Les éditions Le Bélial’ publient dans leur collection « Une heure-lumière » de courts romans de genre (science-fiction, fantastique…). Sweet Harmony de Claire North et De l’espace et du temps d’Alastair Reynolds convoquent culte de la beauté et recherche à tout prix de la connaissance.
À vingt-huit ans, tout semble réussir à Harmony Meads dans ce Londres légèrement dystopique. Incroyablement belle, la jeune femme multiplie les ventes pour l’agence immobilière où elle est employée. Mais la chute de l’ange est corrélée à son degré de pureté, et celle d’Harmony Meads sera violente. Peu à peu, son corps se dérègle. Les nanos qui assurent le développement et la réorganisation de son corps selon ses désirs cessent un à un de fonctionner. Et pour cause, Harmony n’a plus un sou et les extensions, payées au prix fort, se désactivent peu à peu.
En un court roman, Claire North arrive à faire le portrait désespéré d’une femme prête à tout pour renvoyer une image de rêve. Cherchant à s’échapper de la classe moyenne d’où elle vient, à plaire à un petit ami toxique qui ne cherche qu’à en faire sa chose (« Compte tenu du temps que j’ai passé à travailler dessus, je dirais que c’est notre corps. »), Harmony se fait des nœuds au cerveau pour essayer de joindre les deux bouts, calculant sans cesse l’argent dont elle dispose. On reste également intrigué et fasciné par la technologie des nanos aux offres illimitées (« Avez-vous jamais eu envie d’une peau parfaite ? Craignez-vous de tomber enceinte ? Les cheveux plus épais ? Les dents blanches ! Soutien pancréatique pour toutes ces sucreries… »).
John Renfrew aide tranquillement sa collègue Katrina Solovyova à mourir. Mais John est maintenant le seul être humain sur Mars, et peut-être même le seul être humain tout court, un virus militarisé ayant commencé à faucher un à un les habitants de la Planète bleue dès juin 2038. Pour ne pas devenir fou, John s’adonne à une routine inintéressante mais néanmoins nécessaire, alors que des visions lui apparaissent peu à peu, et notamment celle d’un certain Elton John. Alors Renfrew se sent investit d’une mission : « Il était désormais certain d’être le dernier homme en vie, après avoir abandonné tout espoir qu’il reste des survivants sur Terre. N’était-il donc pas obligé, en définitive, de découvrir ce que signifiait être humain, de parvenir à une ultime synthèse de tous les sujets évoqués dans les livres à sa disposition ? »
La première moitié de De l’espace et du temps semble tout à fait classique, entre hommage aux projets de terraformation de la planète rouge et liens à effectuer avec le film de Ridley Scott, Seul sur mars, bien que ce dernier date de 2015 et la nouvelle d’Alastair Reynolds de 2005. Mais un retournement de situation apporte une touche Hard SF qui n’est pas là pour nous déplaire, tandis que Renfrew multiplie les recherches pour appréhender l’espace et le temps, au risque de perdre son humanité.
Sweet Harmony, Claire NORTH, traduit de l’anglais par Michel Pagel, Le Bélial, Collection « Une heure-lumière », 160 pages, 11,90 €
De l’espace et du temps, Alastair REYNOLDS, traduit de l’anglais par Laurent QUEYSSI, Le Bélial, Collection « Une heure-lumière », 112 pages, 10,90 €
Visuel : Couverture de © De l’espace et du temps