Livres

Pirrkko Saisio : sensations d’enfance

par Jean-Marie Chamouard
26.02.2024

Dans « Le plus petit dénominateur commun » Pirrkko Saisio vient de perdre son père et se remémore sa petite enfance dans la Finlande des années cinquante. Un récit intimiste et sensible.

Une enfant un peu solitaire et imaginative

«Au réveil, je me rappelle que mon père est mort. Je décide d’écrire ce livre». A son retour de Corée, son père ne répond plus. Bouleversée, elle le retrouve au sol inanimé et le conduit à l’hôpital où il décédera rapidement. Pirrkko était une petite fille brune, «donc sombre». Enfant unique, elle voulait être un garçon. Elle passe de longues semaines l’été à la campagne chez son Papi et sa Mamie, jusqu’à l’arrivée des hirondelles qui annoncent l’hiver redouté. Son père voudrait qu’elle devienne une «sacrée nénette» qui n’obéirait à personne (sauf à lui)! Il travaillait à l’association Finlande-URSS et croyait au progrès. Sa mère, «elle chantait mieux que moi, était plus belle que moi». Elle va ouvrir une épicerie coloniale, le plus petit magasin de Finlande. Le lecteur découvre avec les yeux d’une enfant de 5 ou 6 ans de nombreux oncles et tatas souvent pittoresques. Il suit également Pirrkko, malade, dans la «Forteresse des enfants», ses déboires à l’école maternelle, sa découverte de la lecture.

De courts paragraphes, comme des poèmes en prose

Pirkko Saisio est une écrivaine, dramaturge, metteuse en scène finlandaise. Née en 1949, elle a reçu en 2003 le prix Finlandia, le plus grand prix littéraire du pays. Le plus petit dénominateur commun est le premier volume d’une trilogie, la Trilogie de Helsinki. Dans ce récit, le «Je» de la narratrice alterne avec «elle», elle qui représente le travail de l’écrivaine sur elle même. La construction du livre est originale, son style aéré. IL est volontiers onirique et poétique comme dans le chapitre consacré aux couleurs des rêves ou sur le rubis «qui brille des feux de l’amour irrésistible».
Le roman a une dimension sociale. Le lecteur pourra être surpris par la grande pauvreté de la Finlande au début du 20ᵉ siècle. L’enfance de Pirkko se situe dans les années cinquante, dans un pays en pleine reconstruction, dans une famille modeste où la vie restait difficile.
Mais il s’agit surtout d’un livre sur la petite enfance. Les souvenirs, les sensations s’enchaînent naturellement. Certains sont marquants comme la casquette verte avec un avion jaune, l’incendie du restaurant Pikkatilly, le pommier qui devait croître en elle. Le texte est tendre, délicat, malicieux aussi car «à 6 ans j’étais déjà sceptique ». Et le lecteur pourra ouvrir la porte de son secret…

Pirrkko Saisio, Le plus petit dénominateur commun, traduit du finnois par Sébastien Cagnoli, Robert Laffont, 305 pages, 21 Euros, sortie le 11 01 2024.

Visuel(c): couverture du livre, éditions Robert Laffont.

Pirrkko Saisio : sensations d’enfance

Une enfant un peu solitaire et imaginative

De courts paragraphes, comme des poèmes en prose

« Celui qui ment le premier » d’Ashley Elston : Traquée

« Fabriquer une femme » de Marie Darrieussecq : On ne naît pas femme

« Down Under Moviez » de Julien Savès & Julien Beaunay : Vers l’Ozploitation, et au-delà

« Fadhila », d’Aristide Tarnagda : une pièce puissante