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Peace Orchestra Project et Martha Argerich acclamés à la Philharmonie de Paris

par Hannah Starman
11.09.2023

Ce 9 septembre, devant une salle Pierre Boulez comble, le Peace Orchestra Project, dirigé par le chef Ricardo Castro, avec la légende du piano, Martha Argerich et Federico Gad Crema, le jeune pianiste et fondateur du projet, achèvent avec éclat leur tournée européenne. Les jeunes musiciens et leur mythique marraine, enchantent le public parisien avec un programme éclectique et lumineux.

Peace Orchestra Project : la musique comme vecteur de développement humain

 

Fondé par le pianiste italien de 24 ans, Federico Gad Crema, le Peace Orchestra Project (POP) réunit un ensemble de jeunes musiciens, entre 18 et 25 ans, venant du monde entier, autour d’un projet innovateur, qui utilise l’orchestre symphonique « comme plateforme de transformation sociale, de paix et d’intégration dans notre société, grâce au pouvoir de la musique. » Pour l’édition 2023, le POP se lie avec deux partenaires de renom : NEOJIBA et l’Orchestra Giovanile Italiana.

 

Fondé par le chef d’orchestre brésilien Ricardo Castro en 2007, NEOJIBA (Núcleos Estaduais de Orquestras Juvenis e Infantis da Bahia) vise à promouvoir le développement social et l’intégration des enfants et des jeunes issus des communautés défavorisées à travers l’enseignement et la pratique de la musique. Plus de 2000 jeunes participent au programme et depuis sa fondation, les orchestres de NEOJIBA ont joué 1600 concerts pour un public de 830,000 personnes au Brésil et dans le monde.

 

Le deuxième partenaire du POP, l’Orchestra Giovanile Italiana, est né à l’initiative du célèbre altiste italien, Piero Farulli, en 1980. Constatant l’insuffisance de la formation professionnelle des jeunes musiciens fraîchement diplômés, Farulli conçoit une formation des musiciens d’orchestre qui sera financé par les  fonds européens. Des personnalités les plus éminentes du monde musical international s’allient au projet, notamment Riccardo Muti, Carlo Maria Guilini, Giuseppe Sinopoli, Daniele Gatti, Gabriele Ferro et Gienandrea Noseda.

 

Le Peace Orchestra Project bénéficie déjà du soutien de prestigieux parrains, parmi lesquels Ricardo Castro, qui dirige l’orchestre, et Martha Argerich, connue pour son soutien indéfectible aux jeunes musiciens. Le chef d’orchestre brésilien et la pianiste argentine ont accompagné le POP et leur jeune directeur artistique à travers l’Italie et la Suisse, lors d’une tournée de cinq concerts qui se termine à la Philharmonie de Paris.

Symphonie n° 2 « Un monde nouveau » de Nicola Campogrande

 

Nicola Campogrande est compositeur, directeur artistique du Festival MITO SettembreMusica, journaliste de Corriere della Sera et animateur de radio. Considéré comme un des représentants les plus intéressants de la nouvelle génération italienne, Campogrande a composé de nombreuses œuvres symphoniques, de la musique de chambre et de l’opéra et enregistré une trentaine de disques chez Decca.

 

Il a écrit « Un mondo nouvo » en réaction au sentiment d’impuissance que lui inspire la guerre en Ukraine. « J’ai eu l’idée de composer ma deuxième symphonie, » explique Campogrande dans le texte qui accompagne le programme, « pour tenter d’offrir une réponse musicale à l’angoisse qui a accablé notre continent ces derniers mois et qui semble menacer la civilisation millénaire que nous avons produite, préservée et renouvelée au fil des siècles. » Pour ne laisser aucun doute sur la confiance dans un monde meilleur, il va jusqu’à demander à son librettiste Piero Bodrato d’imaginer un texte pour le dernier mouvement. « Je voulais qu’une mezzo-soprano se fasse la voix de notre humanité et chante le beau, le souffle et la vie. »

 

Le fil conducteur calme et serein de l’œuvre, qui appelle à un monde nouveau, s’inscrit aisément dans la vision humaniste du Peace Orchestra Project. La brève partition d’un temps d’exécution de quinze minutes suit le schéma conventionnel de quatre mouvements dont le dernier avec la voix soliste, qui n’est pas sans rappeler le « Chant céleste » qui clôt la Quatrième symphonie de Mahler.

