Le 7 septembre 2023, dans le cadre du Festival Jazz à la Villette, la Cité de la musique mettait à l’honneur le pianiste cubain Gonzalo Rubalcaba et le saxophoniste alto français Pierrick Pédron. Pour l’occasion, ils nous ont présenté leur dernier opus intitulé Pédron Rubalcaba (Gazebo), sorti en mars 2023, dont les arrangements ont été signés par Laurent Courthaliac. Retour sur un concert événement.
Véritable joyau architectural de la scène musicale situé au cœur du Parc de la Villette, la Cité de la Musique offre un cadre unique aux mélomanes parisiens. Agrémentée de sièges confortables et d’une acoustique exceptionnelle, elle crée une atmosphère chaleureuse où la musique s’écoute dans des conditions optimales. Au centre de la scène baignée de lumières douces trône un magnifique Steinway noir.
Tout de blanc vêtu, dans un halo d’élégance et de pureté, Gonzalo Rubalcaba s’installe au piano et commence à jouer « Folks Who Live on the Hill ». Toucher de velours, notes cristallines, technique redoutable, l’auditoire est immédiatement captivé. Derrière son pupitre sur l’avant-scène, Pierrick Pédron, habillé de noir, souffle dans un saxophone alto rutilant sous les projecteurs. Il émet un son très feutré, d’une douceur infinie et l’on entend les deux instruments instaurer un dialogue merveilleux.
Le piano produit une base harmonique d’une grande richesse. Les arpèges, poétiques et virtuoses, sont joués avec une sensibilité extraordinaire. La ligne mélodique entraîne l’auditeur dans un voyage empreint de beauté et d’un raffinement extrême. Telle la double hélice de l’ADN, piano et saxophone façonnent une structure fondamentale où les sons s’enchevêtrent majestueusement.
Après Jerome Kern, c’est au tour de Sidney Bechet d’investir les lieux avec « Si tu vois ma mère », transportant l’auditoire dans les rues animées de la Nouvelle-Orléans. Le saxophone alto danse avec agilité sur les notes du piano, évoquant l’esprit enjoué du jazz traditionnel. Les variations de tempos ajoutent une dimension dynamique à leur dialogue, instaurant un climat exaltant. Doté d’une agilité hors norme lui permettant d’exécuter des passages d’une rapidité hallucinante, Pierrick Pédron embarque le public dans ses envolées lyriques inspirées.
« Ezz-Thetic » de George Russel nous entraîne alors dans une sorte de course poursuite frénétique où les notes se bousculent presque. Le jeu de Gonzalo Rubalcaba semble relever de la prestidigitation, superposant moult motifs rythmiques complexes avec une aisance déconcertante. Il conjugue avec une virtuosité remarquable grâce, rapidité et précision. Le résultat est bluffant.
Mention spéciale pour l’interprétation magistrale de « Lawns », de Carla Bley dont les accords suaves ont fait vibrer la salle. « The Song Is You », « Dreamsville », « Five Will Get You Ten », « Pretty Girls » complèteront le répertoire riche et varié de cette soirée forte en émotions.
Tellement plus qu’un concert.
Visuel : © GE