Le 29 mars dernier, la vague country a déferlé sur le monde. L’album Renaissance Act II – Cowboy Carter de Beyoncé a dépoussiéré autoradios et autres diffuseurs, soufflant le vent révolutionnaire de la renaissance.
Elle a été boudée, la Texane. Critiquée, jugée, attendue au tournant de la route 66 après avoir révélé, dans la nuit du 11 au 12 février 2024, à l’occasion du Super Bowl, deux nouveaux titres, Texas Hold’em et 16 Carriages, annonciateurs d’un nouvel album, le deuxième opus de sa Renaissance. Ces deux premiers titres ont été largement critiqués par les communautés country et des radios spécialisées ont même refusé leur diffusion. Après la sortie ce 29 mars de l’album, le pied de nez est total…
Queen B n’a pas besoin de diffuseur, elle est sa propre radio. Ce nouvel opus, composé de morceaux inédits et de reprises de titres phares, est construit… comme une radio ! De nombreux midtempo et interludes laissent les plus grandes stars du genre, comme Dolly Parton, introduire les morceaux teintés de mille références à l’histoire de la country.
Littéralement embarqué sur les routes, l’autoradio clame les good vibrations, et on se laisse guider sur ce terrain musical trop méconnu. Manifeste, l’album est intime et politique, contenant de nombreux témoignages autobiographiques sur la vie de la chanteuse, citons par exemple sa fabuleuse déclaration, Protector, à sa fille, Rumi. L’album parle aussi, et surtout, de la réappropriation culturelle. La country, avant d’être l’apanage de cowboy blanc, est une musique noire-américaine, héritière des enfants de l’esclavage.
Cette épopée est, en elle-même, loin d’être une surprise : Beyoncé avait déjà renoué avec ses racines, en 2016, dans l’album Lemonade avec les titres Hold Up et Daddy Lessons. La stupeur réside en revanche dans le degré d’implication et d’hybridation. L’album ne se cantonne pas aux simples reprises et hommages. L’album ne se contente pas d’être un album de country, ou même un album Beyoncé. Il est une pièce artistique novatrice dont on va mettre des mois, peut-être des années, à mesurer le degré d’imbrication.
Cowboy (Beyoncé) Carter contient certes toute l’histoire de la country music avec la présence des papesses et papes du genre, ainsi que la critique de l’invisibilisation de ces racines noires américaines, mais il renferme aussi l’histoire des Etats-Unis d’Amérique, et celle de notre époque. La Queen déploie la country et la twiste à coup de gospel opératique, de trap rappé, de house follement soul, de r’n’b totalement folk, nous parle des années hippies et des enjeux de notre décennie, d’amour et de parentalité, d’émancipation et de politique, de foi et joie. Une seule question subsiste : que nous réserve-t-elle pour l’act III ?
La pochette du nouvel album de Beyoncé, « Cowboy Carter » (© Parkwood/Columbia/Sony, AP), Album disponible sur toutes les plateformes.