Ancien joueur de poker, Dario Diofebi livre avec Paradise, Nevada un roman ambitieux à la hauteur de l’American dream.
Quelle ville des États-Unis est plus clivante que Las Vegas ? Le Strip concentre à lui seul les mythes et les désillusions, le rêve et le cauchemar américains, le bling et les bides, les paillettes et les miettes. Cette ville qui d’autre qu’un joueur de poker pour la raconter en large et en travers, pour dire ses largesses et ses travers ? C’est en tout cas la tâche que s’est donnée Dario Diofebi, ancien joueur de poker en ligne, passé par les rangs du programme de creative writing de la New York University où il enseigne désormais.
Paradise, Nevada c’est plusieurs histoires en une. Ce sont les histoires de Ray, Tom, Trévor, May, Karine, Lindsay et tous les autres qui côtoient de près ou de loin l’un de ces temples du jeu dont Las Vegas est truffée. Au fil des pages, on comprend en effet que le destin de Ray, jeune prodige désargenté du poker en ligne, n’est pas aussi déconnecté de celui de Tom, italien chanceux mais en situation irrégulière. Mais, Dario Diofebi prend un plaisir presque mathématique à les enchevêtrer, à relier ses personnages “par des strates infinies de récits enchâssés, par des histoires et donc des mensonges”. Commodes paraboles qui ne font pas illusion. Pouvoir, argent, mort : les personnages n’échappent pas aux fratricides et revers de fortune.
Paradise, Nevada n’est pas à proprement parler un page turner. Il se lit bien à condition de ne pas se coucher devant les très nombreuses notes de bas de page et d’accepter que les personnages incarnent des arguments et non des êtres de fiction. Il n’empêche, Dario Diofebi prend ses responsabilités en tant qu’écrivain en choisissant quelle histoire raconter. À nous de décider si nous choisissons d’y croire ou pas.
Dario Diofebi, Paradise, Nevada, sortie le 23 août 2023, Paris, Actes Sud, 656 p., 23,90 euros.
Visuel : couverture du livre.