallepleyel.com/evenement/robert-plant-the-saving-grace-feat-suzi-dian/
Visuel : YB