Enfin un essai qui ne nous demande pas de respirer profondément ni de relativiser, mais de hurler et de mordre.
Journaliste, auteur, scénariste et conférencier, Éric La Blanche connaît les terrains brûlants : féminisme, écologie, médiation scientifique. Alors, pas étonnant qu’il ait choisi de réhabiliter cette émotion honnie, la colère. Celle qu’on nous a appris à taire, qu’on a reléguée du côté de la violence, du mal, de l’irrationnel. Or, rappelle-t-il, jamais aucun puissant n’a tremblé devant notre docilité. Et si au lieu d’ériger la peur en moteur politique, comme on l’a fait ces dernières années dans la littérature écologique, on réapprenait à investir nos colères, à les organiser, à les transformer en force collective ? C’est le pari de Osons la colère : montrer que cette émotion n’est pas un fardeau mais une énergie vitale, une arme de survie.
À la lecture, on sent bien que le ton pourra déranger. C’est frontal, parfois brutal, sans précaution de langage. Mais à quoi bon les ronds de jambe quand il s’agit de destruction planifiée, quand industriels et politiques continuent d’avancer avec cynisme ? Ce livre fait du bien parce qu’il tranche avec les discours policés et anxiogènes. Il nous dit : cessez d’intérioriser la colère, cessez de la retourner contre vous. Apprenez à la revendiquer, à la crier, à la partager. Et surtout : engagez-vous, vraiment. Car rien ne changera sur un fil Twitter ou un post Instagram. La force du livre est peut-être là : il n’a pas toutes les réponses, mais il ouvre la brèche. Et dans cette brèche, il nous revient de laisser entrer la colère, pour qu’elle fasse enfin trembler les murs.
Éric La Blanche, Osons la colère, sortie le 3 septembre 2025, Actes Sud, 240 p., 22 euros.
Visuel : @ Couverture du livre