« LA petite FILLE oubliée », l’ombre de l’enfance
par Camille Zingraff21.07.2025
En noir et blanc, LA petite FILLE oubliée de Souky, emporte le lectorat dans une spirale de planches de plus en plus sombres. Quelques lueurs émergent d’Aleona, petite fille de 11 ans, et de ses carnets, vite effacées par la noirceur intérieur de sa mère, qui calcine peu à peu les pages et leur quotidien. Ce récit s’insère avec force dans le naufrage de la dépression parentale.
La douleur de l’enfant
Aleona voit son quotidien bouleversé par la dépression et la folie de sa mère. La silhouette maternelle perd son humanité et est régulièrement représentée en une créature noire aux contours débordants, absorbant tout l’espace. Si le trait est d’abord fin pour croquer la jeune fille à l’école ou dans ses carnets, l’obscurité du malheur maternel submerge tout. La petite fille suffoque dans le charbon des angoisses et tourmentes quotidiennes.
Plonger dans le gouffre
Par ses dessins et ses mots, Souky s’enfonce avec justesse dans l’épaisseur des silences et des douleurs intra-familiales. La dépression est montrée à hauteur d’enfant, ce qui la rend d’autant plus monstrueuse. Désemparée, Aleona est paralysée par ce quotidien où la démence et les pensées suicidaires de la mère la harcèlent. Hantée par ses peurs, ses angoisses et le tourbillon infernal familial, elle sent l’étau se resserrer de plus en plus, tandis qu’elle essaye de grandir, de survivre.
Hommage aux oublié.e.s
À l’inverse de l’outrenoir de Soulages, le noir charbon de Souky absorbe toute vitalité et efface jusqu’au blanc de la page. Mais avec cette œuvre, sa première bande dessinée, l’auteur boucle la boucle.
Dans sa postface, celui-ci explique qu’enfant, son quotidien ressemblait à celui de la petite fille oubliée, « Aleona c’est moi / La mère c’est mon père ».
Les majuscules du titre prennent alors tout leur sens : elles renversent les genres, comme pour brouiller les rôles. Quant au titre en tant que tel, LA petite FILLE oubliée, il était déjà celui de ses poèmes d’enfance, et devient l’étendard des survivant.e.s.
Livre cathartique, cette BD sauve et témoigne, de ces souffrances et de ces gouffres. Ce récit, nécessaire, est d’une grande justesse, tant verbale qu’illustrée. Avant tout, comme l’indiquent les derniers mots, « cette histoire c’est celle des oublié.e.s ».
visuel : ©Souky, LA petite FILLE oubliée
LA petite FILLE oubliée, Souly, Bubble éditions, déjà en librairies et sur le site.
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