Baptiste Trotignon présente Brexit Music au Duc des Lombards

Baptiste Trotignon

Une fois n’est pas coutume, Baptiste Trotignon a gardé ses chaussures en cette soirée du 4 avril sur la scène du fameux club de jazz de la rue des Lombards. Dans une tenue sobre et chic, nous l’observons parcourir le clavier avec exaltation. Quand il se met à jouer, c’est son corps tout entier qui s’agite. 

Propulsés irrémédiablement vers l’avant, les bras du pianiste semblent parcourus par un courant électrique. Dans un mouvement synchronisé, la tête, les épaules et les jambes ondulent au gré des fluctuations rythmiques. Tous les muscles sont mobilisés et impulsent un balancement dynamique, où les doigts sont jetés avec véhémence sur les touches. 

Cependant que la main droite explore avec une agilité et une précision ahurissante les hauteurs du clavier, la main gauche s’ancre dans les graves et offre ses accords majestueux. Quand tout à coup, dans une embardée rythmique improbable, la main gauche rejoint la droite et provoque une sorte de course poursuite, où tout s’accélère. Les doigts balaient les touches des graves aux aigus. Les harmonies se déploient dans un vrombissement crescendo qui électrise l’atmosphère et enchante le public. Le concert démarre avec « Money » des Pink Floyd revisité dans un élan pianistique inspiré.

Gautier Garrigue

Vêtu d’une chemise à motifs de circonstance et muni de ses balais métalliques ou de ses baguettes en bois, c’est selon, Gautier Garrigue déploie un jeu brillant à la batterie. A moitié caché derrière ses cymbales dorées, nous l’observons frapper avec une énergie folle sur son instrument et impulser une rythmique puissante. Sa tête oscille de gauche à droite et ses mèches rebelles dansent au gré de son jeu percussif saisissant. 

Yeux fermés, sourcils froncés et lèvres pincées, sa concentration semble maximale. Les cymbales valdinguent sous l’impact des baguettes et les sons métalliques résonnent avec éclat. Tout son corps semble fusionner avec son instrument. Dans une succession de sursauts irrépressibles, ses jambes s’animent en parfaite synchronisation avec les cymbales charleston, créant un effet visuel et sonore captivant. Les avant-bras produisent des accélérations prodigieuses et le public se régale du cliquetis impérieux de ses baguettes. Tout vibre puissance mille. Ça frémit, ça palpite, ça crépite dans un tempo effréné !

Viktor Nyberg 

Au milieu de la scène, entre le piano et la batterie, Viktor Nyberg, un grand blond au visage poupin, se tient bien droit derrière sa contrebasse. Marquant le rythme par un mouvement de tête précis, il pince les cordes avec une dextérité rare et fait résonner les graves dans l’espace. L’oreille collée au manche, comme s’il l’auscultait, il semble à l’affût de chaque note, de chaque vibration. De temps en temps, on l’observe jeter des coups d’œil furtifs de gauche à droite, vers ses partenaires à qui il sourit avec complicité. Les notes bondissent, joyeuses et primesautières, ou bien nous enveloppent de leur son chaud et hypnotique.

Le trio nous offrira un très beau concert dont les titres revus comme « Karma Police » de Radiohead, « Drive my car » des Beatles ou encore « We are the champions » de Queen continueront de nous envoûter longtemps. Mention spéciale pour leur version magnifique d’« Almost blue » d’Elvis Costello qui a plongé l’auditoire dans un moment de pure beauté.