Un vrai vent d’Irlande a surgi sur la capitale : trois jeunes musiciens de Limerick, nouvelle sensation du rock celtique, faisaient escale à Paris. Cult.news est allé vérifier si ce fameux « gaoth » (le vent en irlandais) disait vrai… et en a profité pour leur poser quelques questions.
Il existe des moments rares dans la vie d’un passionné de musique : ceux où, en découvrant un nouveau disque ou un nouvel artiste, on se dit : « Là, c’est autre chose ».
Ce choc peut venir d’une œuvre qui casse les codes en ouvrant une nouvelle voie (Led Zeppelin, Rubber Soul des Beatles, Memoryhouse de Max Richter…), comme d’une approche fidèle à une tradition mais éclairée par un regard neuf, à l’image de Johnny Cash at Folsom Prison, Songs of Leonard Cohen ou Wide Open Spaces des Chicks.
C’est exactement ce que l’on ressent à la première écoute d’Halcyon, le premier album de Kingfishr. Dès ses premières notes, le trio se hisse parmi les grands, au côté de formations comme Fontaines D.C.
Avant même de produire Alcyon, Edmond McKeogh (chant, guitare), Eoghan McGrath (chant, banjo) et Eoin Fitzgibbon (chant, guitare) s’étaient offert un exercice peu commun : sortir un album live. Un choix qui prouvait déjà que la scène coulait dans leurs veines. Leur halte au Petit Bain n’était d’ailleurs pas une première parisienne : ils avaient foulé les planches des Étoiles le 26 mai dernier.
C’est donc sur cette barge surchauffée, prête à sombrer dans la Seine par le surpoids et où l’on entendait peu parler français, que le trio a pris possession des lieux. Avant même les premiers accords de « I Cried, I Wept », la salle était conquise. Edmond, doté d’un charisme naturel, déchaîne immédiatement la foule grâce à sa voix puissante, au timbre si typiquement irlandais.
Derrière eux, batteur, bassiste et claviers installent une rythmique impeccable. Et nous voilà aussitôt projetés dans l’arrière-salle d’un pub de Limerick, bières circulant de main en main pour alimenter les premiers rangs.
Sans reprendre son souffle, le groupe enchaîne avec « Shadow ». La ballade y perd peut-être l’orchestration du disque, mais gagne en énergie brute, un élan qui ne faiblira pas du concert. Le morceau met en lumière le talent d’Eoghan au banjo : même virtuosité lorsqu’il empoigne un bouzouki irlandais, dont les cordes doublées ajoutent une profonde couleur traditionnelle. Un talent confirmé sur « Heart in the Water », extrait de leur album live.
Les morceaux défilent à une cadence folle, « Gloria » en tête, entrecoupés de quelques anecdotes d’Edmond. Le spectacle se vit autant dans la salle que sur scène : le public chante à l’unisson, et le groupe finit même par se fondre dans la foule pour interpréter « Shot in the Dark » sans débordement, dans un respect mutuel palpable.
Difficile d’isoler un pic tant la prestation s’est révélée d’une énergie rare. « Man on the Moon » et leur tube « Killeagh » restent cependant gravés dans les esprits. En rappel, « Caroline » vient clore ce moment suspendu, sans doute l’une des plus belles compositions de leurs deux albums.
Ce concert prouve qu’à Kingfishr, le Petit Bain ne suffit plus : le trio est prêt pour le grand saut. Leur maîtrise scénique démontre qu’ils peuvent défendre leur magnifique Halcyon devant un public averti. Fiers gardiens de l’héritage celtique, ils savent aussi s’ouvrir à d’autres horizons : certaines pièces plus dramatiques comme « Blue Skies » ou « Someday » gagneraient encore en ampleur dans une salle plus vaste. On espère les y retrouver très vite.