 

Le nouveau monde de Campogrande est léger, optimiste, et finalement, assez convenu. L’espoir y est porté par un important contingent des cordes, qui dominent le premier mouvement. Le deuxième mouvement, mélancolique et rempli de regret, nous rappelle la souffrance qui rend la réalisation de la paix aussi essentielle qu’urgente. Les flûtes et les hautbois évoquent un nouveau jour qui se lève dans le troisième mouvement, comme après une longue nuit sans sommeil. La jeune mezzo-soprano grecque, Alexandra Achillea Pouta, formule cette promesse d’un nouveau monde avec une voix chaude et enveloppante, qui excelle surtout dans la partie médiane de la tessiture.

 

Le retour triomphal de Martha Argerich à Paris

 

La saison 2022/23 a vu Martha Argerich dans l’obligation d’annuler plusieurs concerts pour des raisons de santé, y compris celui du 14 décembre 2022 à la Philharmonie de Paris. La pianiste de 81 ans a été également contrainte d’annuler sa tournée en Allemagne, en Autriche et en Suisse en été 2023.

 

Ce soir à la Philharmonie, son public fidèle est au rendez-vous. Dès son entrée en scène, Martha Argerich reçoit une salve d’applaudissements qui ne s’arrêtera que lorsque elle s’installe au piano. Avec un petit sourire aux lèvres, elle écoute les premières mesures de l’orchestre, pianotant de ses doigts sur ses genoux (son trac est légendaire), avant de se lancer, avec l’énergie qui la caractérise, dans le Concerto pour piano n° 1 de Beethoven. C’est avec le Premier concerto de Beethoven que Martha Argerich, alors fillette de sept ans, fera ses débuts au Teatro San Martín à Buenos Aires en 1949.

 

Malgré la familiarité avec l’œuvre qu’elle joue depuis 74 ans, Martha Argerich n’a pas la flemme.  Au contraire ! On a l’impression qu’elle s’épanouit dans le dialogue et la complicité avec les jeunes solistes (tous excellents !), l’orchestre et son chef, à qui elle impose son rythme dans la joie et la bonne humeur, mais surtout avec cette étincelle d’espièglerie et de générosité qui lui donnent un charme fou. Tour à tour virtuose, impérieuse et rêveuse, sans jamais se prendre trop au sérieux, l’indomptable Martha Argerich, inspire une immense admiration couplée d’une affection impérissable, auprès du public et parmi les musiciens qui l’accompagnent.

 

Les applaudissements et les bravos éclatent dès les dernières mesures et Martha Argerich revient sur scène avec Ricardo Castro et Federico Gad Crema pour nous offrir un touchant bis : Romance pour piano à six mains de Rachmaninov que le pianiste russe écrira pour les sœurs Skalon en 1891.

 

La révélation Federico Gad Crema, jeune pianiste aux multiples talents

 

Après l’entracte, Federico Gad Crema, interprète le Deuxième concerto pour piano de Chostakovitch. Une des œuvres les plus populaires du compositeur, le Deuxième concerto est entraînant, rapide et relativement facile par rapport à ces autres compositions.

 

Chostakovitch a composé son Concerto n° 2 en 1957, à l’occasion du dix-neuvième anniversaire de son fils, Maxime, qui le créera le 10 mai 1957 dans le cadre de ses examens au Conservatoire de Moscou. Soucieux de ne pas accabler le jeune musicien, Chostakovitch père compose une œuvre relativement brève, d’une durée d’exécution d’environ 20 minutes, et dénuée des pyrotechnies habituelles. Il y inclut des clins d’œil humoristiques à son fils, par exemple, dans le troisième mouvement, le compositeur écrit une polka rapide et boulevardière qui évoque la méthode Hanon, cette série d’exercices redoutés et souvent détestables visant à « acquérir l’agilité, l’indépendance, la force, l’égalité des doigts ainsi que la souplesse des poignets, » dont Maxime a dû lui casser les oreilles comme tout apprenti pianiste.

