Montreux Jazz Festival : Un soir d’évasion avec Mayra Andrade, Thibaut Cauvin & M-
par La redaction07.07.2024
La deuxième soirée du Montreux Jazz Festival réunit la chanteuse capverdienne Mayre Andrade et le duo français composé de Thibaut Cauvin & M- sur la scène du Casino. À l’abri de la pluie diluvienne qui s’abat sur la Scène du Lac, ces fortes personnalités artistiques nous offrent un moment de pure magie qui témoigne de la puissance du métissage musical.
Par David Tendon
Ce samedi, 6 juillet, une pluie torrentielle s’abat sur Montreux, retardant d’une heure et demie le concert de James Arthus sur la Scène du Lac. Avec un peu de schadenfreunde et surtout avec beaucoup d’enthousiasme, les spectateurs munis des billets pour Mayra Andrade et le duo Thibaut Cauvin & M- se se réfugient au Casino.
Devant un public attentif et heureux d’être au sec, le directeur du festival Mathieu Jaton, prend la parole pour rendre hommage au fondateur du Montreux Jazz, Claude Nobs, dans un discours teinté de nostalgie : « Revenir au casino de Montreux dans les racines du festival qui a été créé ici même en 1967 est symbolique pour nous, renouant avec les origines du festival. »
Mayra Andrade, figure charismatique de la scène capverdienne, inaugure la soirée avec une prestation empreinte d’une douce mélancolie et d’une belle énergie contagieuse. Devant un public captivé, elle livre une set list composée de ses classiques en créole du Cap-Vert, comme « Lua » et « Les mots d’amour, » ainsi que des titres plus récents de son cinquième album Manga, pour lequel elle a composé et écrit presque tous les titres. L’atmosphère intime du Casino Barrière, d’une capacité de 1 300 places, réputé pour son acoustique exceptionnelle était l’écrin parfait pour accueillir cette artiste autodidacte à la voix chaude et lumineuse.
En pleine performance, elle lâche une bombe d’actualité dans un Français parfait (Andrade a longtemps vécu à Paris) avec le sourire d’une conspiratrice : « La Suisse vient de perdre en quart de finale de l’Euro. » Quelques gémissements montent, mais sont rapidement noyés sous les rires et les applaudissements et l’ambiance dansante reprend de plus belle.
La seconde partie de la soirée a vu l’entrée en scène de Thibault Cauvin, sérénité tranquille et virtuose de la guitare classique, et -M- (Matthieu Chedid) l’énergie explosive de l’excentrique maître du rock français. La fusion de ces deux talents singuliers résulte en une performance époustouflante, riche en improvisations et en échanges musicaux complices entre une guitare classique et l’autre, électrique. La scénographie minimaliste, axée sur les guitares et agrémentée de projections subtiles, met en lumière la virtuosité et la créativité des artistes sans jamais détourner l’attention de leur musique.
Devant un public chaleureux et conquis, le duo français créé la magie d’un voyage instrumental inédit : mélangeant le classique et la pop, il nous fait découvrir des compositions inédites de leur nouvel album L’Heure Miroir, tout juste sorti, et des reprises audacieuses de classiques. « Qui de nous deux » résonne dans la salle avec une intensité renouvelée, tandis que des morceaux plus introspectifs plongent l’audience dans une contemplation musicale profonde. La virtuosité de Cauvin est magnifiquement équilibrée par la flamboyance de -M-, créant un spectacle qui défie les genres et les attentes.
Un moment marquant de leur performance a été l’échange de leurs guitares pour une dizaine de minutes. Une interaction non seulement inédite mais également révélatrice de leur complicité et capacité à explorer des territoires musicaux inhabituels avec une aisance déconcertante. La communion avec le public est tout aussi intense : les spectateurs – une mosaïque de nationalités et de générations – plonge dans cet univers musical unique avec abandon et leurs applaudissements appuyés témoignent d’une ferveur communicative rare.
En sortant de la salle, sous une pluie toujours aussi battante, les visages des spectateurs sont illuminés, preuve que la musique a le pouvoir de transcender toutes les intempéries et de réchauffer les cœurs, même les plus trempés.
Visuels : ©Thea Moser
