Olivier Vernet et Cédric Meckler se produisent le 20 décembre 2025 à l’auditorium de Radio France. Ensemble, ils interprètent leurs transcriptions pour orgue de Jean Sébastien Bach et de Maurice Ravel, dont le concerto Brandebourgeois n°3, la Chaconne, le Boléro.
Le duo Vernet-Meckler a été fondé par les deux « complices » en 2006. Il se consacre à des œuvres pour orgue à 4 mains. Ce soir nous fêtons le vingtième anniversaire du duo. Les deux organistes nous font découvrir leurs transcriptions des œuvres de Bach et de Ravel. La transcription est à la fois une appropriation et une création. Bach aimait beaucoup l’orgue, il recyclait ses propres œuvres créant ainsi des ponts entre musique profane et musique sacrée. Il n’aurait sûrement pas désavoué l’entreprise d’Olivier Vernet et de Cédric Meckler. Ils restent relativement fidèles à Bach ou à Ravel, trouvant un bon équilibre entre audace, innovation et respect de l’œuvre originale. Le concert nous révèle toute l’étendue des possibilités de la transcription en nous montrant deux versions pour orgue de l’Invention n°8 de Bach. La première du pianiste américain Louis Victor Saar, est très brève, très proche de l’original. Celle du compositeur anglais Cyril Scott est beaucoup plus ambitieuse avec une introduction lente et majestueuse. Si l’on retrouve ensuite les staccatos de l’invention de Bach, la fin est très spectaculaire déployant toute la puissance de l’orgue.
Ce concert anniversaire à quelques jours de Noël est aussi le jour de lancement de leur album BWV2 Vernet+ Meckler. Le nom du registre de Bach est au carré car dans cet enregistrement ils utilisent aussi l’électro- acoustique, la musique de Bach étant ainsi « augmentée », en perpétuelle renaissance.
Il y a deux consoles (ou claviers). Olivier Vernet est près de nous sur la scène, Cédric Meckler est perché sous les tuyaux du splendide orgue de l’auditorium. Les deux solistes sont éclairés par une lumière chaude, plutôt jaune alors que la scène et les tuyaux de l’orgue se colorent de bleu. Le contraste visuel est très réussi. L’auditeur pourrai être un peu surpris au début du Concerto Brandebourgeois n° 3, il y a moins d’élan, moins de vivacité, plus de solennité que dans la version orchestrale. Mais la plénitude de la musique de Bach nous gagne rapidement. Dans ce concerto sans soliste, l’adagio est limité à quelques accords. Olivier Vernet et Cédric Meckler y ont « greffé » le largo de la 6ème sonate pour violon. Un moment de grande harmonie, de grande douceur, l’orgue évoque la flûte avant un final rapide, enlevé. Là aussi la version pour orgue à 4 mains apporte grandeur et dimension religieuse à cette œuvre profane.
Le concerto pour deux clavecins en ut majeur ne comportait qu’une partie orchestrale mineure et il était joué à l’orgue seul dès l’époque de J.S.Bach. Cette fois il ne s’agit donc pas d’une transcription. Le dialogue s’instaure entre les deux organistes. L’orgue chante, mais révèle aussi toute sa puissance, toute sa majesté.
Pour la Chaconne, le décor change. Les deux solistes sont côte à côte sur la console du bas. L’orgue s’illumine en rouge, tel un soleil flamboyant alors que la scène se pare alternativement de rouge ou de jaune. C’est un festival de couleurs. La Chaconne est le morceau final de la 2ème Partita pour violon de J.S. Bach. Avec ce seul instrument il a bâti un monument polyphonique, d’une grande difficulté technique pour le soliste. Dans leur transcription Olivier Vernet et Cédric Meckler se sont principalement inspirés de l’adaptation pour deux pianos de Carl Reinecke. A l’orgue, la célèbre Chaconne paraît moins âpre moins rugueuse, en apparence moins virtuose. Mais au fil des variations apparaissent toutes les possibilités de l’orgue, la douceur mélodique, la tendresse, la puissance des accords, la plénitude de cet instrument.
Le concert se termine par le Boléro de Ravel. C’est à l’origine une danse andalouse, il a été composé en 1928 un peu comme une œuvre expérimentale. Cette mélodie lancinante, envoûtante, inlassablement répétée va faire le tour du monde. Nos deux organistes se sont inspirés de la version pour deux pianos de Ravel. Leur transcription est réussie, l’orgue devient orchestre. Il imite les cordes pincées dans les basses, le chant du hautbois, les violons au début du crescendo puis tout s’accélère, les accords puissants parfois dissonants nous conduisent à une impressionnante apothéose finale.
Le duo Vernet-Meckler nous ont offert un concert original, nous montrant toutes les capacités de leur instrument. Pour cette soirée, le très bel auditorium de Radio-France s’est métamorphosé, avec le fabuleux jeu d’éclairages. La solennité de l’orgue aidant, nous nous sommes évadés dans une cathédrale pour un spectacle « son et lumière ».
Visuel © : Amandine Aubrée