Professeur d’économie à Paris VIII et co-directeur de l’axe « Politiques socio-fiscales » du LIEPP à Sciences Po, Clément Carbonnier remet en cause quarante ans de politiques imputant au « coût du travail » le fort taux de chômage et le ralentissement de la croissance.
C’est moins le discours patronal qu’il analyse que la réalité des politiques publiques et des responsables politiques. Il commence tout d’abord par un rapide historique des pensées politiques dominantes depuis la Seconde Guerre mondiale, du consensus keynésien qui régnait alors à la diffusion de la doxa libérale articulée autour d’une nécessaire baisse du « coût du travail ». Ce dernier s’inscrirait dans l’ensemble des politiques de protection sociale, des différents mécanismes d’indemnisation du chômage à la retraite par répartition.
Clément Carbonnier s’attelle ensuite à montrer l’inanité de ce discours : aucune étude ne montre d’impact positif sur les embauches d’une baisse des cotisations patronales, ni de politiques comme le CICE. En revanche, insiste-t-il, ce dernier n’aurait eu d’incidence que sur les salaires hauts et moyens, à l’encontre des éléments de communication visant à le légitimer. Dès lors, pourquoi le maintenir ? Et, surtout, pourquoi défendre bec et ongles une théorie invalidée par la pratique ?
Outre l’uniformisation des formations en la matière, l’économiste rappelle que cet affaiblissement des aides sociales a surtout un effet anti-redistributif et inégalitaire, participant à une concentration des richesses.
Le chercheur s’appuie dans son ouvrage sur ses propres études des politiques fiscales, menées notamment avec Bruno Palier, Nathalie Morel et Michaël Zemmour, mais aussi sur les travaux de nombreux.ses autres. Il contribue ainsi à faire connaitre au grand public certaines enquêtes peu médiatisées, qui bénéficient ainsi d’un salutaire coup de projecteur.
Toujours moins ! L’obsession du coût du travail ou l’impasse stratégique du capitalisme français, Clément Carbonnier, La Découverte, 2025, 20€.
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