Livres

Les confidences de Lola Lafon

par Jean-Marie Chamouard
27.02.2025

Dans « Il n’a jamais été trop tard », Lola Lafon nous livre les réflexions, interrogations, inquiétudes qui l’ont accompagnée en 2023 et 2024. Elle nous offre un récit intime, touchant par sa sincérité.

Un récit très personnel

« Ce livre est une histoire en cours ». Il prend la forme d’un carnet intime où l’auteure note ses pensées et ses émotions. Les textes sont courts, et s’égrènent au fil des mois et des saisons sur deux ans.
Lola Lafon nous parle de rencontres de la vie quotidienne, comme avec la mendiante qui intrigue avec ses cheveux teints ou avec l’homme qui répète dans le métro, telle une litanie, « ce n’est pas possible ». Il peut s’agir de belles rencontres, lorsque des collégiens décident d’écrire avec elle une nouvelle sur l’amitié, un moyen de soulager leurs craintes. Elle laisse libre cours à sa colère, à propos des violences faites aux femmes ou des violences sexuelles, « ce triste paysage souterrain ». Elle ne cache pas son admiration pour Gisèle Pelicot qui a pulvérisé le mythe du monstre en dévoilant au grand jour les crimes d’hommes ordinaires. Son inquiétude est patente « face à ce monde atteint d’autophagie ».
Mais l’émotion est présente dans le texte, quand elle nous offre de très belles pages sur la vieillesse et la disparition des parents, « ce moment où l’on quitte sa place d’enfant ». Elle culmine avec la photo de famille prise à Varsovie avant que les garçons ne quittent la Pologne. Cette photographie est devenue un tombeau car les quatre femmes ont disparu, emportées par la Shoah. Cette photographie est leur seule sépulture. Un moment très émouvant pour le lecteur.

L’inquiétude, moteur de l’action

Il appréciera la belle écriture de Lola Lafon, la justesse de ses réflexions, son sens de la formule. Son sens du récit permet à des textes très courts d’apparaître comme de brèves nouvelles. Le livre est touchant, l’auteure y dévoile sa sensibilité, ses traumatismes, ses failles, ses incertitudes. Elle ne cache pas ses opinions politiques. Mais l’inquiétude domine avec le sentiment d’impuissance pendant ces deux années assombries par les guerres. Elle souhaite réhabiliter l’inquiétude « qui ne doit pas être indésirable », mais doit conduire à l’action. Tel est le sens du titre du livre. « Il n’a jamais été trop tard» est une phrase écrite sur un mur, dans une ruelle parisienne. Quelques mots discrets, découverts par hasard, qui interrogent l’écrivaine. Car « l’art est une façon de tenir tête à ce que l’on nomme le réel ». Comme une brise d’espoir apportée par l’écriture…

Lola Lafon, Il n’a jamais été trop tard, Stock, 150 pages, 19,50 euros, sortie le 8 janvier 2025.

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