A la Maison de la Radio « Philhar’Intime » avec Nikolaï Lugansky dans Henri Dutilleux et César Franck

par Hannah Starman
22.01.2025

Ce dimanche 19 janvier, devant un auditorium comble, les musiciens de l’Orchestre Philharmonique de Radio France et le pianiste Nikolaï Lugansky nous offrent un programme de chambre intime, aérien et minutieusement exécuté. Un vrai régal !

Quatuor à cordes Ainsi la nuit d’Henri Dutilleux

Composée entre 1971 et 1976, Ainsi la nuit est considérée comme l’une des œuvres majeures du répertoire pour quatuor du XXe siècle. Commandée par la Fondation Serge Koussevitzky pour le Julliard String Quartet qui créera l’œuvre aux États-Unis le 13 avril 1978, quelques mois après la création française, réalisée par le Quatuor Parrenin le 6 janvier 1977 à Paris. Ainsi la nuit a connu un succès instantané, fait rare pour une œuvre contemporaine.

Dutilleux s’est inspiré des quatuors à cordes de Beethoven et Bartók, ainsi que des Six Bagatelles de Webern. Ainsi la nuit explore est basée sur une série d’études qui se concentrent sur des différents aspects de la production sonore : pizzicatos, contrastes, dynamiques, etc. Les sept sections sont reliées entre elles par des passerelles qui forment un ensemble cohérent autour du thème de la mémoire.

Ce soir, quatre musiciennes de l’Orchestre Philharmonique de Radio France ont restitué avec justesse, fougue et finesse le langage très personnel, poétique, subtil et innovateur d’Henri Dutilleux. Le premier violon solo depuis 1996, la Franco-Canadienne, Hélène Collerette, la première cheffe d’attaque des seconds violons, Cécile Agator, l’altiste Elodie Guillot et la violoncelliste Marion Gailland ont été chaleureusement remerciées pour leur captivante prestation.

Quintette en fa mineur de César Franck

Après l’entracte, le pianiste russe Nikolaï Lugansky rejoint Hélène Collerette, Cécile Agator, Elodie Guillot et Marion Gailland sur scène pour la deuxième partie du programme : le Quintette pour piano et quatuor à cordes de César Franck.

Composé en 1879 et dédié à Camille Saint-Saëns, le Quintette est l’une des pièces emblématiques de la musique de chambre française du XIXe siècle. L’œuvre est d’autant plus célèbre que le compositeur a repris certaines tournures mélodiques dans la Sonate pour violon et piano (1886), l’œuvre la plus jouée de Franck et le modèle pour la Sonate de Vinteuil qui marque musicalement À la recherche du temps perdu de Marcel Proust.

Le Quintette a été créé le 17 janvier 1880 à la Société nationale de musique par le quatuor Marsick avec Saint-Saëns au piano. Claude Debussy était enchanté par cette œuvre à la fois dramatique, à la fois passionnée et élégiaque et construite sur un dialogue complexe entre le piano et les instruments à cordes qui suit une dramaturgie musicale tendue et soigneusement ficelée.

Nikolaï Lugansky est un remarquable interprète de César Franck, compositeur exigeant et raffiné. Le pianiste, qui a enregistré les Préludes, Fugues et Chorals de Franck en 2020, possède toutes les qualités requises pour nous livrer une impeccable interprétation de Franck et nous n’avons pas été déçus. D’autant plus qu’il dialogue avec des musiciennes du Philhar qui sont sur la même longueur d’onde. Le Quintette que nous avons entendu ce soir est un bijou captivant et un exercice d’équilibre fort réussi entre la poésie et la fugue.

Visuel : © Marco Borggreve