Le cultissime club de jazz parisien recevait en ce samedi 1er juin glacial, le clarinettiste virtuose Mohamed Najem qui a réchauffé le printemps grâce aux titres de son dernier album, Jaffa Blossom.
Deux ans après Encounter, en duo avec l’accordéoniste Manfred Leuchter, le clarinettiste a sorti Jaffa Blossom en février dernier chez Bayard Musique. Et c’est donc en formation très classique qu’il se présente à nous, en quartet. Dès le premier morceau du concert, « Instant Love » aux accents à la fois klezmer et orientaux, Mohamed Najem trouble dans son jazz toutes ses identités, les réelles et les rêvées. Lui est né à Jérusalem et a grandi à Bethléem – peut-on faire plus symbolique – et a étudié la clarinette classique à Bethléem puis au CRR d’Angers. Ce premier titre est un excellent choix pour commencer, car il permet à la fois de montrer la technique empreinte de virtuosité, joliment soutenue par les pertinentes interactions avec Clément Prioul au piano, Arthur Henn à la contrebasse et Baptiste Castets.
Son jeu se pare de nombreux ornements, insistant sur les trilles qui donnent des allures de volutes à ses mélodies qui sentent bon la mélancolie des récits familiaux. Son superbe « Floor N°4 » aux allures de tango est un voyage direct vers les histoires que lui racontait son grand-père adoré, Ibrahim, sur Jaffa, sa ville de naissance.
Sa grande exigence et son statut d’enseignant se ressent parfois quand il cherche à nous faire chanter une mélodie, simple pour lui, mais impossible pour nous, ou quand il nous glisse des informations sur une « mesure à 11 »,« cassée » dit-il. Dans le moment de solos purs, le jazzman impressionne par la pureté et la finesse de son « son » et par son envie de transmettre.
Et cela passe aussi par la voix quand il reprend un tube de l’iconique chanteuse libanaise Fairuz, «El Bint El Shalabiya», ou qu’il s’empare d’une autre flûte, le ney, qui prouve qu’il peut tout jouer, et aussi, tout chanter, tant que cela l’amuse.
Jaffa Blossom est un album très libre, qui vous invite à dépasser toutes les frontières, grâce à l’amour et à la beauté.
Jaffa Blossom, Bayard Musique, 2024
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