Trois gros livres, passionnants, réunissant différents spécialistes, se penchent sur l’histoire de France, les colonisations et les théories féministes.
Première somme, premiers chiffres : 100 spécialistes (historiens, historiens de l’art, juristes, sociologues, économistes…) réunis autour de 100 chapitres et 340 éclairages pour parler de l’histoire de France. Découpé en quatre chapitres (« Régime et violences », « Politiques et spiritualités », « Espaces et sociétés » et « Patrimoines et identités »), le livre brasse large et cherche à englober la totalité de l’histoire de France. Des Francs à l’« Histoire, une passion française », en passant par la gastronomie, la mode, l’agriculture, les classes sociales, les villes, la Commune de Paris, etc., cette Nouvelle histoire de France adopte une approche originale, qui permettra à chacun de piocher en fonction de ses affinités du moment. Le lecteur pourra osciller entre une approche chronologique et des approches thématiques. En cela, le livre reste donc plus à offrir à celles et ceux qui s’intéressent déjà à l’histoire de France, plutôt qu’aux néophytes. Nouvelle histoire de France n’en reste pas moins passionnant à lire, et peut se targuer de figurer aux côtés de l’Histoire mondiale de la France de Patrick Boucheron.
Toujours dans cette perspective de totaliser un vaste sujet, Pierre Singaravélou a réuni plus de 250 chercheurs autour des « colonisations » (le pluriel étant important). L’ouvrage englobe l’histoire des colonisations et des décolonisations, mais aussi celle précédent la colonisation même. Colonisations vise, comme l’ouvrage cité plus haut, à traiter tous les sujets : politiques, économiques, culturels, sociaux, mémoriaux, etc. Un chapitre est également consacré à l’historiographie du sujet, « L’histoire de la colonisation aujourd’hui » puisque, comme le dit Pierre Singaravélou en ouverture, « le passé colonial aura comme nul autre enfiévré le débat public, justifié d’innombrables affrontements politiques, nourri les divisions identitaires et mémorielles. » La lecture se révèle exigeante. Le point de vue du colonisateur français, soi-disant pétri de bonnes intentions et d’une mission civilisatrice, est vite remis en question avec la réalité du terrain.
La parution de Théories féministes sous la direction de Camille Froidevaux-Metterie fut un des événements de la rentrée littéraire de septembre. Sur la première de couverture figurent quelques thèmes abordés : patriarcat, féminismes noirs, désirs, travail reproductif, lesbianisme, justice, féminicides, écoféminismes, intersectionnalité, queer, validisme, révolution… Là aussi, l’ouvrage brasse large. Comme l’explique en introduction la philosophe féministe et professeure de science politique, « réunir et présenter dans un même ouvrage les théories féministes dans toute leur diversité et toute leur étendue, c’est en révéler la puissance politique et la cohérence intellectuelle par-delà les antagonismes. » Pensé comme un livre de résistance, le livre convoque des figures tutélaires comme Simone de Beauvoir, Judith Butler, bell hooks, etc. pour mieux montrer la diversité de la pensée féministe et des luttes permanentes. Les 130 textes du volume mélangent histoire, sociologie, philosophie ou encore économie pour un « féminisme des alliances » (Marie Garrau).
Nouvelle histoire de France, sous la direction de Eric ANCEAU, Passés/Composés, 1104 pages, 36 €
Colonisations. Notre histoire, sous la direction de Pierre SINGARAVELOU, Points Histoire, 1224 pages, 16,90 €
Théories féministes, Collectif sous la direction de Camille FROIDEVAUX-METTERIE, Seuil, 768 pages, 27 €
Visuel : © Couvertures des trois livres