 

Chostakovitch affirmera, dans une lettre à son élève et ami Edison Denisov, que le concerto n’avait « définitivement aucun mérite artistique. » Pourtant, son Deuxième concerto est un régal du début à la fin et Chostakovitch le jouera souvent et à un tempo rapide. Son petit-fils Dmitri Chostakovitch Jr. interprétera le Deuxième concerto avec la même vivacité que son grand-père et l’enregistrera en 1984 avec le célèbre orchestre de chambre québécois I Musici de Montreal sous la baguette de son père Maxime Chostakovitch.

 

Né à Milan en 1999, Federico Gad Crema, est considéré un des pianistes les plus talentueux de sa génération. Réputé pour ses interprétations émotionnellement chargées, sa sensibilité subtile et sa maturité artistique, le jeune pianiste féru de mode, tout comme son mentor Jean-Yves Thibaudet, est lauréat de plusieurs concours de piano nationaux et internationaux. Vêtu d’un costume rose signé Fratelli Tallia Di Delfino, Federico Gad Crema exécute  le Deuxième concerto de Chostakovitch avec fraîcheur, vivacité, légèreté et une jeunesse ravissante. Sa complicité avec l’orchestre et le chef, qui marque, par exemple, le dialogue souriant avec les flûtes (superbes, au demeurant), n’est pas sans rappeler des rapports filiaux qui ont marqué la genèse et la création de cette œuvre pétrie de tendresse. Son bis aux accents jazzy conclut sa partie dans la gaîté qui ne manquera pas d’enthousiasmer le public.

 

 

L’Oiseau de feu fébrile et flamboyant clôture la soirée en beauté

 

L’Oiseau de feu, inspiré de l’un des contes nationaux russes les plus célèbres et créé le 25 juin 1910 à l’Opéra de Paris par les Ballets russes sur une chorégraphie de Mikhail Fokine, avec des décors d’Alexandre Golovine et Leon Bakst, représente le romantisme tardif de l’école russe. Pour narrer l’histoire du jeune Ivan Tsarévitch, qui vainc le maléfique demi-dieu Kochtcheï à l’aide d’un oiseau fabuleux, Igor Stravinski, le plus jeune et le plus talentueux des élèves de Rimski Korsakov (le dédicataire de L’Oiseau de feu) « étire l’expression jusqu’aux plus extrêmes limites de l’harmonie », comme l’explique Klaus Mäkelä qui vient d’enregistrer un Oiseau de feu d’anthologie.

 

Sous la direction assurée et bienveillante de Ricardo Castro, le jeune orchestre s’épanouit dans une partition riche et colorée qui lui permet de déployer son talent et sa belle énergie. La succession des bois dans le Jeu des princesses, le son clair et sec des cordes incarne merveilleusement la fougue de l’Oiseau. La Danse infernale de Kachtcheï aurait pu être plus endiablée, mais l’exécution quelque peu sereine gagne en clarté superbe du son et la puissance de la narration n’en pâtit point. Le basson de la Berceuse est remarquablement étiré et la séquence riche en détail. Le Finale est torrentueux, comme si les jeunes musiciens, se lâchaient dans une explosion d’expressivité joyeuse qui ne laisse aucun doute, ni sur leur immense talent, ni sur leur plaisir de jouer.

 

Avant de quitter la scène, Ricardo Castro partage sa joie d’entendre jouer cette jeunesse : « On est comme des Robins de Bois. On vole la scène des professionnels pour donner l’opportunité à ces jeunes d’y jouer. » Il sourit avec une douceur mélangée de fierté. « C’est mon rêve. » En hommage à Leonard Bernstein, le Peace Orchestra Project nous livrera une interprétation pétulante de l’ouverture de Candide.

 

Cette belle soirée de musique, de joie et de la bienveillance se terminera par une une standing ovation amplement méritée.

Visuel : © Adriano Heitman