En fin de création de son quatrième album et en pleine préparation de la pièce Behind the line, le 22 et 23 juin prochain, Malik Djoudi nous a reçus au Carreau du Temple pour une discussion très sensible.
Effectivement, je suis en résidence au Carreau du Temple depuis un an et demi à présent. Dans mes chansons, je suis toujours à la recherche d’une quiétude. Ce morceau, « Vivant », a été comme une révélation. Il a été composé rapidement, en deux ou trois heures à peine. J’avais les instruments en tête, et quand j’ai écrit les paroles, j’en ai pleuré.
Oui, « Vivant » est également le titre de l’album. Je suis arrivé à un moment de sérénité et c’était important pour moi de commencer avec ce mot-là : vivant.
C’est un album un peu plus lumineux, plus rythmé peut-être, qui sera pas mal à l’image de ce premier titre. J’ai écrit ce disque assez rapidement, ce n’est pas forcément toujours le cas. C’est un exercice qui peut être difficile. Quand je commence un disque, cela m’apparaît toujours comme une montagne. Et là, j’ai eu envie de faire les choses de façon plus instantanée, en prenant du plaisir à le faire. De faire bien les choses, mais plus vite.
Le Carreau du Temple a mis à ma disposition une salle pour que je puisse faire ma musique. Il y a un piano à queue, ce qui est extraordinaire. Je me sens très bien ici. Le lieu est dirigé par la formidable Sandrina Martins et, de façon générale, il y a dans cet endroit une énergie très féminine. J’ai été élevé par des femmes et je me sens toujours mieux dans un environnement féminin plutôt que dans une énergie de coqs. La ligne directrice du Carreau donne de la visibilité aux minorités, et celles et ceux qu’on voit le moins. C’est très inspirant de composer dans ces murs. D’ailleurs, j’ai vraiment découvert ce lieu et cette équipe quand je suis venu jouer avec Christophe, et c’est de là qu’est née l’idée de faire quelque chose ensemble.
Essentiellement, ce sont un peu comme des rêves d’enfant. J’adore réaliser ces rêves en bossant avec des artistes que j’admire. J’ai eu de la chance de le faire avec Isabelle Adjani, pour moi, c’était inaccessible. J’imagine que ma sensibilité peut se marier à leur sensibilité. J’aime bien me mettre dans la peau de ces personnes pour leur faire un costume presque sur mesure. Et surtout marier nos voix, marier nos sensibilités.
Je suis passé par tous les chemins dans le passé. J’ai fait du rock, de la power pop, de l’électro-rock. Je me cherchais et aujourd’hui, je fais vraiment ce que j’ai envie de faire. Et oui, je me laisse guider par ma fragilité et ma sensibilité. L’important, c’est qu’on soit sur la même longueur d’onde musicalement.
Je travaille beaucoup seul. J’écris, je compose et j’arrange seul. Pour ce disque, j’ai fait appel à Adrien Soleiman, qui est saxophoniste, réalisateur et producteur. Je lui ramenais mes maquettes et ensuite, nous les avons retravaillées. Il a fait le choix des musiciens et nous avons fait la post-production ensemble.
Je travaille mes sons un à un et ensuite, on essaie, en studio, de retranscrire ces sons à l’identique. Je peux passer des jours et des jours sur un son. J’ai du mal à mettre des mots sur ces sons et je passe des heures à chercher seul cette précision.
Je suis spectateur de spectacle vivant, j’aime beaucoup la danse et le théâtre. J’ai passé dix ans de ma vie à être musicien auprès de Pierre Rigal notamment. J’ai beaucoup aimé le travail de collaboration avec la danse ou les groupes de musique. Et à un moment donné, il était important pour moi de faire exactement ce que j’avais envie de faire et surtout qu’on arrête de me dire ce que je dois faire. Je n’ai pas l’impression que ce soit le cas.
Oui, et en ce moment, je fais un spectacle avec Anne Nguyen qui se donnera ici même, au Carreau du Temple, lors des Olympiades culturelles, le 22 juin. Sandrina Martins m’a demandé de penser un spectacle autour de l’immigration et du sport. Je me suis exécuté. Je me suis associé au metteur en scène Joris Avodo et, ensuite, nous avons demandé à la chorégraphe Anne Nguyen d’écrire la danse.
Dramaturge, en tout cas, pour ce spectacle. Pour le penser et l’écrire, nous sommes toutes et tous allés au Bénin. Anne Nguyen y est marraine de l’association Irilojù. Sur scène, on enverra de la musique, que je vais écrire. Huit interprètes, quatre issu.e.s de l’association béninoise et quatre de la compagnie d’Anne, la Compagnie par Terre. Cela va s’appeler Behind the line et ça se jouera dans la grande halle.
Behind the Line : Le 22 et 23 juin
Une création mondiale au Carreau du Temple
4 Rue Eugène Spuller, 75003 Paris
Visuel : Malik Djoudi © Edgar Berg web