Le Messie par les Arts florissants à Fontevraud

Créé en 1742 à Londres, Le Messie de Georg Friedrich Händel (1685-1759) a rapidement connu le succès. La lecture de Paul Agnew et des Arts florissants du chef-d’œuvre d’Haendel a remporté un grand succès en ce dimanche pluvieux de décembre.

Depuis quelques années, l’Abbaye royale de Fontevraud et Les arts florissants s’associent pour donner trois ou quatre concerts pendant la période de l’avent. Pour l’avent 2023, le dernier des trois concerts des Arts Florissants était donné le dimanche 10 décembre avec un monument de l’histoire de la musique : Le Messie de Georg friedrich Haendel (1685-1759). Pour l’occasion, c’est Paul Agnew, codirecteur musical de l’ensemble depuis 2020, qui dirigeait l’orchestre et le chœur des Arts florissants et qui chantait également la partie de ténor du  chef-d’œuvre d’Haendel. L’église abbatiale, décorée aux couleurs de noël, notamment avec de beaux sapins scintillants, pour l’occasion, était bondée, tant l’œuvre au programme et l’ensemble invité sont prestigieux.  

L’ensemble des artistes arrive sur le plateau, installé devant l’entrée principale de l’église, par les nefs latérales, pour le plus grand plaisir du public. Si on peut regretter que les solistes soient installés à une place qui les laisse invisibles au public, la disposition de l’orchestre et du chœur nous permet de profiter totalement des voix et de la musique. Dès les premières notes de l’ouverture, Paul Agnew donne le ton de la soirée : Le messie sera interprété avec dynamisme. Paul Agnew dirige avec une fermeté et une précision peu communes ; si l’ouverture est exécutée avec beaucoup de panache, le récitatif et l’air qui suit « Comfort ye … Every valley … » sont interprétés avec panache par un Paul Agnew très en voix. Le trio de solistes qui l’accompagne est tout aussi survolté par le défi que constitue Le Messie. La jeune et séduisante soprano portugaise Ana Vieira Leite est issue du Jardin des voix initié il y a quelques années par William Christie. La jeune femme assume crânement une partition difficile ; quant à la voix, elle est parfaitement maîtrisée. La tessiture ample, le médium généreux, les aigus insolents séduisent un public venu nombreux en ce froid dimanche de décembre. Mais l’autre grande triomphatrice de la soirée, avec Paul Agnew, est bien la très belle et très chevronnée alto Lucile Richardot qui chante chaque récitatif, chaque air  avec talent. Des graves aux aigus, la voix de l’alto ne montre aucune faiblesse ; Richardot rend justice avec panache à Haendel et à son chef-d’œuvre. Le baryton anglais Andrew Foster-Williams complète avec une belle élégance cette très belle distribution ; la voix ferme et assurée, quoique peu puissante, est fort agréable à écouter. Le chœur des Arts Florissants, parfaitement préparé par son chef livre une performance exceptionnelle. Haendel n’a pas lésiné quant à la partition qu’il a préparé pour le chœur qui est très sollicité ; le point d’orgue de l’oratorio étant bien évidemment l’Hallelujah qui est interprété avec une vigueur remarquable par l’orchestre et le chœur visiblement survolté. Si nous avons apprécié l’excellente acoustique de l’église abbatiale, nous regrettons que le texte peine à passer la rampe. Néanmoins, la diction est parfaite aussi bien pour les solistes que pour le chœur qui ont beaucoup travaillé en amont aussi bien sur la partition que sur le texte.

C’est un concert somptueux que Les Arts florissants ont donné en ce deuxième dimanche de l’avent. Le Messie qui est une œuvre majeure du répertoire de la musique baroque anglaise, a trouvé là l’un de ses plus beaux avocats. On ne peut qu’apprécier que Paul Agnew ait donné sa chance à la jeune et séduisante soprano portugaise Ana Vieira-Leite qui, issue du Jardin des Voix (édition 2021) semble promise à une très belle carrière. Mais l’artiste principal du Messie est bien le chœur, et celui des Arts florissants a fait des merveilles. Le public ne s’y est pas trompé en réservant une ovation debout à l’ensemble des artistes présents dans l’église abbatiale de l’abbaye royale de Fontevraud. Pour autant, ce ne sont pas des bis qui ont terminé le concert, mais la reprise de deux extraits du Messie par le public lui-même accompagné par le chœur, qui s’était installé dans les nefs latérales pour l’occasion, et par l’orchestre : Since by man came death et Hallelujah.