Véritable succès au Japon (le bandeau du livre indique fièrement « Le thriller japonais phénomène aux 2 millions de lecteurs »), Strange Pictures est un thriller à la forme original, bien qu’un peu trop tiré par les cheveux et à la langue pauvre.
En 2014, Shûhei Sasaki et Kurihara, membres du « Cercle Occulte » de leur université, décident de décoder un mystérieux blog tenu par un inconnu entre 2008 et 2012. Le blog contient notamment d’étranges dessins qui renferment sûrement une signification cachée. Dans la deuxième histoire, « L’appartement barbouillé », le jeune Yûta quitte en pleine nuit l’appartement familial qu’il partage avec sa mère, après avoir dessiné en classe son immeuble recouvert d’une inquiétant tache grise. Dans « Le dernier dessin du professeur d’arts plastiques », le corps d’un professeur d’arts plastiques, homme peu aimé, est découvert en 1992 sur un sentier de randonnée. Le seul message laissé est un dessin sur un ticket de caisse représentant les montages environnants.
Alors qu’on croit, au début de la seconde histoire, avoir affaire là à un recueil de nouvelles, les récits de Strange Pictures vont finalement se recouper, comme dans tout bon thriller. Tel personnage en arrière-plan de telle histoire apparaît alors comme protagoniste principal dans une autre. Uketsu, écrivain le plus vendu au Japon dont Seuil fait paraître en France son troisième roman, s’amuse à brouiller les pistes. On apprécie aussi fortement le côté ludique du livre où chaque dessin est disséqué, scruté, ausculté pour en tirer la substantifique moelle. Chaque dessin est analysé via le test dit des « dessins projectifs » où « on interprète la personnalité d’un patient à partir de dessins qu’on lui demande de réaliser ».
Si le concept est amusant et entraîne le lecteur dans le jeu, il faudra tout de même suspendre son incrédulité plus d’une fois pour être parfaitement entraîné par Strange Pictures. La surinterprétation de certains dessins fera passer pour de grands scientifiques les plus obscures psychanalystes ! De plus, le livre pèche vraiment dans son écriture, sans que l’on sache si le problème vient de la traduction ou du style même d’Uketsu. Un livre qui se lit donc vite, plaisant, car ludique, mais qui laisse finalement peu de traces.
Strange Pictures, UKETSU, traduit du japonais par Silvain Chupin, Seuil, 240 pages, 19,90 €
Visuel : © Couverture du livres