La symphonie du nouveau monde par Roderick Cox, un concert résolument romantique au Festival de Radio France

Brahms face à son destin

Imaginons, un homme seul, immobile, face à la mer du Nord. En cet été 1868 Johannes Brahms songe à la composition de son Schicksalslied, le chant du destin. Il a découvert, chez un ami, le poème de Friedrich Hölderlin dans son roman Hypérion. Le roman évoque le destin tragique d’un poète de la Grèce antique mais Brahms va adoucir son sort grâce à l’espérance chrétienne. Pour interpréter Le Chant du destin le Chœur de l’Opéra National de Montpellier, sous la direction de la cheffe de chœur Noëlle Gény va rejoindre l’orchestre.
L’adagio initial débute par une lente complainte des violons. Les timbales grondent comme un bruit de fond sourd, inquiétant. Le chant du chœur, apporte lui, une quiétude, un sentiment de recueillement mais aussi de grandeur. Tout autre est l’allegro : les cordes se précipitent, renforcées par les cymbales. L’orchestre paraît sous le joug d’une menace imminente. Le chœur martèle les coups du destin. C’est une impressionnante tempête émotionnelle. Une tempête que Brahms va apaiser, la troisième partie purement instrumentale apporte un réconfort.

La romance pour Clara

Les accents brusques et rageurs ne durent que quelques mesures, comme pour conjurer un passé douloureux. Très vite le piano expose cette si belle mélodie qui va nous ravir pendant tout le premier mouvement. Le concerto pour piano de Schumann a été composé entre 1841 et 1845, une période plutôt heureuse pour le compositeur, récemment marié. Cette romance est dédiée à sa femme, Clara Schumann. Le jeune pianiste français Jonathan Fournel interprète le concerto avec une grande intensité émotionnelle, un sens du tragique, il va en amplifier le souffle romantique. Il nous apparaît tel un héros romantique. On penserait presque aux souffrances du jeune Werther…. L’intermezzo est tout aussi romantique. L’auditeur appréciera le subtil dialogue entre le soliste et l’orchestre, la légèreté du piano dans ses staccatos délicats. Cette musique traduit le regard attendri de Schumann sur sa jeune épouse. Le troisième mouvement est une envolée de notes, le rythme est enlevé, la joie éclate. L’interprétation de Jonathan Fournel est fougueuse, entraînant l’orchestre avec lui. Cet allegro vivace devient une apothéose, un triomphe de la vie, un hymne à l’amour.

Le dynamisme de l’Amérique

Le chef américain Roderick Cox dirige depuis septembre 2024 l’Orchestre National Montpellier. Ensemble, ils interprètent la Symphonie n°9 « Du Nouveau Monde » d’Antonin Dvorak. Nous sommes frappés par le calme et la prestance de Roderick Cox. Son interprétation est dynamique, mettant en valeur les contrastes. Après la douceur initiale des violoncelles puis le chant du cor, l’orchestre déploie toute sa puissance. La richesse et la modernité de l’orchestration apparaissent dès le premier mouvement. L’auditeur sera séduit par la musicalité du très célèbre 2ème mouvement. Il sera ému par les solos du cor puis du hautbois, par le duo des flûtes et des contrebasses. Après un scherzo molto vivace, joyeux, presque festif, le final est triomphant. Le compositeur était arrivé à New York l’année précédente, il était enthousiasmé par la découverte de l’Amérique. L’ambiance des deux derniers mouvements est américaine, presque hollywoodienne avant l’heure. En tout cas la symphonie du Nouveau Monde a été ovationnée par le public.