Amihai Grosz, Alexandre Bloch et l’Orchestre National de Lille jouent Bartok & Sibelius

Bartok vivant

Très prolixe dans sa discographie, l’Orchestre National de Lille vient de sortir chez alpha classics un disque Bartok avec deux de ses œuvres. D’abord le concerto pour orchestre dans lequel Alexandre Bloch avait dirigé l’Orchestre de National de Lille à leur première rencontre en 2014. Ensuite le concerto pour alto que le soliste Amihai Grosz a enregistré avec l’Orchestre. Alexandre Bloch nous fait remarquer que, d’habitude, l’Orchestre joue des œuvres en public avant de les graver et que cette fois-ci, l’enregistrement a précédé le live. Un « live » qui porte bien son nom, tant la soirée était vivante, notamment pour le concerto  de 1949 que Bartok, atteint d’une leucémie et mort en 1945, n’a pas pu finir lui même… Dans l’interprétation que nous proposent l’Orchestre National de Lille et Amihai Grosz, l’intensité de Bartok est transmise. L’alto trône en majesté, dans le premier mouvement, face aux pizzicati lents et sourds de l’orchestre et l’énergie monte. Au fur et à mesure que l’on s’immerge dans l’œuvre, la complicité entre le soliste et l’orchestre semble croître et l’on termine dans un véritable éclat.

Pour le bis, le chef est passé derrière le nouveau piano Steinway de l’Orchestre et l’alto est allé à ses côtés. En référence à l’actualité, ils ont choisi et lu un poème de l’agent britannique Hannah Szenes, entrainée en Palestine par les Britanniques puis parachutée en Europe où elle a été agent de liaison. Arrêté et déportée, morte pendant la Guerre, elle avait continué à écrire des poèmes lors de sa captivité. Parmi les plus célèbres : « Eli, Eli », mis en musique par David Zahavi.

Le flow de Sibélius

Après ce bis émouvant, l’Orchestre National de Lille nous a fait entrer dans la 2e symphonie de Sibelius (1902) comme dans un navire balloté par des flots déchaînés. D’une durée de 45 minutes, encore très inspirée de Tchaïkovski, cette œuvre impressionnante propose des motifs forts qui reviennent nous bercer. À la baguette, Alexandre Bloch danse quasiment tout le temps : c’est avec tout son corps qu’il dirige l’orchestre dans cette matière musicale riche. Tout commence par un réveil bucolique du premier mouvement. Puis les pizzicati des basses apportent de la solennité, rehaussée par la vivacité des flûtes. Les violons entrent dans la ronde et c’est superbe. On est en plein romantisme, et tout s’emballe dans le 3e mouvement pour arriver à une acmé digne des plus grandes symphonies allemandes du 19e siècle.

Très attentif, le public applaudit à tout rompre l’orchestre heureux et fatigué comme au sortir d’un marathon. Il n’y a pas de bord de scène ce soir, mais le public va faire signer le disque par Amihai Grosz et Alexandre Bloch. Les prochaines œuvres de Sibelius au programme de cette saison sont la symphonie n°5, la symphonie n°7 et le concerto pour violon avec  Alena Baeva.