Mêler le répertoire baroque à la musique congolaise populaire, en passant par le jazz et le rock… Le chorégraphe Alain Platel, le compositeur Fabrizio Cassol et le guitariste et bassiste Rodriguez Vangama partagent leurs talents dans une pièce musicale enchanteresse unifiant danse et musique. Représenté à la Maison des Arts et de la Culture dans le cadre de la Biennale de danse du Val-de-Marne.
Coup fatal convoque tous les arts. La composition musicale, la chorégraphie, la mise en scène, le décor et les costumes, les éléments se côtoient à merveille, érigeant une pièce à l’énergie contagieuse. Avant tout une prouesse musicale, la composition de Fabrizio Cassol et Rodriguez Vangama fusionne le répertoire baroque européen et les sonorités traditionnelles congolaises. Haendel, Gluck, Monteverdi, Vivaldi ou encore Bach s’harmonisent avec le likembe, puis avec le jazz de Nina Simone et le rock électrique de Rodriguez Vangama. Une effervescence sonore qui ne s’oublie pas ! Et pour cause, la pièce est jouée depuis 2014.
Ce dialogue ne se limite pas aux genres musicaux. Les musiciens, les danseurs, les chanteurs, tous se répondent, s’invitent et se racontent. Ils se regardent et s’admirent, parfois se moquent. Unie avec la composition musicale, la danse chorégraphiée par Alain Platel, matérialise sur scène un hommage rafraîchissant et fulgurant.
Impassible, le guitariste Rodriguez Vangama dirige l’orchestre tout le long de la pièce avec une élégance assurée. Autour de lui, les interprètes, des virtuoses de la danse et de la musique, font impression à leur tour. Leurs gestes convoitent, sans prétention, la beauté et l’ironie. Une seule femme apparait dans la pièce : d’abord discrète puis pulvérisante, elle s’empare de la scène avec éclat. Une féminisation de la pièce, qui apparait aujourd’hui nécessaire.
Le décor aux tons bleus et dorés, composé des chaises bleues made in China et un rideau de scène, conçu par le plasticien Freddy Tsimba avec des déchets de guerre, ancre le paysage en République Démocratique du Congo. Ce rideau qui arbore le statut de décor et une fois celui d’instrument sublime la scène. La mise en scène semble parfois emprunter aux codes de la comédie musicale. Les chants et la danse transportent, émeuvent et font rire. On pense alors à Hair et ses costumes, ses danses énergiques et Nina Simone…
Coup fatal habille les interprètes de costumes rappelant sans aucun doute les années 70. L’apparition finale de la S.A.P.E. (Société des Ambianceurs et Personnes Élégantes) rappelle l’élégance et l’extravagance des « sapeurs » de Kinshasa. Avec coquetterie et compliments bien mérités, tous les interprètes paradent à leur gré sur la scène.
Une fin immense (bien heureusement !), où « Young gifted and black » de Nina Simone est fièrement reprise, et des airs musicaux qui restent et reviennent volontiers en tête. Entre poésie, joie et grâce, la pièce est une preuve que l’harmonie est toujours accessible, lorsque le talent est invité.
Visuel : ©Chris Van der Burght
Direction musicale : Fabrizio Cassol
Direction artistique et mise en scène : Alain Platel
Chef d’orchestre : Rodriguez Vangama
Compositions : Fabrizio Cassol, Rodriguez Vangama d’après Händel, Vivaldi, Bach, Monteverdi, Gluck.
Avec Stephen Diaz (contre-ténor), Russell Tshiebua (vocal), Bule Mpanya (vocal), Fredy Massamba (vocals), Deb’s Bukaka (balafon), Tister Ikomo (xylophone), Cédrick Buya (percussions), Bouton Kalanda (likembe), Silva Makengo (likembe), Erick Ngoya (likembe), Brensley Manzodulua (guitare), Évry Madiamba (percussions et calebasse) et Rodriguez Vangama (guitare électrique, balafon)
Avec la collaboration de Coup Fatal
Scénographie : Freddy Tsimba
Lumière : Carlo Bourguignon
Son : Guillaume Desmet
Costumes : Dorine Demuynck