Montreux Jazz Festival : Black Sea Dahu et Asaf Avidan électrisent le public malgré la chaleur

Janine Cathrein attachante devant un public conquis d’avance

Black Sea Dahu, mené par la charismatique Janine Cathrein, ouvre la soirée avec une performance subtile mais poignante. Très communicante, la chanteuse (qui écrit et compose toutes ses chansons) séduit le public avec des anecdotes personnelles et une joie et une gratitude non-dissimulées devant l’enthousiasme chaleureux des spectateurs qui connaissent par cœur les paroles de ses chansons.

Une vraie success story suisse (prix du meilleur artiste suisse en 2019), le groupe indie-folk zurichois a été fondé par la chanteuse aux talents multiples avec le concours des membres de sa famille (sa sœur Vera à la basse et plusieurs autres instruments et son frère Simon au violoncelle), et ses amis. Le nom Dahu se réfère à une créature mythique qui ressemble à une chèvre de montagne.

Le public – un peu plus jeune que d’habitude – accompagne les tubes imprégnés de mélancolie, tels que « In Case I Fall for You » et  « Demian » en chantant avec Janine Cathrein ou du moins, en formant les mots  avec les lèvres. L’interprétation de « How You Swallowed Your Anger » a suscité une réaction particulièrement chaleureuse, chaque note résonnant avec une clarté cristalline grâce à une sonorisation impeccable.

L’Ovni israélien de la pop-rock fascine avec sa voix inimitable

Alors que la température dans la salle atteint des sommets, Asaf Avidan investit la scène, transformée pour l’occasion avec un coin salon pittoresque. Vêtu d’un ensemble chemise-cravate-bretelles, Avidan fait penser à un gangster romantique d’une Amérique des années 1940. Le public est instantanément séduit autant par son étonnante voix androgyne que par sa présence très incarnée.

Dès les premières notes de « Reckoning Song, » Avidan démontre une maîtrise vocale exceptionnelle, accompagnée d’une remarquable polyvalence instrumentale. Que ce soit avec ses classiques, par exemple, « Over You Blues » ou avec de nouveaux morceaux tels que « Not in Vain, » Asaf Avidan embarque le public dans une aventure tourbillonnante à travers le monde des émotions, une vraie montagne russe alternant la puissance brute et la délicatesse poignante.

Avidan est un orchestre à lui tout seul : il joue au piano, à la guitare, à une multitude de petites percussions, certaines attachées à ses chevilles. Entre les chansons, il partage avec les spectateurs des moments d’intimité, de vulnérabilité et d’humour. Avec un petit air de Cillian Murphy, Asaf Avidan évoque les « temps troubles » et appelle le public à « ne pas se réfugier dans la musique, mais à s’en servir pour se confronter à ses peurs, sa fragilité et son impotence, avant que ces émotions ne se transforment en quelque chose qui s’apparente à la colère ou la haine.»  Comme pour alléger ces propos sérieux et d’une actualité glaçante, il propose à un spectateur un verre de gin-tonic.

La performance solo de deux heures d’Asaf Avidan était une masterclass de précision et d’émotion. Sa voix, naviguant entre des hauteurs vertigineuses et des profondeurs gutturales, a maintenu le public en haleine. Les jeux de lumière, bien que minimalistes, ont accentué chaque moment clé de ce spectacle saississant et magistralement chorégraphié. La chaleur étouffante de la salle n’a fait qu’intensifier l’expérience transcendante qu’a vécu le public exalté et ému ce soir au Casino de Montreux.