Dans son nouveau roman, Oscar Coop-Phane nous emmène sur la route de sois en peine.
Que celui ou celle qui n’a jamais refusé une rose me jette la première pierre. Pas une soirée parisienne ne se passe sans que l’on ne croise l’un de ces vendeurs ambulants. Au début, on décline poliment. On invente une (mauvaise) blague pour reprendre au plus vite sa conversation. Puis, on finit par baisser les yeux et ne plus même percevoir le visage de celui qui nous tend la rose. Par habitude plus que par gêne.
Car derrière ce visage se cache tout un système qu’on ne saurait voir, qu’on ne voudrait voir tant il est une machine à cash. Une machine à broyer sur laquelle, avec Rose nuit, Oscar Coop-Phane est bien décidé de lever le voile. Sous le décor de carte postale ? On découvre les coulisses d’un commerce juteux. Au nom de la rose, Nana, Jan et Ali se démènent. La première affronte des serres de pesticides pour les cueillir dans la vallée du Rift, le deuxième les achète dans le gigantesque marché aux fleurs d’Amsterdam, le dernier les vend aux terrasses des cafés de la capitale. Trois pays, trois quotidiens radicalement différents et pourtant terriblement liés.
Si les premières pages sont un peu laborieuses, Oscar Coop-Phane finit par nous embarquer, bon gré mal gré, dans une enquête aussi trépidante que bouleversante. Le rythme de croisière auquel l’écriture parvient enfin rend encore plus palpable la logique implacable de la loi du marché, celle-là même qui régule les corps et transforme les individus en automates. Tous sans exception. Main d’œuvre exploitée comme traders, tous les personnages vivent comme des ombres. Et la rose de devenir l’arbre qui cache la forêt de faux-semblants et désillusions. Dans l’espoir, peut-être, que vous jetterez un œil, rien qu’un, au jeune homme qui, ce soir, vous tendra une rose.
Oscar Coop-Phane, Rose nuit, sortie le 23 août 2023, Paris, Grasset, 162 p., 18 euros.
Visuel : couverture du livre.