Les cris de Paris investissent la cathédrale Saint Pierre de Saintes

Les responsables de l’abbaye aux dames ont eu une excellente idée en invitant ce très bel ensemble qui a monté un programme autour de la polyphonie. Ce sont donc seize chanteurs qui se sont installés devant le maître autel de la cathédrale avec une basse continue bien fournie et deux violons. Si Claudio Monteverdi (1567-1643) est bien représenté dans ce beau programme, on y trouve aussi des compositeurs contemporains du père de l’opéra tel que nous le connaissons.

Le concert débute par Canzonetta spirituale sopra alla nanna : Hor ch’è tempo di dormire, une œuvre de Tarquino Mérula (1595-1665), interprétée par l’excellente soprano japonaise Michiko Takahashi. La voix éclatante de Takahashi parfaitement maîtrisée passe dans la cathédrale sans efforts même si le texte, lui, passe beaucoup moins bien. La pièce suivante est un Crucifixus de Claudio Monteverdi (1567-1743) pour quatre voix d’hommes ; c’est à partir de ce moment la que Geoffroy Jourdain arrive et dirige chanteurs et musiciens. Les quatre voix se marient à merveille sous la direction avisée de Jourdain qui utilise des tempos et des nuances idéaux. Mais Geoffroy Jourdain a aussi programmé des madrigaux pour deux, six, dix ou seize voix qui permettent à chacun de s’exprimer. Nous avons ainsi le privilège de découvrir des œuvres de Giovanni Legrenzi (1626-1690), dont nous avons d’ailleurs écouté un charmant motet chanté par deux très belles sopranos (« Dialogo delle due Marie : Quam amarum est Maria ; Harmonia d’affetti devoti, Libro primo, 1655 »), Antonio Lotti (1667-1740), Antonio Caldara (1670-1736) dont nous avons pu admirer le très beau Crucifixus à seize voix, Francesco Cavallli (1602-1676)… Autant de compositeurs qui ont laissé des œuvres de toute beauté. Mais l’orchestre n’a pas été oublié puisque Goeffroy Jourdain a programmé des œuvres qui les mettent en valeur. C’est avec une ritournelle extraite de Selva morale e spirituale 1640-1641 de Claudio Monteverdi que les musiciens des Cris de Paris commencent leur programme « personnel » ; mais c’est surtout la sinfonia de l’acte II de l’Orfeo de Monteverdi qui marque les esprits. Si l’orchestre interprète avec talent un Cantate Domino (extrait de Selva morale e sprituale) de Monteverdi arrangé pour orchestre c’est le théorbiste Bruno Hellstroffer qui a l’honneur de terminer le concert en interprétant avec talent et une belle simplicité une œuvre de Biaggio Marini (1594-1663) : Pretirata (Da Capo).

Les cris de Paris et Geoffroy Jourdain ont proposé un concert de très belle tenue à un public venu nombreux. Avec seize voix magnifiques et un orchestre très inspirés, l’ensemble de Geoffroy Jourdain a fait honneur aux compositeurs italiens que cet excellent chef a choisi de présenter. On ne peut d’ailleurs que saluer le travail de recherche de Jourdain qui a sorti certains d’entre eux de l’oubli. La soirée s’achève sur la reprise de l’Adoramus Te de Monteverdi qui avait été présenté en milieu de programme.