Le groupe dream pop Cigarettes After Sex a offert un concert enivrant au Zénith de la Villette dans le cadre d’une nouvelle tournée internationale. Quatre ans après son dernier album, le trio rencontre un succès renouvelé grâce à ses morceaux intemporels et à leur diffusion sur les réseaux sociaux. Retour sur cette soirée qui annonce probablement un troisième album…
Quatre ans se sont écoulés depuis la sortie de leur deuxième album Cry. Quatre ans se sont écoulés depuis leur dernier concert en France, donné à l’Olympia en novembre 2019. Et pourtant, le Zénith de la Villette affiche complet ce mercredi 15 novembre. Une foule compacte, unie par une attente fébrile, matérialise le succès continuel de Cigarettes After Sex, séduisant inlassablement par son style éthéré empli de mélancolie et de sensualité. Formé en 2008 à El Paso par Greg Gonzalez, le groupe dream pop se reconnaît instantanément à la voix androgyne de son chanteur, à ses mélodies sobres et langoureuses, et au thème sempiternel de l’amour, chanté sous toutes ses coutures. Au point que d’aucuns disent que leur discographie est synonyme de répétitions plus que d’expérimentations. À ce titre, les quatre derniers singles du groupe restent fidèles à cette couleur musicale crépusculaire. Mais il n’empêche que le charme de cette beauté figée opère toujours…
Des portraits en noir et blanc de Bob Dylan, Nico ou encore Lou Reed, meublent l’attente du Zénith en imageant l’héritage dont se veut Cigarettes After Sex. Ces artistes américains de la contre-culture des sixties auraient pu être accompagnés de Françoise Hardy, Mazzy Star ou Cocteau Twins, autres inspirations dont se réclament Greg Gonzalez. Mais enfin, les premiers accords de « Crush » résonnent dans la salle, auxquels répond une acclamation unanime. S’ensuivent « You’re All I Want », sorti en 2020, et « John Wayne », issu de leur premier album sorti en 2017. Tandis que des balances de lumière accompagnent subtilement la langueur des morceaux, le public chante en chœur et par cœur ces titres qui ne sont pourtant pas les plus connus… La plupart sont des adolescent.e.s et ont découvert l’univers du groupe via des tendances TikTok, diffusant les titres « Apocalypse », « K. » ou « Sunsetz » comme des traînées de poudre, leur offrant un succès renouvelé.
Ce succès à combustion lente doit sa toute première étincelle à l’EP I, sorti en 2012, dont le trio américain reprend ce soir l’incontournable « Nothing’s Gonna Hurt You Baby » et « Dreaming of you ». Et c’est sur la (ré)interprétation de ce dernier morceau que le groupe ose expérimenter et s’éloigner de son style monocorde : en poussant les amplis, en remplaçant la basse par une guitare électrique, le trio propose un son plus noise, plus orageux. Et ce sont peut-être ces réarrangements qui nous ont manqués pendant le concert… Bien évidemment, les titres « Cry », « Heavenly » ou « Touch » de leur deuxième album n’ont rien perdu de leur beauté suave, de leur langueur doucereuse. Et d’entendre l’intimité qu’ils expriment reprise par six mille personnes provoque une émotion indéniable. Mais, les moments de communions n’excluent pas des expérimentations et des réinventions. Aussi, nous sommes curieux de voir si cette brume mélancolique osera s’aventurer dans des orages plus tumultueux ou des morceaux plus lumineux dans leur troisième album, prévu dans les prochains mois.
Greg Gonzalez : chant, basse, guitare acoustique, guitare électrique
Randall Miller : basse
Jacob Tomsky : batterie
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Photos © Edouard Thomas